N° 37 Le S.O.S. de Pavarotti
Les nazis en déroute, et qui savaient leur fin inéluctable, mais qui préféraient stopper des trains de matériel militaire pour laisser passer des convois de juifs vers Auschwitz.
*
Les obsolètes : le rite de passage de la culotte courte au pantalon.
*
L’économiste qui examine les conséquences de l’extension de la garantie. Garantir les objets dix ans, une voiture, un ordinateur, un moulin à café, asphyxierait l’économie mondiale. La panne est le ressort de la richesse.
*
« L’interprétation composée » de Hans Zender. Voir son Winterreise.
*
Mariage pour tous, procréation pour toutes, manif pour tous, le « pourtoussisme » de Michéa.
*
(Suite)
« C’est naître qu’il aurait pas fallu. » Le droit de l’enfant à ne pas naître : droit bafoué à chaque instant.
*
SOS (ti-ti-ti ta-ta-ta ti-ti-ti) = Save Our Souls, tout le monde sait ça. Mais c’est Godard qui nous a appris que SMS voulait dire Save My Soul (ti-ti-ti ta-ta ti-ti-ti).
*
Le splendide Steinway noir de Pavarotti, perpétuellement neuf, dans son bureau. Lui qui ne savait pas lire la musique… Ce jour-là, on lui avait offert un taille-crayon électrique. Tout en « buvant » une mixture où il entrait plus de solide que de liquide, il affûtait ses crayons, sans doute des crayons qu’on lui avait offerts en même temps pour qu’il ait des crayons à tailler, lui qui n’avait jamais écrit une ligne, et savait à peine signer son nom en bas des contrats. Quand il en a eu assez d’affûter ses crayons, il a tout repoussé sur le côté, d’un large et lent geste du bras.
Il avait dans son domaine des chevaux qu’il ne pouvait plus monter, car l’échine d’un cheval ne peut pas résister à tout. Il traversait donc Modène au volant d’une Maserati qu’on lui avait offerte, large comme une moissonneuse-batteuse, et qui parvenait à le contenir sans exploser : son siège de conducteur avait la taille d’un canapé. Pour ne pas avoir à trop tourner le volant dans les carrefours, ce qui lui aurait fatigué le cœur, il roulait sur les angles des trottoirs, ou plutôt il les avalait, arrondissant toutes les trajectoires avec beaucoup de noblesse. Arrivé à la mairie, un nabot de taille normale, le maire, lui a remis une décoration, ou l’a fait citoyen d’honneur de la ville, quelque chose de ce genre. Le buffet de petits fours a rentré la tête dans les épaules, attendant la déflagration.
Après lui avoir donné le coup de grâce, Pavarotti a eu faim. Il est rentré chez lui manger un morceau.
*
Les obsolètes : La perfection, tout à fait ridicule au demeurant, des actes notariés d’autrefois. Présence, aujourd’hui, malgré les correcteurs automatiques, d’une quantité ahurissante de fautes d’orthographe.
*
Les gens qui se prennent en photo devant la Joconde, dos au tableau. Ils ont soin de laisser voir son beau visage, derrière leurs têtes d’abrutis.
*
La semi correction. Depuis quelque temps, on commence à savoir que « après que » commande l’indicatif, non pas le subjonctif, et certains font des efforts. « Après qu’il ait bu » devient « après qu’il a bu ». C’était inespéré. Mais il semble qu’on mette tout au passé composé : « Il s’endormit après qu’il a bu ». Oubliés, le passé antérieur, l’imparfait. Ils n’écrivent jamais « Il s’endormit après qu’il eut bu », de peur qu’on les accuse d’avoir doublement fauté : mis le subjonctif, et oublié le circonflexe. Quant à « en général, il s’endormait après qu’il avait bu », il ne faut pas se bercer d’illusions, on ne l’aura jamais.
*
Les échanges e-pistolaires.
*
Les grandes mutations
Roland Jaccard, qui rappelle que « la culture c’est ce qui reste quand on a tout oublié ». Mais ça, c’était avant. Aujourd’hui, dit-il, « c’est ce qui manque quand on a tout appris ».
*
Ma mère, l’autrice de mes jours.
*
Le (ou la) Videowriter de Philips, qu’utilisait Philippe Muray dans les années 80, avant de passer au Mac. L’appareil enregistrait (sur disquette) et imprimait sur papier thermique.
j.drillon@orange.fr
(Tous les vendredis à 7h 30)
Si vous n’avez pas reçu le lien sur lequel cliquer pour accéder à ces Petits Papiers, c’est que vous n’êtes pas abonné. Vous pouvez le faire en écrivant à j.drillon@orange.fr, en mentionnant « m’abonner » dans le champ « sujet » ou « objet » du message.
Les deuxième et troisième séries (Papiers recollés, Papiers découpés) feront l’objet d’une publication en volume et ne sont plus en ligne. La première (Papiers décollés) a été publiée sous le titre Les fausses dents de Berlusconi (Grasset, 2014).
Comments are closed.