de Pierre Assouline

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La République des livres

Littérature de langue française

Albert Memmi, dedans et dehors

Albert Memmi, dedans et dehors

Albert Bensoussan

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S’il est un homme à avoir pensé la Tunisie au temps de l’Indépendance, c’est bien l’écrivain Albert Memmi, romancier à succès – prix Carthage 1953 –, intellectuel engagé et sociologue accompli. La littérature de langue française en Tunisie commence réellement avec lui et la publication de La statue de sel, roman parrainé par ce grand découvreur que fut Maurice Nadeau et préfacé par Albert Camus. Memmi est alors un Tunisien convaincu. Né en 1920, à l’approche de son centenaire, il nous livre dans Tunisie, An I (édité et annoté par Guy Dugas, Biblis, CNRS éditions, 226 p., 10 €) ses carnets […]

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Translation de Rabelais

Translation de Rabelais

Marie-Madeleine Fragonard

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Ceci n’est pas, ne peut pas être une traduction. Tout le monde vous le dira, on ne traduit pas une langue en elle-même. Tout au plus des exercices de style comme ceux de Raymond Queneau permettent-ils de changer les niveaux de langues et styles de rédaction. Nous ferons donc des exercices de style en changeant de temps. Pourtant bien des gens vous le diront, Rabelais parle une langue étrangère. Française sûrement (quoique bien mêlée), mais archaïque, et si archaïque que l’usure du temps ne nous permet même pas de constater qu’elle n’était déjà pas immédiatement intelligible pour les lecteurs du XVIème […]

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Gloria victis !

Gloria victis !

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Quand on n’est pas soi-même conservateur, réac, daté ni ringard, il faut oser s’emparer d’un genre tel que le roman historique, qui pâtit depuis des lustres de cette réputation aux relents de naphtaline, pour espérer le renouveler. Ce défi, un écrivain français l’a déjà relevé en quelques livres à peine (édités par Actes sud à l’exception du premier chez Léo Scheer) ; et il a tenu son pari sur la durée avec un tel brio que l’on se demande s’il n’a pas réinventé l’un des plus vieux genres littéraires. Pour autant, le discret Eric Vuillard ne la ramène pas. Régulièrement remarqué […]

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Des années légères aux années de plomb

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On le sait bien : ce n’était pas mieux avant. Ou plutôt : si notre mémoire, en cela aidée par le mythe édénique, a fabriqué l’idée que c’était mieux avant, c’est juste parce que nous étions plus jeunes, souvent plus insouciants, pas encore alourdis par les responsabilités et pas gagnés par le désenchantement, l’amertume, le regret –selon les cas. De là à s’imaginer qu’on est passé de l’âge de l’innocence à celui de la barbarie, il n’y a qu’un pas de deux esquissé par deux livres que tout oppose. Dans Place des Vosges (150 euros, 16 euros, Seuil), Michel Braudeau, né en […]

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Creuser l’énigme dans la langue avec Pascal Quignard

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« La première œuvre de la littérature française date du mercredi 12 février 881, à Valenciennes, sur les bords de l’Escaut. La tradition a intitulé ce premier poème écrit en français Séquence de Sainte Eulalie… Remonter aux origines de l’origine, Pascal Quignard n’a jamais cessé de s’y aventurer de livre en livre. Cette fois, celles de la langue et de la littérature françaises. Il poursuit dans Les Larmes (214 pages, 19 euros, Grasset) son exploration obsessionnelle car inassouvie du jadis. Rien ne le passionne comme le moment où ça bascule que ce soit dans une vie, dans une ville ou dans un […]

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Mystique de l’aviron

Mystique de l’aviron

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Que celui qui n’a jamais galéré me jette la première pelle ! Attention, pas de malentendu : celle-ci ne se roule pas mais se saisit, se tend, se porte, s’utilise et, dans les cas extrêmes, se jette. Seuls les béotiens diront « la rame » en lieu et place de la pelle. Le verbe a connu une telle fortune qu’on en oublierait l’origine. Qui n’a pas ramé dans sa vie ? Certains rament encore, au bureau, à la maison, en société, voire sur un lac ou un bras de fleuve. De ces derniers je fus de quatorze à vingt-quatre ans au PUC/CNFU, sur la Seine […]

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Le Goncourt et le Renaudot font le choix des femmes

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( Dépêche AFP)  La jeune romancière franco-marocaine Leïla Slimani a décroché jeudi le plus convoité des prix littéraires en obtenant dès le premier tour de scrutin et en moins de dix minutes de délibérations le prix Goncourt pour son roman Chanson douce (Gallimard). Elle a obtenu six voix au premier tour contre deux voix pour Gaël Faye (Petit pays, Grasset) et une voix chacun pour Catherine Cusset (L’autre qu’on adorait, Gallimard) et Régis Jauffret (Cannibales, Seuil). Le jury du Renaudot a choisi également d’honorer des femmes en attribuant son prix à la dramaturge Yasmina Reza pour son roman Babylone (Flammarion) et, côté essai, […]

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Les intermittences du coeur

Les intermittences du coeur

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Quel écrivain mesure vraiment le risque qu’il court en abandonnant son œuvre entre les mains d’un cinéaste qui en fera la sienne ? Le plus souvent, il est conscient du malaise à naître de la dépossession, mais moins des affres de l’appropriation par un autre créateur. Un détournement de but, de sens, d’esprit le menace ; si le livre en question a eu peu de lecteurs, le dommage demeure personnel, intime ; dans le cas contraire, le risque est grand qu’il porte préjudice au livre, se superpose au puissant souvenir que le lecteur en avait gardé, le dénature peut-être jusqu’à l’éclipser sinon s’y […]

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Une chanson douce aux accents de requiem

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“Le bébé est mort.” Voilà un incipit de roman promis à une certaine fortune. Il résonne comme celui de L’Etranger, la violence en plus, ou comme le murmure d’Agnès dans L’Ecole des femmes (scène 5, acte II). Car Chanson douce (232 pages, 18 euros, Gallimard) s’ouvre sur une scène de crime. Manière de liquider le problème et de signifier au lecteur : ne cherchez pas le suspens de ce côté-là, il est ailleurs, dans le lent démontage de cette logique infernale qui fait basculer un esprit apparemment sain dans la folie meurtrière. Vous voyez à peu près à quoi ressemble la […]

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Vices et vertus de la confusion des genres

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Brouiller les genres littéraires et s’affranchir de leurs frontières, c’est courir le risque d’en subir les conséquences et d’en récolter les fruits. On est à peu près sûr d’être méprisé par les historiens, les sociologues, les journalistes, les romanciers, chacun jugeant à l’aune de sa science ou de son art que c’est trop ceci et pas assez cela ; mais dans le même temps, le public y trouvera son compte si l’auteur a su parasiter et détourner avec talent tous les codes narratifs au profit de son récit. A condition de ne pas se demander si c’est du lard ou du […]

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