LE COIN DU CRITIQUE SDF
Il y a des textes dont la modestie touche au sublime. Histoires (Buchet-Chastel) de Marie Hélène Lafon, qui vient d’être couronné du Goncourt de la nouvelle, appartient à cette bibliothèque-là, une bibliothèque qui affiche comme trésors principaux Un cœur simple de Flaubert ou Vies minuscules de Pierre Michon. Pourquoi parler de modestie ? Ses personnages demeurent des humbles et son écriture, suivant la grande règle selon laquelle le fond commande la forme, n’attire pas l’attention sur elle. Récit et phrases procurent au lecteur une jouissance savoureuse, ininterrompue, mais ni les héros de Marie-Hélène Lafon ni son style ne « font l’intéressant ». […]
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La réforme de l’orthographe, qui a fait beaucoup de bruit, n’est pas si grave quand on examine son contenu ; ce qui est plus grave, ce sont les questions de fond qu’elle soulève. Prenons les deux exemples surmédiatisés de la réforme, qui concernent le changement d’orthographe de « nénuphar » au profit de « nénufar » et d’ « oignon » pouvant s’écrire désormais « ognon ». Vérification faite dans le Dictionnaire historique de la langue française d’Alain Rey, « nénuphar » est un emprunt du persan, où le mot s’écrit avec un « f » ; il a même pu s’écrire, au XIIIe siècle, « neufar » et neuenfar ». Quant à « l’oignon », il n’avait pas de […]
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« Cette phrase-là, ça ne va pas : supprime le point-virgule ! » vient de me dire mon rédacteur en chef pour l’un des journaux où je travaille. Le fait est là : il disparaît de la circulation et vous n’en voyez presque plus quand vous lisez vos quotidiens. Ok, je vais passer pour une réac : oui, je fais partie des journalistes qui résistent et défendent le point-virgule, à l’instar d’écrivains comme Michel Houellebecq, Erik Orsenna ou le regretté Léopold Sédar Senghor. Pourquoi ? Parce que le point-virgule, c’est une demi-pause qui garantit l’unité de la phrase. Si je le remplace par un point, je […]
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(…) Hurlevent s’ouvre par un double récit dans le temps réel du roman. Un certain Mr. Lockwood s’aventure dans les landes lointaines pour rendre visite à son nouveau propriétaire et se voit forcé de rester pour la nuit à cause de la météo capricieuse. Une atmosphère on ne peut plus lugubre règne dans cette maison où les jeunes gens, pleins d’amertume, restent tapis dans les coins. Heathcliff, seigneur du manoir qui tombe en ruines, semble hanter sa propre demeure comme un fantôme enragé et incurablement vivant. Lockwood, qui est extrêmement curieux, interroge Nelly Dean, sa gouvernante dévouée, qui a été, […]
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Elle et Lui … Elle : 28 ans, professeur, cultivée, belle, beaucoup de classe, aimant la littérature et la marche à pied. Lui : 41 ans, artiste tourmenté, dessinateur de croquis bizarres, épistomane, amateur de fantasmes sexuels en tous genres, tendances masochistes et fétichistes certaines. Jozefina Szelinska et Bruno Schulz : la fiancée et le génie. Ils s’aimèrent passionnément, entre 1933 et 1937, à Drohobycz, ville provinciale de Galicie orientale, aujourd’hui située en Ukraine. Bruno était très épris de cette muse, cette déesse (il la surnommait Juna, d’après Junon), voyait en elle « l’être le plus proche » qu’il ait eu sur […]
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Pier Paolo Pasolini (1922-1975) est connu en France comme cinéaste avec des films cultes comme L’Evangile selon Saint-Mathieu (1964), Théorème (1968) Le Décaméron (1971) et bien d’autres. En Italie, il est reconnu avant tout comme poète, ce qu’il était. Ses contemporains n’ont pas oublié sa fin tragique. En revanche, sa passion pour le football, qui faisait partie de son être intime au même titre que sa création et sa vie privée, est occultée. Laurent Lasne a voulu explorer cette partie peu connue de sa vie dans Pier Paolo Pasolini. Le geste d’un rebelle (240 pages, 17 euros, éditions Le Tiers livre). Le […]
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Je ne comprends pas le succès de ce gros pavé qu’est le Journal 1939-1945 (édition établie, présentée et annotée par Pascal Fouché et Pascale Froment, 700 pages et index, 35 euros, Les Belles Lettres) de Maurice Garçon par de seules raisons d’intérêt historique ou littéraire. Il n’en a pas et pas la prétention d’en avoir. Garçon n’imagina jamais une publication mais, puis-je dire « comme moi » ?, un exercice quotidien de mémoire. Non, ce qui touche, c’est la peinture de la confusion et des incertitudes d’une époque vue par un homme de raison, pas du tout un idéologue, un homme qui se contente […]
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Quand commence la philosophie médiévale ? Quand finit-elle ? On dira : cela va de soi, elle commence et finit avec le Moyen Âge. C’est faux. Ou plutôt, cela dépend de la réponse que l’on fait à d’autres questions. Le Moyen Âge de l’historien a, si j’ose dire, longtemps commencé à la chute de Rome, en 476, avec l’abdication de Romulus Augustule, dernier empereur romain d’Occident, pour s’achever en 1453 avec la prise de Constantinople par Mehmed II et la chute de l’Empire romain d’Orient. Cette fin du Moyen Âge, événement politique et religieux interne à la fois à la romanité (Romanitas) et à […]
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L’illusion délirante d’être aimé, syndrome qui correspond à ce que l’on appelle l’érotomanie, est traité avec brio par Florence Noiville dans son nouveau roman éponyme paru chez Stock. Or cet état psychique nous parait bien familier. L’héroïne n’aurait-elle pu être l’une de nous ? Son amie d’adolescence, malade d’amour, une de nos proches des années de classe préparatoire? D’autant que l’histoire se déroule à Paris dans un univers contemporain et familier. Le roman est construit sur une mise en abyme. La narratrice Laura Wilmote harcelée par une femme qu’elle ne nomme que par la première lettre de son nom, C…, dont […]
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Il y a eu le Contre Sainte-Beuve de Proust, il y aura désormais Les rimbaldolâtres (Grasset, 128 p., 13 €), c’est-à-dire un Contre la Rimbaldie. Ecoutons l’auteur : “Le problème avec Rimbaud, dit-il, c’est la Rimbaldie.” (p.66) Quel est l’énergumène qui a osé écrire cela, à propos de l’amant de Verlaine, du poète des Illuminations et du ‘Dieu’ des Surréalistes ? Eh ! bien, c’est Jean-Michel Djian, auteur des Solitudes du pouvoir et biographe d’Ahmadou Kourouma. Disons-le tout de suite, il s’agit d’un pamphlet dirige contre tous les adorateurs et les thuriféraires de Rimbaud depuis 1891. Tout y passe : les gardiens […]
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