de Pierre Assouline

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La République des livres

vie littéraire

Borges sans héritier

Borges sans héritier

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A Buenos Aires, après l’avoir longtemps surnommée la hija del Samouraï (ou « la fille du Samouraï »), ce qui avait un petit quelque chose d’affectueusement exotique, on ne l’appelait plus que la viudísima (« la veuvissime »), ce qui l’était beaucoup moins. Le fait est que María Kodama régnait sans partage sur l’héritage de Jorge-Luis Borges. Le grand écrivain argentin l’avait instituée sa légataire universelle. Après l’avoir rencontré à 16 ans puis avoir été son étudiante à l’université, elle avait vécu avec cet homme qui était son ainé de trente-huit années, donnant le bras au plus célèbre aveugle de la littérature contemporaine, lui faisant la lecture, […]

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Pour saluer Philippe Sollers

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Lui qui maitrisait les ficelles de la comédie littéraire, il aura raté le spectacle de sa sortie. A-t-on idée aussi de tirer sa révérence à 86 ans le jour du couronnement du roi Charles III ! Porté à 22 ans sur les fonts baptismaux de la littérature par Mauriac et Aragon (et réformé du service militaire pour « terrain schizoïde aigu » grâce à Malraux !), excusez du peu, Philippe Joyaux, auteur d’une Curieuse solitude (1958) était bien parti. Philippe Sollers, son pseudonyme, est moins bien arrivé. Bien sûr, entre temps, le romancier, critique, chronique et essayiste a publié un grand nombre de […]

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De la pénibilité au travail dans le milieu littéraire

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Au fond, ce n’est pas un hasard si l’expression « chaine du livre » s’est si largement répandue ces derniers temps. Elle correspond à une réalité : tous ceux qui y participent sont des enchainés. Aussi ces galériens de la vie littéraire méritent-ils largement que leur statut soit révisé à la lumière des débats actuels sur la pénibilité au travail. Les éditeurs ? Ils se sont toujours plaints. Les collections des gazettes littéraires en témoignent : pas une interview dans laquelle ils ne déplorent leurs difficultés. En ce moment, la hausse du coût du papier. De manière récurrente, la baisse de la vente des livres. […]

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De quelques difficultés avec l’exercice d’admiration

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Lorsque l’hispano-péruvien Mario Vargas Llosa fut reçu en séance solennelle le 9 de ce mois à l’Académie français, il prononca un vibrant discours à la gloire de la France littéraire. Il apparut alors comme le meilleur écrivain français en activité sous la Coupole… Ce qui, au vu de son œuvre, est difficilement contestable… quand bien même serait-elle écrite en espagnol ! Mais à l’écouter rendre hommage à ceux qui l’ont fait romancier, les Cervantès, Hugo, Balzac, un détail le distingua aussitôt des immortels et ce ne sont pas ses deux passeports : la gratitude. Non que les habits verts en soient […]

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Eco de la Mirandole en sa librairie

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Lorsque Samuel Beckett vivait boulevard de Port Royal, il offrit une moquette à ses voisins du dessus pour ne plus les entendre marcher. Que des humains déambulent sur sa tête l’empêchait de penser. Le cas de figure auquel a été confronté Umberto Eco avec ses voisins du dessous fut plus délicat à résoudre : ils avaient porté plainte pour danger immédiat, craignant un effondrement de son appartement dans le leur. Ce qui fut confirmé par une expertise des agents du cadastre. Et pour cause : 1200 rares livres anciens sur les sciences occultes la magie, l’ésotérisme, les mondes imaginaires, ainsi que 30 […]

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Se faire archiver mais juste comme il faut

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Dans quel autre pays la mort d’un grand éditeur ferait-elle la une d’un quotidien national et la couverture d’un magazine culturel ? Que Jérôme Lindon fut ainsi honoré au lendemain de sa disparition par Libération et que Paul Otchakovsky-Laurens le fut à son tour dans les mêmes circonstances dix-sept ans après son modèle à la fois par Libération et les Inrocks dit quelque chose de l’exception culturelle française. Quelque chose de réjouissant malgré la tristesse de l’évènement. On doit à l’écrivain et critique littéraire Mathieu Lindon d’avoir opéré ce rapprochement dans Une archive, un récit filial honorant la mémoire de son […]

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Houellebecq et l’islam : bis repetita

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Remettez-nous ça ! La scène qui se jouera bientôt devant un tribunal entre Michel Houellebecq et l’Islam de France a un petit air de déjà vu et entendu. Car il semble bien qu’elle aura tout de même lieu : Chems-Eddine Hafiz, directeur de la mosquée du 5ème arrondissement dite « Grande mosquée de Paris », a retiré sa plainte pour «  provocation à la haine contre les musulmans » après une négociation avec l’écrivain à l’issue de laquelle celui-ci a accepté de modifier, d’atténuer ou de supprimer des passages dans le livre qui sera tiré de l’entretien ; mais pour sa part, l’Union des mosquées […]

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Hoc incipit liber

Hoc incipit liber

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Où s’arrête le début d’un livre ? Après la première phrase, selon certains ; à l’issue du premier paragraphe, assurent d’autres ; soucieux de consensus, il en est qui plaident pour l’au-delà de la première page ; on en connait même pour qui le début d’un livre s’achève à sa dernière ligne ; on en sait même tel Mathias Enard dans Zone qui règlent la question en ne rédigeant qu’une seule phrase mais de 500 pages. On voit par là que la controverse est sans fin. Aussi est-ce avec un bonheur sans mélange que nous accueillons la parution ces jours-ci de L’histoire commence (traduit de […]

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Annie Ernaux va jusqu’à Stockholm venger sa race

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Si le communiqué de l’Académie suédoise justifiant chaque année le choix de son comité Nobel est rituellement rédigé dans une langue de bois qui ne veut à peu près rien dire, en revanche, le non moins rituel « Discours de Stockholm » du lauréat est très attendu. A force, il relève d’un genre littéraire qu’il a lui-même engendré. Pour le meilleur et pour le pire. Dans la première catégorie l’intime « Lettre au père » d’Orhan Pamuk, l’étincelante précision dans le flou de Patrick Modiano, l’émouvante présence enregistrée de Harold Pinter que la maladie clouait chez lui, et la puissance de celui de José […]

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Une Bibliothèque du futur au parfum postapocalyptique

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On connait des écrivains qui écrivent et publient à flux tendu. On en connait qui n’écrivent pas les livres qu’ils signent. On en connait qui signent un contrat avec deux éditeurs concurrents pour le même manuscrit. Bref, on croit avoir déjà tout vu, tout lu et tout entendu en la matière. Nous entrons désormais dans l’ère d’une littérature conçue pour demeurer vraiment invisible et proprement illisible pendant un siècle. Jusqu’à 2114, lorsque les épicéas utilisés pour la fabrication du papier auront atteint leur pleine maturité. Plus que quatre-vingt-douze ans à attendre. Alors s’ouvriront les portes de cette Bibliothèque du Futur sur […]

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