de Pierre Assouline

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La République des livres

sciences humaines

Louons maintenant le grand homme

Louons maintenant le grand homme

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L’explorateur, ethno-historien et géographe spécialiste des mondes polaires et des Inuits, nous a quittés il y a quelques jours à l’âge de 101 ans. Jean Malaurie était une personnalité très attachante. En dehors du monde des « spécialistes de sa spécialité », il était aussi un écrivain, auteur d’une oeuvre prolifique, et avant tout l’inventeur en 1954 et longtemps l’inépuisable animateur d’une des plus originales et des plus exigeantes collections de l’édition française : « Terre humaine » chez Plon. Il y a plusieurs années, je l’avais longuement rencontré chez lui pour écrire son portrait. « Je vous épargne les détails… » Mon Dieu, mais qu’est-ce […]

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Henri Meschonnic versus DeepL

Henri Meschonnic versus DeepL

Françoise Wuilmart

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Commençons par Henri Meschonnic. Et nous verrons ensuite si DeepL le fait se retourner dans sa tombe, et si oui, dans quel sens. La réputation de Meschonnic le précède depuis toujours : esprit très clair et novateur, presque révolutionnaire dans la pensée sur le langage, il a recours à un discours que l’extrême précision rend parfois sibyllin. Ce que je tenterai ici est une gageure : le simplifier, le synthétiser,  le « vulgariser », et vous verrez que dans le fond, il est limpide ! Allons-y ! Quelques termes-clés seront les premiers jalons sur la voie de sa découverte : le signe, le discontinu, le binaire, le continu, […]

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Les humanités gréco-latines seraient-elles toxiques ?

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La guerre contre les humanités gréco-latines vient de franchir un cap : il ne s’agit plus de les critiquer, de les dénoncer, de les réduire mais bien de les anéantir. On n’en est pas encore là en France mais on en est déjà là aux Etats-Unis (le Figaro s’en est fait l’écho en publiant sur FigaroVox une tribune de Raphaël Doan puis un appel signé par 45 universitaires européens). Il est vrai que, quels que soient les reproches que les historiens de l’antiquité et les professeurs de grec et de latin puissent adresser à l’enseignement de leurs disciplines, il ne leur […]

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Débattre de la fin du « Débat »

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Au fond, si l’histoire des idées devait retenir la revue Le Débat pour l’inscrire à une date sur la frise de notre histoire culturelle, ce n’est pas tant celle de sa naissance que celle de sa mort qui devrait être retenue. Après tout, quand une nouvelle revue apparaît, elle n’est riche que d’annonces, de projets, de promesses, et on ignore ce qu’on y gagnera ; mais lorsqu’elle met la clef sous la porte quarante ans après l’avoir ouverte, on sait ce qu’on perd. En fait, les deux phénomènes qui signent la mort du Débat, avec la parution de son dernier numéro […]

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Les traductions aussi ont une histoire

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« Savez-vous pourquoi la traduction des livres d’histoire comme objet d’histoire laisse totalement indifférents les historiens du culturel ? Nous non plus… De fait, après avoir essuyé bien des refus, nous avons eu le plus grand mal à en trouver un qui veuille bien s’y coller ! ». Heureusement, Bernard Banoun a tenu bon. Ce germaniste est le maître d’œuvre, avec Isabelle Poulin et Yves Chevrel, du dernier tome de la monumentale Histoire des traductions en langue française (1920 pages, 48 euros). Une somme en quatre volumes qui court de l’invention de l’imprimerie jusqu’à la fin du XXème siècle éditée par Verdier sous la […]

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Pour saluer Jean Starobinski

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La disparition d’Yves Bonnefoy au cours de l’été 2016 ne m’avait pas seulement ramené du côté de ses livres mais de ses amis. Parmi eux, Jean Starobinski avec qui il avait composé Goya, Baudelaire et la poésie (107 pages), publié avec un soin extrême (couverture des plus subtiles dans la discrétion, et typographie assortie) par un petit éditeur suisse à l’enseigne vénitienne (La Dogana). A les suivre dans leur échange loin de toute cuistrerie médiatique mais si près de ce que Bonnefoy appelle « l’Arrière-pays », on se laissait convaincre que, ce qui importe à la poésie comme à la peinture, c’est « un […]

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La chancelante équivocité du monde

La chancelante équivocité du monde

Barbara Cassin

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Je veux d’abord remercier le CNRS, cette institution magique que l’on envie à la France. Il m’a donné cette chose inappréciable, la plus introuvable de toutes : le temps de travailler. Permettez-moi cependant, puisque nous sommes dans un cadre institutionnel, une remarque d’institution : dans le CNRS d’aujourd’hui, je ne serais pas là. J’ai été recrutée comme professeure du secondaire, sur un « poste d’accueil », et cela n’existe plus. Or cette perméabilité secondaire-supérieur-recherche tirait magnifiquement parti de la forte singularité française qu’est la classe de philosophie. Quel dommage de se priver d’une circulation si féconde, qu’elle soit longue comme au CNRS, […]

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Manifeste éclectique

Manifeste éclectique

Fulvio Caccia

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Que peut la littérature face aux replis identitaires qui risquent d’aspirer l’Europe et le monde ? Est-elle simplement un baromètre de nos inclinaisons centripètes ou centrifuges ? Le sismographe des nos peurs et de nos espoirs ? Que dit-elle de nous, de nos échecs et des seuils encore à franchir au moment où la mondialisation financière s’épuise et met en danger l’équilibre écologique de la planète ? Il ne s’agit pas ici de faire de la littérature le porte-étendard d’une nouvelle cause à défendre, mais de rendre enfin visibles les frontières du territoire qui n’a jamais cessé d’être le sien : celles de […]

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Gérard Genette n’est plus, théoriquement

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Pour nombre d’anciens étudiants en Lettres en amont et en aval des années 70, Gérard Genette, qui vient de disparaître à 87 ans, restera comme un maître de la théorie des formes en littérature. Ses livres d’alors (les multiples tomes de Figures, Palimpsestes, Seuils notamment) demeurent dans certaines mémoires comme d’indispensables traités destinés notamment à garder la sémantique des ravages et galvaudages de l’esprit du temps. Lorsqu’il animait la revue Poétique avec son ami Tzvetan Todorov et Hélène Cixous, il entendait « libérer l’enseignement littéraire à l’université de la grille des nations et des siècles, et l’ouvrir à ce qui rapproche […]

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La part des ombres de Jean Malaurie

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« Je vous épargne les détails… » Mon Dieu, mais qu’est-ce que ce serait dans le cas contraire ! Le fait est que l’âge n’a pas entamé en cet homme d’un charme fou le goût irrépressible de raconter en s’autorisant toutes les digressions. Et comme il sait jouer de sa voix chaleureuse, de sa prodigieuse mémoire et de sa puissance d’évocation, on se résout à rater le rendez-vous suivant, surtout lorsqu’il prévient : « Il faut toujours garder la part des ombres et il y en a encore chez moi… » Explorons donc le passé de l’explorateur. Famille bourgeoise de la droite catholique normande tendance janséniste (« Pour tous […]

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