de Pierre Assouline

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La République des livres

Littérature étrangères

Ave Marias !

Ave Marias !

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Voilà bien une merveille : Si rude soit le début (Asi empieza lo malo, traduit de l’espagnol par Marie-Odile Fortier-Masek, 576 pages, 25 euros, Gallimard). Javier Marias (Madrid, 1951) y témoigne de ce qu’il demeure l’un des meilleurs écrivains européens, vingt-cinq ans après le roman qui l’avait révélé Corazon tan blanco (Un Cœur si blanc, Rivages) traduit en 37 langues et vendu dans 44 pays, avant Demain dans la bataille pense à moi qui fut couronné du prix Femina étranger. Cette fois, c’est tout autre chose mais c’est bien sa manière à l’envoûtement de laquelle on résiste difficilement. Quatre personnages principaux, […]

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Magda Szabo porte ouverte

Magda Szabo porte ouverte

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Vous connaissez Emerence Szeredas dite simplement Emerence ? De toute façon, si vous l’aviez connue, vous ne l’auriez jamais oubliée. Un peu comme la Félicité d’Un Cœur simple que le génie de Flaubert a rendu inoubliable. Pourquoi une telle analogie alors que tout oppose ces deux personnages ? En raison du rapport entre le maître et l’esclave, le dominant et le dominé, la maîtresse de maison et son employée. Et parce qu’avec des moyens très différents, la romancière Magda Szabo (1917-2007), haute figure des lettres hongroises, en a fait quelqu’un dans son magnifique roman La Porte (Az Ajto, traduit du hongrois par […]

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La légende intime d’Aharon Appelfeld

La légende intime d’Aharon Appelfeld

Albert Bensoussan

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L’écrivain israélien Aharon Appelfeld est né en 1932 à Czernowitz en Bucovine, territoire partagé entre l’Ukraine et la Roumanie tragiquement ballotté par l’Histoire. Son œuvre est forte d’une quarantaine d’ouvrages, pour près de la moitié traduits en français. Ce rescapé de la Shoah a vu disparaître ses parents et grands-parents, s’est évadé d’un camp de concentration – où a péri son père, sa mère ayant été exécutée précédemment −, a erré quatre ans dans les forêts d’Ukraine, avant de trouver refuge en Israël. Témoin privilégié de la destruction du shtetl et du génocide juif, il a parfois été considéré comme […]

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Le traître est parfois juste un peu en avance sur son temps

1850

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Franchement, que peut-on attendre d’un roman intitulé Judas (traduit de l’hébreu par Sylvie Cohen, 352 pages, 21 euros, Gallimard) qu’une histoire de trahison, une réflexion sur la chose, ses avatars et ses variantes ? On n’aime pas trop que l’intention s’affiche dès le titre. Ca tue le mystère. Et pourtant… C’est compter sans le métier d’Amos Oz, sa maîtrise de tous les registres narratifs, sa formidable faculté d’empathie, sa capacité à faire dire à une histoire autre chose que ce qu’elle dit. Et si Judas avait été, contrairement aux interpretations communément admises, jusqu’à en faire le paradigme absolu de la figure […]

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Un métier à la portée des tout-petits

Un métier à la portée des tout-petits

Jean-Pierre Pisetta

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En 1986, peu après la publication de ma première traduction – des contes et des récits de Léon Tolstoï traduits du russe en français –, un ami me proposa d’aller présenter le livre dans l’école primaire de son fils. L’ouvrage étant illustré, j’avais fait des agrandissements de certains dessins et avais débarqué dans la région belge de Charleroi armé de mon matériel didactique. La classe était principalement composée d’enfants d’immigrés turcs et, après les présentations d’usage effectuées par la maîtresse, l’un de ces écoliers m’avait demandé ce que c’était que la « traduction ». C’est effectivement un mot savant et je me […]

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Ici l’ombre : en faire l’éloge ou la louange ?

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Il y a une dizaine d’années, le Seuil avait publié un pénétrant essai de Max Milner sous le beau titre L’Envers du visible. Avec une vivifiante liberté intellectuelle qui convoquait tous les arts au service d’une curiosité sans borne, le critique y faisait rendre l’âme à un thème que l’on croirait infini : ce que l’on voit de l’ombre. Jamais rien lu d’aussi clair sur l’ombre dans l’art. Autrement dit sur la part d’ombre de l’invisible. Sa promenade érudite nous emmenait revisiter aussi bien le mythe de la caverne que le Diderot de la Lettre sur les aveugles, les enténébrés du […]

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Ce que « cervantiser » veut dire

Ce que « cervantiser » veut dire

Juan Goytisolo

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D’une manière générale, il existe deux sortes d’écrivains, ceux qui conçoivent leur tâche comme une carrière et ceux qui la vivent comme une addiction. L’écrivain qui appartient à la première catégorie prend soin de sa promotion, se dépense pour assurer sa visibilité médiatique et aspire au succès. Ce n’est pas le cas pour celui qui appartient à la seconde. Pour ce dernier, réaliser son propre épanouissement lui suffit amplement, mais si toutefois il arrive que son addiction lui procure quelques gains matériels, alors il passe de la catégorie des toxicomanes à celle des dealers ou des revendeurs. J’appellerai ceux de […]

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Javier Cercas à la recherche du point aveugle

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Le roman sans fiction, cet écrivain n’est pas le premier à s’y frotter mais il est de ceux qui lui donnent ses lettres de noblesse. Né à Càceres (Estramadure) en 1962 mais barcelonais depuis l’âge de 4 ans, Javier Cercas a d’abord enseigné la littérature hispanique à l’université de Gérone avant de se consacrer entièrement à l’écriture. Empruntant tant au roman, au récit historique, au portrait, au reportage, à l’interview et à l’enquête journalistique, sa manière lui a permis de grandes réussites, encensées tant par la critique que par le public en Espagne mais aussi dans de nombreux pays. En […]

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Ugo Foscolo et l’écriture d’un « problème italien »

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En octobre 1796, alors que le général Bonaparte apporte en Italie le germe de la révolution, la vieille République de Venise refuse l’alliance avec les Français et proclame sa neutralité. Empreint de convictions démocratiques, le jeune poète Ugo Foscolo s’indigne de voir la Sérénissime reculer devant ce qu’il considère comme un combat pour la liberté. La composition, au même moment, du sonnet À Venise (A Venezia), marque l’avènement en Europe d’une poésie à la fois historique et patriotique et donne le ton héroïque et civique des poèmes politiques qui vont suivre : Aux nouveaux républicains (Ai novelli repubblicani) et Bonaparte libérateur […]

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Stratégie des deux-points chez Gadda

Stratégie des deux-points chez Gadda

Jean-Paul Manganaro

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(…) Quels sont le noyau et le développement du Pasticciaccio (Quer pasticciaccio brutto de via Merulana qui paraît ces jours-ci en français sous le titre L’affreuse embrouille de via Merulana) ? La question est à la fois simple et compliquée. Elle est simple par son « histoire » : deux crimes sont au centre des événements, le vol des bijoux d’une comtesse d’origine vénitienne et, deux jours plus tard, l’assassinat de madame Liliana Balducci, romaine, perpétrés sur le troisième palier d’un immeuble, sis au 219 de via Merulana, où vivent confortablement des gens et des familles de la nouvelle bourgeoisie romaine, le « […]

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