de Pierre Assouline

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La République des livres

Essais

La thèse universitaire, alibi de fantasmes

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« Tout finit en Sorbonne. Tout se décompose en thèses » soupirait déjà Paul Valéry en ses Cahiers des années 20. Depuis, ça ne s’est pas arrangé. Les gens qui s’adonnent à ce vice impuni sont appelés des thésards, version sardonique de « doctorants » qui sent déjà la pharmacie. Charles Coustille en fait le constat ironique dans Antithèses (312 pages, 24 euros, Bibliothèque des idées, Gallimard). Rien n’est académique comme l’idée de thèse, longtemps synonyme de révérence vis à vis des maitres, respect de l’ordre établi, conformisme. Longtemps, elle est passée pour un exercice formel effectué sous la pression normative, collection de lieux communs […]

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Il n’y a pas d’écrivains maudits

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Quelle étrange entreprise collective que ce Réprouvés, bannis, infréquentables (350 pages, 20 euros, Léo Scheer) dans lequel Angie David a recueilli une quinzaine de portraits desdits proscrits. A priori, on se dit qu’il doit s’agir d’écrivains français de la fin du XIXème siècle. Quelque chose de ce goût-là. Mais dès qu’on y pénètre, la fausse route s’impose à la lecture du sommaire : Maurice Dantec, Pierre Boutang, Cristina Campo, Pier Paolo Pasolini, Dominique de Roux, Simon Leys, Guy Debord, Michel Houellebecq, Renaud Camus, Jean-Claude Michéa, Baudoin de Bodinat, Marc-Edouard Nabe, Philipe Muray, Peter Handke. Ce n’est plus un rassemblement : c’est une rafle. […]

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Retour sur la famille communiste

Retour sur la famille communiste

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Comme Rondes de nuit d’Amaury Nauroy mais dans un registre très différent, c’est le genre de livre naturellement éclipsé par la rentrée littéraire car hors-normes, décalé, discret, pas du genre à se pousser du col ou à s’imposer sur les tréteaux, publié par une petite maison d’édition, toutes choses qui le font rapidement disparaître des radars de la critique et des libraires. Pourtant, quel récit poignant que Fils d’Adam (108 pages, 15 euros, Exils) –et non, rien à voir avec le Adam & Eve évoqué dans le billet précédent ! Cet Adam s’appelait Rayski. Juif polonais émigré à Paris dans les […]

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La méthode Greenblatt

La méthode Greenblatt

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Dans Changement de décor, satire d’une cruauté sans égale de la vie universitaire en Angleterre et aux Etats-Unis, le romancier David Lodge avait guignolisé Stephen Greenblatt à travers le personnage secondaire de Sy Gootblatt . En 1975, déjà… Une manière de consécration pour ce professeur d’histoire littéraire qui n’avait alors que 32 ans. Depuis, il a construit sa carrière avec une réussite remarquable, d’un certain point de vue. Ce qui est commode avec son dernier ouvrage Adam & Eve. L’histoire dans fin de nos origines (The Rise and Fall of Adam and Eve, traduit de l’anglais par Marie-Anne de Béru, […]

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La sainte colère d’un lanceur d’alerte

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Dans un pays où, Dieu merci, le délit de blasphème n’existe plus depuis 1881 (l’Alsace-Moselle faisait exception mais il y a été définitivement abrogé l’année dernière), on peut à loisir critiquer, dénoncer, attaquer, moquer l’Eglise et les chrétiens au nom de la liberté d’expression – ce dont CharlieHebdo ne se prive pas puisqu’ils sont de longue date, et de loin, la première cible religieuse de ses couvertures. De l’extérieur, on peut donc tout se permettre. Mais de l’intérieur, c’est autre chose. C’est de là que Christian Delahaye parle et écrit. D’où un léger problème. Son livre s’intitule Scandales et il […]

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L’Amérique nous fera-t-elle perdre notre passé ?

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Il paraît que nous sommes devenus américains. Ce serait même tellement évident que l’on ne se demande plus pourquoi mais comment. C’est d’ailleurs inscrit dès le sous-titre de Civilisation (230 pages, 19 euros, Gallimard), le nouvel essai de Régis Debray. Une réflexion à la Debray, brillante et digressive, aussi attendue qu’inattendue d’une page l’autre, provocatrice, usant et abusant d’un goût immodéré de la formule heureuse   ou moins heureuse (« Bobards d’un bobo qui a bobo »), jonglant avec les citations, les ellipses et les raccourcis, télescopant les époques et les références, le latin pur jus s’acoquinant avec le globish pour les besoins […]

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Pour une histoire catastrophique de la Suisse

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La Suisse, doux et paisible voisin que le monde entier devrait nous envier, relève-t-il d’un Sonderfall, un cas particulier s’agissant de son rapport à la catastrophe ? Peter Utz, qui a exploré de fond en comble les littératures de son pays face au cataclysme, y répond dans un essai brillant, argumenté, convaincant comme les éditions Zoé peuvent s’enorgueillir avec ceux Peter von Matt (notamment La Poste du Gothard ou les états d’âme d’une nation publié il y a deux ans à Genève. Professeur de littérature allemande à l’université de Lausanne, Peter Utz est l’un des meilleurs connaisseurs de l’œuvre de Robert Walser, de […]

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Oyez oyez, les lanceurs d’alerte !

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Mais non, pas Julien Assange et consorts ! D’autres, authentiquement pionniers dans le genre, écrivains, chroniqueurs et essayistes, il y a quelques dizaines d’années, dont les exhortations sont redevenues furieusement actuelles. Le premier d’entre eux, l’esprit le plus noble, le plus sincère et le plus fervent qui soit, un Français du nom d’André Suarès. C’est à peine si son nom a surnagé et c’est une misère de le voir si souvent confondu, même par des historiens, avec celui du journaliste Georges Suarez, fusillé à la Libération devinez pourquoi. Un éditeur inspiré a réuni les textes politiques publiés de son vivant à […]

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François Cheng : « Notre vraie vie, c’est l’itinéraire de notre âme »

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Poète et académicien français d’origine chinoise, il se considère comme « un rescapé de 88 ans ». Il se taille un grand succès de librairie avec une méditation au titre aussi simple qu’écrasant : De l’âme (162 pages, 14 euros, Albin Michel). Après des réflexions sur la beauté et d’autres sur la mort, on ne s’étonne pas qu’un esprit tel que celui de François Cheng, plus que jamais au carrefour des cultures occidentale et orientale, ait jugé le moment venu de réfléchir à l’âme. Nourri des traditions poétiques française et chinoise, traducteur de leurs meilleurs représentants dans ses deux langues, il […]

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Des années légères aux années de plomb

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On le sait bien : ce n’était pas mieux avant. Ou plutôt : si notre mémoire, en cela aidée par le mythe édénique, a fabriqué l’idée que c’était mieux avant, c’est juste parce que nous étions plus jeunes, souvent plus insouciants, pas encore alourdis par les responsabilités et pas gagnés par le désenchantement, l’amertume, le regret –selon les cas. De là à s’imaginer qu’on est passé de l’âge de l’innocence à celui de la barbarie, il n’y a qu’un pas de deux esquissé par deux livres que tout oppose. Dans Place des Vosges (150 euros, 16 euros, Seuil), Michel Braudeau, né en […]

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