LE COIN DU CRITIQUE SDF
A quoi pense-t-on lorsqu’on entend prononcer le nom d’Hérode ? Dans la culture chrétienne, il est celui qui ordonne le massacre des « saints innocents », même s’il n’ a pas eu lieu. C’est aussi le mari d’Hérodiade, le persécuteur de saint Jean-Baptiste, même s’il s’agit en fait de l’un de ses descendants. Dans la culture juive, c’est celui qui a magnifié le deuxième Temple, l’évergète des villes d’un grand royaume d’Israël (Judée, Galilée, Gaulanitide, Batanée, Trachonitide, Auranitide..), mais aussi un roi pas tout à fait « Juif », un usurpateur cruel qui s’est débarrassé de la dynastie des Hasmonéens après s’être allié avec […]
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Die liebe ist ziss… mit broïte (*) (proverbe yiddish) Voilà un livre dont on ne peut se détacher, qu’on garde en sommeil et qui persiste comme un cauchemar. Myriam Anissimov, marquée par sa naissance dans un camp de réfugiés en Suisse et par l’horreur de la Shoah dont les siens furent victimes, et qui n’a jamais cessé de l’habiter tel un poison charrié dans son sang, ainsi qu’elle le dit dans son dernier livre : Les yeux bordés de reconnaissance (Le Seuil, 2017, 240p., 19€), revient à nous après tant de livres talentueux, dont ses grandes biographies de Romain Gary, de […]
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Le récit du combat contre la maladie ou l’infirmité est devenu un genre en soi. Les uns constituent de brillantes réussites littéraires, d’autres sont émouvants sans susciter l’émotion esthétique. On me dira que seule l’émotion transmise compte, mais seule la qualité de l’écriture peut transformer le témoignage en œuvre et assurer une transfiguration, pliant les accidents de la vie à la rectitude de l’art pour que la flèche frappe en vibrant au centre de la cible. Nous en avons un exemple avec le livre unique d’Ariel Crozon – hapax imprévisible – qui doit sa consécration littéraire à Daniel Pennac […]
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Je connaissais Bill Burroughs depuis Noël 1944 et, au début des années cinquante, nous échangions une volumineuse correspondance. J’avais toujours respecté en lui un aîné possédant plus de sagesse que moi, et c’est d’ailleurs avec étonnement que je constatai, dans les premières années de nos relations, qu’il me manifestait, de son côté, du respect. Le temps passant et au gré de la fortune de chacun —moi me retrouvant quelque temps dans la solitude d’un asile de fous, lui suivant sa trajectoire et ses tragédies propres —, j’eus l’audace d’abuser de ce que je pensais être chez lui de la timidité et je l’encourageai à écrire par vocation (…) […]
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Dans l’Antiquité, le terme ‘barbare’ est utilisé par les Grecs, puis par les Romains. Le barbaros ou barbarus désigne alors l’étranger, celui qui se situe à l’extérieur de la civilisation, entendue comme société ou communauté aux mœurs civilisées. Cet attribut de la barbarie implique, par définition, une exclusion, une non-participation à la vie politique. Or, dans Les Misérables, certains personnages se situent d’emblée ou se retrouvent dans un état de marginalisation. C’est le cas notamment de Thénardier, figure du ‘mauvais pauvre’, dont les actes sont en net contraste avec les mœurs a priori policées de la société ; de Fantine, que […]
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Je vous dois, d’emblée cette confidence, cet aveu : je suis mal à l’aise pour parler en public, au public, et personne de raisonnable n’a su, ou voulu, me donner des explications sur mon sort. Enfant, j’admirais Robin Crusoé parce qu’il avait appris à vivre et à penser seul. Seul ? Dernièrement j’ai lu un texte de Virginia Woolf où elle disait que durant des années notre ami Robinson « mangeait un bout », comme on le dit à Bruxelles, en dialoguant avec le pot en terre cuite qu’il avait fabriqué - un pot définitivement muet. Modestement je rejoins le camp de Daniel Defoe. […]
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S’il est un homme à avoir pensé la Tunisie au temps de l’Indépendance, c’est bien l’écrivain Albert Memmi, romancier à succès – prix Carthage 1953 –, intellectuel engagé et sociologue accompli. La littérature de langue française en Tunisie commence réellement avec lui et la publication de La statue de sel, roman parrainé par ce grand découvreur que fut Maurice Nadeau et préfacé par Albert Camus. Memmi est alors un Tunisien convaincu. Né en 1920, à l’approche de son centenaire, il nous livre dans Tunisie, An I (édité et annoté par Guy Dugas, Biblis, CNRS éditions, 226 p., 10 €) ses carnets […]
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Depuis sa parution au début du mois de janvier, l’Histoire mondiale de la France (Seuil) s’est imposée comme un véritable phénomène de librairie. Dirigé par Patrick Boucheron, professeur au Collège de France et déjà pilote d’une riche et remarquée Histoire du monde au xve siècle (2009), coordonné par N. Delalande, Fl. Mazel, Y. Potin et P. Singaravelou, l’ouvrage soulève l’enthousiasme de la presse et des lecteurs en parvenant à concilier exigences de méthode, travail critique et art du récit. Une équipe de cent vingt-deux auteurs, historiennes et historiens de différentes générations, écoles, et sensibilités, se sont mis à l’ouvrage pour composer une […]
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L’écrivain israélien Aharon Appelfeld est né en 1932 à Czernowitz en Bucovine, territoire partagé entre l’Ukraine et la Roumanie tragiquement ballotté par l’Histoire. Son œuvre est forte d’une quarantaine d’ouvrages, pour près de la moitié traduits en français. Ce rescapé de la Shoah a vu disparaître ses parents et grands-parents, s’est évadé d’un camp de concentration – où a péri son père, sa mère ayant été exécutée précédemment −, a erré quatre ans dans les forêts d’Ukraine, avant de trouver refuge en Israël. Témoin privilégié de la destruction du shtetl et du génocide juif, il a parfois été considéré comme […]
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D’une manière générale, il existe deux sortes d’écrivains, ceux qui conçoivent leur tâche comme une carrière et ceux qui la vivent comme une addiction. L’écrivain qui appartient à la première catégorie prend soin de sa promotion, se dépense pour assurer sa visibilité médiatique et aspire au succès. Ce n’est pas le cas pour celui qui appartient à la seconde. Pour ce dernier, réaliser son propre épanouissement lui suffit amplement, mais si toutefois il arrive que son addiction lui procure quelques gains matériels, alors il passe de la catégorie des toxicomanes à celle des dealers ou des revendeurs. J’appellerai ceux de […]
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