Littérature étrangères

Ceux qui sont passés à côté de Just kids en 2010 n’auront pas d’excuses s’ils se soustraient au nouveau livre de Patti Smith au titre si énigmatique M Train (traduit de l’anglais par Nicolas Richard, 260 pages, 19,50 euros, Gallimard). Pas un roman, ni des mémoires, encore moins une autobiographie, même si toutes ces formes sont convoquées dans ce récit « à la Patti Smith ». Non qu’elle ait créé un genre. Juste le genre qui lui faut et c’est tellement touchant, sans plus mais c’est déjà beaucoup. L’équivalent d’un road-movie littéraire dans sa mémoire à travers les gens qu’elle a croisés, […]
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Peut-on parler de roman au sens strict ? Avec Les Ragazzi (1955) de Pier Paolo Pasolini, il s’agit en effet d’une suite de récits – chacun précédé d’un titre qui le singularise – sans un unique véritable protagoniste. Nous sommes en présence d’une pluralité de personnages dont Riccetto paraît être le plus marquant, le plus suivi, mêlé tout de même à la petite foule qui l’entoure. On peut voir dans ce choix de présentation de l’œuvre un raccord possible avec la tradition italienne de la nouvelle instaurée par Boccace. Le choix de cette forme, d’un entre-deux que l’on pourrait considérer […]
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Il y a quelque chose de réjouissant à l’idée d’accorder une certaine importance à ce qui n’en revêt aucune aux yeux des autres. A ce qui peut paraître anodin, vain, inutile et surtout gratuit. Exactement le cas de la quête très personnelle que rapporte l’écrivain colombien Héctor Abad dans Trahisons de la mémoire (Traiciones de la memoria, traduit de l’espagnol par Albert Bensousssan, 176 pages, 20 euros, Arcades/ Gallimard – on peut feuilleter le livre ici). Durant des années, je me suis demandé si Shakespeare était bien l’auteur de la phrase « Quand fond la neige où va le blanc ? » ; j’ai […]
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A quels signes comprend-on que l’on vit une avant-guerre et que l’époque qui s’achève n’était jamais qu’un entre-deux-guerres ? Taux de chômage, crise économique, dépression morale, corruption des mœurs, politiques tous pourris, besoin impérieux de s’étourdir, tout cela annonce la catastrophe. Encore faut-il savoir conjuguer ces phénomènes pour les rendre intelligibles. Vers l’abîme (Der Gang vor die Hunde, traduit de l’allemand par Corinna Gepner, 268 pages, 21 euros, éditions Anne Carrière) d’Erich Kästner y parvient remarquablement, la fluidité de la traduction ajoutant encore à l’énergie propre du texte. Jakob Fabian, jeune publicitaire doué, auteur d’une thèse consacrée à l’hypothétique bégaiement d’Heinrich […]
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Y a-t-il un essayisme heureux ? On mettra certainement sur le compte de la saudade, variante de la mélancolie mais dans ce qu’elle a de plus heureuse et blason de la sensibilité portugaise, le fait qu’Eduardo Lourenço ne voit dans cette pratique exclusive de son métier d’écrivain que désastre personnel et vision tragique de la vie. Moins connu que George Steiner, Claudio Magris, Roberto Calasso ou le regretté Simon Leys, il est pourtant de la même famille. Cela n’a rien de politique. Juste qu’ils ont en commun une intelligence du cours des choses littéraires et poétiques, assise sur une fascinante érudition […]
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Des rapports entre la littérature et la biographie, l’Histoire, l’invention, l’exactitude, la vérité, la traduction, le chat Murr, Danube et aussi la matière de Secrets, pamphlet contre la tyrannie de la transparence qui vient de paraître chez Bibliothèque Rivages (77 pages, 12 euros) à l’occasion d’une récente rencontre avec Claudio Magris en marge d’un débat à la Maison de l’Amérique latine. La République des livres : Vous parvenez, vous, à faire la part de l’invention dans vos livres ? Claudio Magris : On n’explore pas assez les liens entre littérature et journalisme. Cela fait quarante-huit ans que j’écris pour le Corriere della Serra. […]
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On le dit un peu à l’ouest quand tout le situe plutôt à l’est. Difficile d’échapper à ce tropisme quand on est de mère russe et de père d’origine polonaise. Tout cela fait d’excellents français et, en l’espèce, André Markowicz (1960), un traducteur hors pair qui ne s’est pas contenté de retraduire tout Dostoïevski, de se colleter à Shakespeare à ses heures perdues et, tant qu’à faire, d’attaquer la montagne magique de la poésie chinoise par la face nord sans connaître un mot de chinois. Bizarre, vous avez dit bizarre ? Sa poésie chinoise, il l’a lue traduite de nombreuses langues. […]
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(…) Hurlevent s’ouvre par un double récit dans le temps réel du roman. Un certain Mr. Lockwood s’aventure dans les landes lointaines pour rendre visite à son nouveau propriétaire et se voit forcé de rester pour la nuit à cause de la météo capricieuse. Une atmosphère on ne peut plus lugubre règne dans cette maison où les jeunes gens, pleins d’amertume, restent tapis dans les coins. Heathcliff, seigneur du manoir qui tombe en ruines, semble hanter sa propre demeure comme un fantôme enragé et incurablement vivant. Lockwood, qui est extrêmement curieux, interroge Nelly Dean, sa gouvernante dévouée, qui a été, […]
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Elle et Lui … Elle : 28 ans, professeur, cultivée, belle, beaucoup de classe, aimant la littérature et la marche à pied. Lui : 41 ans, artiste tourmenté, dessinateur de croquis bizarres, épistomane, amateur de fantasmes sexuels en tous genres, tendances masochistes et fétichistes certaines. Jozefina Szelinska et Bruno Schulz : la fiancée et le génie. Ils s’aimèrent passionnément, entre 1933 et 1937, à Drohobycz, ville provinciale de Galicie orientale, aujourd’hui située en Ukraine. Bruno était très épris de cette muse, cette déesse (il la surnommait Juna, d’après Junon), voyait en elle « l’être le plus proche » qu’il ait eu sur […]
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Isaac Babel est un grand écrivain, il existait par et pour la littérature, écrire était sa passion et sa raison de vivre. Or la biographie que lui a consacrée Adrien Le Bihan Isaac Babel. L’écrivain condamné par Staline (343 pages, 22 euros, Perrin) traite presque exclusivement de sa personnalité, de sa vie privée et de ses positions politiques – du moins telles que les comprend l’auteur. Si, après bien des hésitations, je prends la plume pour parler de cet ouvrage, c’est parce que Babel lui-même n’est plus là pour se défendre contre le réquisitoire dont il fait ici l’objet, tant d’un point de […]
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