de Pierre Assouline

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La République des livres

Littérature étrangères

Le pessimisme ironique de Dezsö Kosztolanyi

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C’est plus fort que moi, et je ne suis pas le seul critique, ni même le seul lecteur à réagir ainsi : face à un premier roman, essayer d’en savoir davantage sur les lectures qui ont pu influencer l’auteur. Celles de toujours et celles qui ont irrigué son imaginaire et son inconscient tandis qu’il ruminait son histoire. On sait que les auteurs ne goûtent guère l’exercice d’admiration ; ils ont l’impression de déchoir en payant leurs dettes, du moins en France ; ailleurs, on a compris depuis longtemps que la manifestation de gratitude nous élève plutôt qu’elle nous abaisse. Car, hormis le cas […]

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Comment j’ai traduit Annie Ernaux en espagnol

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Le premier jour du séminaire de mon ancien directeur de recherche sur la littérature française de l’extrême contemporain, à Paris-III, Bruno Blanckeman donne une liste d’une dizaine d’auteurs à lire. Le titre Journal du dehors se détache pour moi des autres : il renvoie à l’écriture que j’avais entreprise cette année-là à Paris, transcription détaillée du vécu de scènes, dialogues, lieux, contre l’oubli. De retour à Buenos Aires, j’entreprends comme chercheuse un travail de « divulgation » de l’œuvre de cet auteure très peu connue en Argentine. Mon principal objectif était de traduire Annie Ernaux pour la faire découvrir. Peu après, je rencontre […]

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Le désir d’Europe des écrivains latino-américains

Le désir d’Europe des écrivains latino-américains

PHILIPPE OLLE-LAPRUNE

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Dans un écrit de 1524, Hernán Cortés désigne un lieu de culte du peuple aztèque par les mots de « grande mosquée ». face au vertige de l’inconnu, il se tourne vers le déjà-vu et, par cette torsion du réel, garde pied et ramène la réalité neuve à une expérience antérieure. Les Européens ont conquis les territoires et colonisé les peuples d’Amérique allant jusqu’à les plier à leurs utopies et leurs fantasmes. Grâce à cette construction chimérique du lieu, ils ont offert un matériau idéal aux écrivains à venir. En contrepoint, si les Latino-Américains ont eu un désir d’Europe, leurs rapports […]

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Poétique de Céline, éthique de Kraus

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L’ego-histoire, c’est bien, surtout lorsque d’autres que des historiens s’en emparent aussi. Encore faut-il avoir envie de sacrifier au racontage de mézigue, expression qui n’est pas de Louis-Ferdinand Céline mais de Jacques Perret. Il est remarquable qu’un écrivain aussi tempétueux ait suscité un exégète aussi paisible qu’Henri Godard. Comment devient-on le spécialiste les plus respecté et le plus incontesté de l’œuvre d’un grand écrivain ? Richard Ellman avait autrefois répondu pour Joyce ; Jean-Yves Tadié pourrait répondre pour Proust, Pierre Citron pour Giono. Jacques Body pour Giraudoux, Henri Mitterand pour Zola… En attendant, Henri Godard le fait dans A travers Céline, la littérature […]

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La ruche de Shakespeare

La ruche de Shakespeare

Henry Wessells

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Shakespeare’s Beehive (“La ruche de Shakespeare”) est le récit d’un exemplaire annoté d’An Alvearie or Quadruple Dictionary de John Baret, un grand in-folio publié à Londres par Henry Denham en 1580, qui ne fut ni réimprimé ni digitalisé jusqu’à nos jours. L’exemplaire en question porte des traces de la bibliothèque privée de Lady Georgiana Fullerton au XIXème siècle ; au XXIème siècle, il fut déniché par le « grand déluge » qu’est eBay, site de vente aux enchères sur internet, qui porte à la surface des eaux des matières qui demeuraient cachées. George Koppelman et Daniel Wechsler, antiquaires à New York, ont […]

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Mille ans de solitude pour Gabriel Garcia Marquez

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Aracataca est en deuil. Macondo aussi. Isolé sur la côté caraïbe de la Colombie, le premier est un village réel, lieu de naissance de l’écrivain Gabriel Garcia Marquez, qui en fit un mythe sous le nom du second. Ce fut Cent ans de solitude paru en 1967 en Colombie et un an plus tard en français au Seuil dans une traduction de Claude et Carmen Durand. Histoire d’une dynastie familiale, fresque foisonnante et chronique luxuriante déployée sur six générations, ce fut son grand roman de chevalerie de l’Amérique latine en quelque sorte. Son grand livre, un roman il est vrai exceptionnel […]

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Ce que la Mitteleuropa doit à la nostalgie du monde d’hier

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Milan Kundera aura beau tonner contre et dire que « ça n’existe pas », la Mitteleuropa est partout. Guère d’études, d’articles ou de conversations sur le devenir de l’Europe qui n’y fassent référence. Ainsi l’influent quotidien économique Les Echos a-t-il récemment baptisé « syndrome de la Mitteleuropa » l’attitude par laquelle plusieurs nations occidentales ont stigmatisé l’Allemagne en lui imputant une large part de responsabilités dans les situations d’austérité qu’elles traversent. Entité floue aux frontières changeantes, notion diffuse s’il en est née au milieu du XIXème siècle, déjà difficile à cerner même en son âge d’or, la Mitteleuropa désigne traditionnellement en allemand l’Europe médiane […]

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S’enchaîner sans s’asservir

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Un jour, un paysan longeant la forêt près de son champ, a le regard attiré par une ligne sombre ondulant dans l’herbe. Il s’approche de ce qui n’est qu’une corde, mais une corde serrée, épaisse, comme nul n’en possède au village. En rentrant chez lui, il ne peut se contenter de la quiétude que lui offre sa femme et sa fille sans qu’elle se mue en inquiétude. Une force sourde le pousse à œuvrer à son propre bonheur. Pour le préserver, il doit faire quelque chose. Il lui faut savoir à qui appartient cette corde, ou du moins, où elle mène. […]

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Comment j’ai traduit « Confiteor »

Comment j’ai traduit « Confiteor »

Edmond Raillard

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La réponse est à la fois simple (« en traduisant ») et compliquée, tant les composantes de la traduction, comme de tout acte d’écriture, sont nombreuses et parfois impondérables. Côté pratique. La longueur, d’abord. L’avantage de la traduction sur la création, c’est que l’on sait où l’on va. L’ouvrage est à réécrire, mais il existe déjà. Il m’a donc fallu, pour ne pas être en retard sur la date de livraison promise de ce très gros livre, en me laissant une marge de deux ou trois mois pour les ajustements, fixer très précisément à quel point je devais être parvenu à la fin […]

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Solitaire, le traducteur ?

Solitaire, le traducteur ?

Meridiem

Il y a trois ans s’est déroulée la Fabrique franco-italienne des traducteurs, au Collège International des Traducteurs Littéraires, dans la ville d’Arles. Ce programme novateur venait d’être lancé, permettant à six jeunes professionnels de travailler ensemble pendant plusieurs mois, sous la houlette bienveillante de traducteurs chevronnés dans les mêmes combinaisons de langues. Dans l’espace Van Gogh, cet ancien hôtel-Dieu que le peintre hollandais a représenté en palpitantes couleurs, nous avons expérimenté le dialogue permanent et la critique fructueuse pendant dix semaines. En effet, les six traductrices que nous sommes, une Belge, trois Italiennes et deux Françaises, portions chacune un projet […]

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