de Pierre Assouline

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La République des livres
N° 103 La sage-femme et le pseudonyme

N° 103 La sage-femme et le pseudonyme

Par Jacques Drillon

Les Latins, qui, au théâtre, éclataient de rire quand ils entendaient une rime.

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Le romancier tenaillé par la fin.

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Ô œuf mayo, quatre ou six demi œufs surmontés d’une énorme quantité de mayonnaise un peu brunie sur le dessus, quand te reverrons-nous ?

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Une blague que Muray aimait bien
– Bonjour madame, je voudrais un préservatif, s’il vous plaît.
– Je ne les vends pas à l’unité. En boîte de six, minimum.
– Non, je n’en veux qu’un.
– Je suis désolée, c’est impossible.
– Si vous voulez, je vous paie toute la boîte ! Vous m’en donnez un, et vous gardez le reste.
– Mais ce serait du vol ! Et d’abord, pourquoi n’en voulez-vous qu’un ?
– J’essaie d’arrêter…

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(Suite)
Histoire suisse
Combien de préservatifs un Suisse porte-t-il lors d’un rapport sexuel ?
– Trois, pour éviter de salir celui du milieu.

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Le connard qui a cru bon de coloriser Chronique d’Anna Magdalena Bach, de Straub. Même pas entièrement. Et ce n’est même pas bien fait. Il s’appelle Derk van der Veen. Les imbéciles aussi ont un nom, par lequel Dieu les appellera le moment venu, avant de les jeter dans la fournaise éternelle.

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L’incipit d’Anna Karénine, dans la traduction d’H. Mongault : « Les familles heureuses se ressemblent toutes ; les familles malheureuses chacune à leur façon. » Chacune à leur façon, au lieu de : chacune à sa façon. Et que font-elles, les familles malheureuses ? Manque le verbe.
Et il y en a tout un Pléiade comme cela.

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Les obsolètes : les « bas-bleus ».

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Les obsolètes : Jean-Christian Michel.

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Julien Gracq qui aurait choisi son pseudonyme après l’avoir épelé devant la glace : « J’ai l’air assez cul. »

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La pensée qu’on ne mourra peut-être pas assez vite, ni assez tôt, et qui fait pâlir d’angoisse.

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Les fous
Le claveciniste italien Fernando de Luca, qui, à soixante ans, a enregistré plus de 450 heures de musique (tout Bach, les 555 sonates de Scarlatti, tout Haendel, des compositeurs inconnus par douzaines), et tout cela en ligne, en accès gratuit (https://www.saladelcembalo.org).

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Les cinéastes qui, faute de savoir agiter leurs personnages, agitent leur caméra. Ou s’agitent eux-mêmes sur leur table de montage, en désespoir de cause.

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Les hommes qui exerçaient le métier de sage-femme. On leur a trouvé un nom : maïeuticiens. C’est chic, c’est grec, c’est socratique. Mais les sages-femmes n’ont pas voulu être privées de cet honneur. Les voici maintenant, hop, maïeuticiennes.

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Le clown Achille Zavatta se tirant une balle dans la tête.

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Dernière minute

La glycine en terrasse de chez Plumeau, place du Tertre, cent vingt ans d’âge, en parfaite santé, connue dans le monde entier pour sa vastitude, rasée en cinq minutes par l’adjoint vert d’Hidalgo préposé aux plantes vertes et forêts urbaines. Parce qu’elle avait perdu ses feuilles pendant l’hiver, on l’a cru morte.

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L’université d’Oxford, qui songe à refondre ses études musicales, trop axées sur des oeuvres et des compositeurs « datant de l’époque coloniale et esclavagiste », et complices des défenseurs de la « suprématie blanche ». Il est question, par exemple, de remplacer le cours sur la dernière décennie de Schubert par un autre sur le rap et le hip hop. L’enseignement de la notation musicale lui-même n’aurait pas rompu avec son « passé colonial », et serait considéré comme une « gifle » donnée aux étudiants de couleur ; et l’acquisition d’une compétence technique (solfège, pratique instrumentale) provoquerait chez eux une « véritable détresse »

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L’expression « santé mentale », qui, depuis le confinement, a remplacé le mot malheur.

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La troisième série de petits Papiers (Papiers découpés), parus sur Bibliobs.com, fera l’objet d’une publication en volume et n’est plus en ligne. La première (Papiers décollés) a été publiée sous le titre Les fausses dents de Berlusconi (Grasset, 2014), la deuxième (Papiers recollés) sous le titre Le cul rose d’Awa (Du Lérot 2020, disponible sur commande en librairie ou chez l’éditeur.

Cette entrée a été publiée dans Les petits papiers de Jacques Drillon.

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