vie littéraire
Au fond, les libraires ont ceci de commun avec les éditeurs qu’eux aussi pourraient faire leurs la formule de Gaston Gallimard : « Nous ne sommes pas des commerçants comme les autres : nous avons passé un pacte avec l’esprit ». Sinon les livres seraient des produits comme les autres et ça en serait fini de cette fameuse exception culturelle que le monde entier (ou presque) nous envie. Les uns et les autres exercent une responsabilité. Pour être libraires, ils n’en sont pas moins humains, avec ce que cela suppose de dilemmes. Non pas : être ou ne pas être, mais dans une variante un […]
lire la suite .../ ...814
commentaires
De quoi donner à méditer à l’éditeur qui m’éditait… C’est ce qu’a dû se dire Eric Zemmour en étant quitté par Albin Michel. Il ne s’est pas rendu chez un concurrent mais… chez lui afin de publier lui-même son livre paru il y a deux jours. Les 200 000 exemplaires se sont arrachés dès le premier jour, razzia annoncée par le fait que depuis quinze jours, l’ouvrage était déjà en tête des précommandes sur Amazon. Sa bonne fortune en librairie sera suivie par le monde politique, l’auteur ne cessant d’être depuis des mois le candidat le plus non-déclaré aux prochaines […]
lire la suite .../ ...937
commentaires
S’il y a un effet collatéral, discret mais remarquable, à la récente exhumation non sans fracas de manuscrits inédits de Genet, Proust et Céline, c’est bien celui-ci : l’éclatante vacuité de l’expression « biographie définitive ». Celle-ci nous vient du milieu éditorial anglo-saxon, les Etats-Unis et l’Angleterre ayant été et demeurant les terres promises de ce genre littéraire. Peu de biographies échappent à ce label. Généralement, dès que leur épaisseur excède cinq cents pages, elles sont aussi présentées et promues comme « monumental » – ce qui en impose et fait penser à une réflexion de Pierre Alechinsky : « On dit d’un peintre qu’il fait dans […]
lire la suite .../ ...1545
commentaires
Maintenant que les librairies ont été officiellement décrétées « commerces essentiels » au même titre que les épiceries, on va y pénétrer avec sérieux comme on le ferait d’une institution. Ce serait dommage car les libraires risqueraient de perdre leur humour et leur ironie, eux qui en ont tant entendu. Des perles d’inculture, ils n’ont qu’à se baisser pour en ramasser. Mais comme le client est roi, ils ne les partagent la plupart du temps qu’avec les collègues. Ou exceptionnellement dans un livre. Le cas de Shaun Bythell qui a un jour racheté « The Bookshop » à Wigtown pour en faire vingt ans […]
lire la suite .../ ...1021
commentaires
Qui peut se vanter d’avoir vu un signe dans la récente parution de Nouveau roman chez Gallimard ? Il était si subliminal que nul ne l’avait décrypté dans le milieu littéraire et le petit monde feutré de l’édition. A moins que ce fut qu’une coïncidence. Allez savoir ! Toujours est-il qu’elle prend tout son sens avec le rachat la semaine dernière des éditions de Minuit et de ses librairies (Compagnie au Quartier latin et des participations dans d’autres en province) par le groupe Madrigall, holding dans laquelle Antoine Gallimard, son président, a réuni une quinzaine de maisons d’édition, neuf librairies et des filiales […]
lire la suite .../ ...5
commentaires
Il semble désormais admis que le latin soit une matière scolaire d’élite, destinée à reproduire les inégalités sociales en érigeant en valeur suprême la distance à la nécessité matérielle, la gratuité des apprentissages non professionnalisants, dont seuls les bourgeois peuvent faire ostentation. La Russie soviétique, déjà, supprimait le latin des programmes en vue d’émanciper les travailleurs, tandis que l’Italie fasciste lui prêtait des vertus anti-marxistes. On ne peut nier que le latin s’adresse depuis longtemps en priorité à des catégories sociales aisées, sinon en théorie, du moins dans les faits. Mais en soutenant que le latin est une matière scolaire « […]
lire la suite .../ ...1369
commentaires
C’était il y a dix ans à Nancy pendant la grande manifestation du « Livre sur la place ». Juste avant de monter à la tribune pour y débattre en public des vices cachées et des vertus publiques du prix unique du livre, l’ancien ministre de la Culture me prit à part et me murmura à l’oreille : « S’il vous plait, durant notre échange, ne dites pas « Loi Lang » mais « Loi Lang-Lindon » : ce ne serait que justice pour lui… ». Sur ce plan-là au moins, on ne prendra Jack Lang en défaut de gratitude. « Lui », c’était Jérôme Lindon (1925-2001), directeur historique des éditions de […]
lire la suite .../ ...1508
commentaires
Traducteur est un métier à part entière et non une fleur au chapeau, n’en déplaise à Proust, Gide, Giono, qui en ont tâté une ou deux fois. Cela étonne à une époque où tout Français exerce deux métiers (le sien et épidémiologiste). L’empathie est la qualité première pour exercer celui-ci. Il s’agit bien de se mettre « à la place de » l’auteur, s’identifier à lui, pour se faire en quelque sorte le co-auteur de son livre, seul moyen de « sentir » le texte avant d’écouter la voix qui s’en dégage ; car, on finirait par l’oublier, lorsque nous lisons en français un livre traduit […]
lire la suite .../ ...1313
commentaires
« Déjà essayé. Déjà échoué. Peu importe. Essaie encore. Echoue encore. Echoue mieux ». Du Beckett tout craché, sans aucun doute, mais dans lequel de ses livres, cela m’échappe encore. Impossible de ne pas y penser en découvrant le très instructif dossier consacré à « Autopsie de l’échec littéraire » sous la direction de Christophe Bertiau et Chanel de Halleux dans COnTEXTES, une revue de sociologie de la littérature consultable en ligne. Passons sur son titre qui suppose le phénomène inactuel quand la chose nous parait intemporelle si l’on en juge par les cris et chuchotements de notre vie littéraire. L’histoire de la littérature […]
lire la suite .../ ...1582
commentaires
Qu’une langue puisse faire l’objet d’une exposition temporaire dans un musée, cela se conçoit ; mais qu’il y soit exclusivement dédié en permanence, cela fait rêver. Par réflexe, on cherche des précédents, dans l’esprit du Musée de la langue portugaise à Sao Paulo ; en vain, y compris dans la riche histoire mondiale des musées (Gallimard, 2020) de Krzysztof Pomian mais il est vrai qu’il ne s’agit que du premier de trois tomes, s’interrompant en 1789, alors sait-on jamais. Le projet ne sort pourtant pas de l’imagination d’un artiste conceptuel mais bien d’une volonté politique : celles, conjuguées, du maire de Florence […]
lire la suite .../ ...
1014
commentaires