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La République des livres

Coup de vent salubre sur l’Académie française

Par Daniel Lefort

Depuis que la nouvelle a filtré, la candidature de Mario Vargas Llosa au fauteuil de Michel Serres a suscité maintes réactions, y compris dans ce blog. Trois points prêtent à polémique – la nationalité étrangère du candidat, son âge et l’absence de la langue française dans ses œuvres. La critique balance entre respecter les règles de l’institution, qui sont autant d’obstacles – a priori insurmontables – à cette candidature, et aligner les arguments qui les démolissent.

Il est clair qu’en littérature, la nationalité est une notion purement abstraite qui renvoie du côté de l’administration et de la fiche de police : elle ne pèse pas dans la balance. La limite d’âge, de l’aveu même de plusieurs Académiciens, ne tient pas plus et relève du pur arbitraire. Reste l’œuvre écrite dans une autre langue, raison à laquelle certains semblent se raccrocher bien que l’Académie soit « française » comme son titre l’indique, et non « de la langue française » comme sa consœur espagnole (Academia de la lengua española). Voilà sans doute la véritable « révolution » que doivent affronter nos Immortels car elle ouvre un champ loin d’être négligeable aux futurs candidats. Pourtant, c’est la plus intéressante des ruptures et, dans le cas précis qui nous occupe, c’est aussi la plus démonstrative.

Vargas Llosa est l’un des promoteurs et des « illustrateurs » les plus brillants de la littérature française. D’abord si l’on considère que L’Orgie perpétuelle est le meilleur essai qui ait été écrit sur Flaubert, de même que La Tentation de l’impossible sur Victor Hugo et Les Misérables. Ensuite par ses articles toujours substantiels et pénétrants sur Camus, Sartre, Bataille, Malraux, Restif de la Bretonne, Rimbaud ou Breton. De même, son avant-dernier ouvrage, L’appel de la tribu, range parmi ses principales références en matière de pensée politique Raymond Aron et Jean-François Revel. Enfin par sa trajectoire personnelle qui l’a conduit de l’apprentissage du français à l’Alliance française de Lima aux studios de la radio à Paris et à ses débats d’idées avec les intellectuels français (rappelons-nous sa polémique avec Régis Debray, entre autres…). N’oublions pas non plus que les livres de Vargas Llosa, dans leur la quasi-totalité, ont été traduits en français par Albert Bensoussan – seul la plupart du temps ou en collaboration -, leur donnant ainsi une voix unique et une place dans la littérature française que La Pléiade a justement consacrée.

Parmi les responsables des échanges culturels entre la France et l’étranger dont j’ai fait partie, nous étions nombreux à considérer que la culture française en général, et la littérature en particulier, devait passer par la langue du pays partenaire, s’il était non francophone, et qu’elle amenait le plus souvent les écrivains, poètes et artistes fascinés par nos auteurs à apprendre notre langue pour avoir accès directement aux œuvres originales. Ce fut exemplairement le cas de Vargas Llosa.

Alors que l’Académie française a été dédaignée par nos plus grands écrivains contemporains – Le Clézio, Modiano, Gracq, et j’en passe – il est réconfortant de voir qu’elle peut retrouver la capacité d’innovation qu’elle eut à d’autres époques (pensons au XIXe siècle et à ses jeunes membres) en intégrant le premier de la classe qui, par amour de la France et de sa littérature, daigne solliciter un fauteuil sous la coupole après avoir reçu quantité de prix plus prestigieux les uns que les autres, y compris le Nobel.

Au passage, je note que Vargas Llosa écrit en espagnol péruvien et non en castillan. Ce n’est pas anodin si l’on songe que chaque Académie des pays d’Amérique du Sud – hors Brésil – est affiliée à l’Académie espagnole sous le nom de : Académie péruvienne de la langue, Académie chilienne de la langue, etc. Louable reconnaissance – dans l’autonomie – des différentes branches d’une même langue ! À quand une Académie québécoise de la langue, une Académie antillaise de la langue, et même une Académie spécifique pour chacun des pays francophones, affiliée à l’Académie française ? Plusieurs de ces pays possèdent une académie des sciences et des techniques, voire du cinéma et de la télévision, pourquoi pas de la langue ?

J’imagine que cette initiative qui honore l’Académie aura quelques répercussions. Tant mieux ! « Cette vieille chose, une des curiosités les plus folkloriques et les plus anglaises que nous ayons conservées » (Gracq) va enfin pouvoir entrer dans le XXIe siècle et nous permettre de croire qu’avec quelques autres « révolutions », elle va faire son aggiornamento et devenir ce qu’elle n’aurait jamais dû cesser d’être : le cercle des lumières de l’esprit.

Daniel Lefort (co-traducteur avec Albert Bensoussan des trois derniers romans et des deux derniers essais de Mario Vargas Llosa)

Cette entrée a été publiée dans LE COIN DU CRITIQUE SDF, Littérature étrangères.

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commentaires

8 Réponses pour Coup de vent salubre sur l’Académie française

bouguereau dit: à

le cercle des lumières de l’esprit

déd poét socaïti qu’il dirait bodjo

bouguereau dit: à

La limite d’âge, de l’aveu même de plusieurs Académiciens, ne tient pas plus et relève du pur arbitraire

..au dernier rang ils ont comprennent pas bien

bouguereau dit: à

Parmi les responsables des échanges culturels entre la France et l’étranger dont j’ai fait partie, nous étions nombreux à considérer que la culture française en général, et la littérature en particulier, devait passer par la langue du pays partenaire

..tu vois kabloom..lassouline il est jaloux de gordon ramsay

Giovanni Sant'Angelo dit: à

…lundi 15 novembre 2021 à 13 h 49 min.

…il y a, tout de même, danger, avec tous les  » vrais étrangers « , non européens,!…
…de vouloir, devenir ; être nos  » remplaçants « ,!…en France, ou à N-Y,…?

…une politique, économique et social,  » au delà « , de l’intégration, pour seuil à classes de petits-travaux,!…et faire  » jasez « , déviants et monarchiques liés aux profits, plus encore!?

…devenir cocu et baisé, dans les mœurs-acquis!…par l’internationale – solidarité d’après guerres,!…?

…forgeons la droite et la gauche,? pour acceptez l’intolérance dans nos pays et nos champs, ou en faire un cheval de proue déviant,…
…pour devenir des prodigues de stopper le progrès et vivre mieux, avec les sciences,!…tout pour le capital pognon, qui sont’ils, de dedans-dehors,!…actionnaires,!

…de plus, pourquoi travaillez, pour des gens qui ne partagent pas,! » vos idées,! », et qui ne sont stoppez, que par leurs religions, comme des variants de pandémie?.

…etc, etc, vivre comme nous somme, chacun à son aise, même si nous n’avons pas élever le même cochon fasciste ou socialiste ensemble!.

…la famille, faire des enfants de salauds pour les vendre, aux machinations des actionnaires et Trusts,!…par des éducations déviantes, dans les égalités subornées,!…Pâtes à choux,!…
…Ciao !

Bloom dit: à

Parmi les responsables des échanges culturels entre la France et l’étranger dont j’ai fait partie, nous étions nombreux à considérer que la culture française en général, et la littérature en particulier, devait passer par la langue du pays partenaire, s’il était non francophone, et qu’elle amenait le plus souvent les écrivains, poètes et artistes fascinés par nos auteurs à apprendre notre langue pour avoir accès directement aux œuvres originales.

Je fais partie de cette même école. Toutes les conférences que nous avons faites dans les AF que j’ai dirigées étaient traduites, de façon consécutive.
L’arrogance de l’entre-soi linguistique est la négation du dialogue des cultures.

Merville dit: à

L’âge du nouvel immortel est un obstacle qui me semblait insurmontable.Où va t’on si l’Academie viole son propre règlement.

Schmerzende Schärfen dit: à

Bloum dit : « L’arrogance de l’entre-soi linguistique est la négation du dialogue des cultures.»

N’oubliez pas de rappeler cette évidence à vos amis anglo-saxons.

Bloom dit: à

Vargas Llosa a soutenu publiquement le candidat d’extrême droite José Antonio Kast, lors des élections chiliennes.
L’Académie française a élu dans ses rangs un pro-fasciste.
Rien de grave, c’est dans l’air du temps.

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