Godard, du côté de la littérature plus que du cinéma
En 1997, comme le Festival de Cannes s’apprêtait à célébrer son premier demi-siècle, l’envie m’a pris de marquer le coup en allant rendre visite à Jean-Luc Godard chez lui à Rolle pour une conversation sur sa dette vis à vis de … la littérature. L’éditeur Paul Otchakovsly-Laurens se fit l’intermédiaire. Godard accepta car, disait-il, il avait lu l’un de mes livres (la biographie de Daniel Kahnweiler, je crois) qui lui avait bien plu. Rendez-vous fut pris pour un samedi matin dans sa maison sur les rives du Léman. La veille, alors que tout avait été réservé, il fit savoir qu’il refusait. Stupeur et tremblement. Il m’appela : « Je viens de lire dans Le Temps que vous étiez un ami de Claude Berri et, voyez-vous, je ne peux pas serrer la main de quelqu’un qui a serré la main de Claude Berri. Dommage… ». Au magazine Lire, où la couverture et une dizaine de pages avaient été réservées pour cet entretien, ce fut la consternation trois jours avant le bouclage. Quelques heures après, il m’envoya un fax : « Bon, si vous voulez… ».
Le lendemain, je sonnais à sa porte comme convenu. Rien. Impossible d’escalader car les volets étaient clos. Je tambourinais à la porte du garage. Rien. J’appelais ses numéros ; on les entendait sonner à travers la porte. Mais en vain. Je m’assis par terre en m’adossant au rideau de fer en espérant qu’une idée de génie me vienne. Elle vint lorsque le rideau se leva au bout d’une demi-heure. Godard apparut en me tendant la main : « Je fais souvent ça, c’est un test car si un type veut vraiment me voir, il ne part pas… » Il me fit entrer dans un vaste hangar transformé en studio de montage. Pendant qu’il farfouillait, j’inspectais sa bibliothèque : celle d’un homme nourri dans sa jeunesse à tout ce que la vieille droite littéraire a pu produire (Morand, Rebatet, Montherlant, Mauriac, Bernanos et aussi Nimier, Blondin…), de grands classiques étrangers et d’autres choses plus modernes, plus récentes. Celle d’un grand lecteur qui, comme ses anciens amis de la Nouvelle vague, les Truffaut, Chabrol, Rivette, Rohmer, était fondamentalement un écrivain raté. Puis il m’installa face à un écran de télévision : « Je viens de terminer la partie de mon Histoire du cinéma pour Canal+ sur le néo-réalisme italien, tout ça… Regardez, vous me direz. Moi, je vais faire mes courses à la Migros ». Et il s’en alla en trainant son caddy, me laissant seul et enfermé. Quand il revint, je visionnais encore. Il s’installa derrière l’écran , alluma un cigare et me regarda regardant. Ce que je voyais, ce que j’entendais aussi quand la bande son et le commentaire étaient le film tout autant que les images, tout cela me stupéfiait par sa beauté, sa puissance d’incantation et la mystique du cinéma qui s’en dégageait. Puis on bavarda toute la journée. A table, comme on feuilletait le dernier numéro de Lire, il s’arrêta sur une rare photo de Maurice Blanchot à la fin de sa vie, cadavérique aux longues mains osseuses, prise à la dérobée sur un parking. Il la regarda, se pencha puis : »« Oh , vous avez vu, Nosfératu…. ». Qui d’autre que Godard…
Cette conservation me revient à la lecture d’un débat lancé hier par Paul Edel dans les commentaires de la « République des livres » sur ce chef d’œuvre que demeure Le Mépris, choc visuel inentamé par le temps, et par les interrogations de Pablo75 ce matin quant à la fidélité de Godard à la littérature plus qu’au cinéma… Retour à 1997…
Les cinquante ans du Festival de Cannes, ça vous fait quelque chose?
Je m’en fiche. Je ne lui dois rien. Je n’y ai jamais rien eu. Pourtant, j’y vais souvent. Quand on a un nouveau film, ça peut le faire connaître. Mais, aujourd’hui, les festivals de cinéma sont comme les congrès de dentistes. Discours, cocktails, repas, banquets, le maire, la femme du maire… C’est tellement folklorique que ç’en est déprimant.
De toute façon, pour vous, tout a commencé par des livres plutôt que par des films, non?
Bien sûr. Il n’y a que des gens comme Claude Lelouch pour se souvenir avoir vu Citizen Kane à 5 ans. Moi, c’était plutôt Les nourritures terrestres. On me l’a offert à 14 ans pour mon anniversaire. C’est comme ça que j’ai découvert la littérature. Il faut savoir que ma famille était très stricte. Autant en emporte le vent et Maupassant y étaient interdits.
La littérature, ça venait plutôt du côté Godard ou du côté Monod?
Plutôt Monod. Ma mère lisait beaucoup. Mais le goût du romantisme allemand me venait de mon père, qui était médecin. Entre 13 et 20 ans, grâce à lui j’ai dévoré Musil, Broch, Thomas Mann. Mon grand-père m’a aussi marqué, beaucoup marqué. Il était banquier à Paribas. C’était un ami de Paul Valéry. Il avait tous ses livres. On appelait sa bibliothèque le «valerianum». Pour ses anniversaires de mariage, je devais réciter Le cimetière marin. J’aimais bien son Tel quel aussi. Moins sauvage que Cioran, mais l’époque était différente. Il avait de belles phrases Valéry, lui aussi.
D’autres écrivains ont compté?
Le Gide des Faux-Monnayeurs, le Green de Minuit etLéviathan, presque tout Bernanos, et puis Chardonne et Jouhandeau. Tout ça m’a marqué. J’allais oublier Malraux, son Esquisse d’une psychologie du cinéma, sa Psychologie de l’art, Les noyers de l’Altenburg et puis La condition humaine, un type de roman décrié mais qui me paraît inégalé. Ses articles critiques sur Baudelaire sont également inoubliables. Malraux, vraiment…
Il a eu le bon goût de ne tourner qu’un documentaire, lui…
Peu d’écrivains font du cinéma. Parce que c’est fatigant. En général, un bon écrivain n’a aucune raison de faire du cinéma. Il y a des exceptions, Marguerite Duras par exemple, que j’ai connue pendant deux ou trois ans. Mais elle a un peu trop systématiquement tiré sur la corde de l’originalité. Elle a essayé tous les registres. Et puis il y avait son avarice, son besoin de reconnaissance. Mais elle a fait un très bon film, un vrai film avec un peu d’argent, India Song. C’est mon préféré. Un bon film dans une vie, ça suffit, non? Surtout que c’était une pure littéraire, dans le meilleur sens du terme. Ecrire, il n’y avait que ça pour elle. Ça remplissait une fonction fondamentale. Ecrire, pas filmer.
L’échec de Bernard-Henri Lévy vous a surpris?
C’était sûr. Il n’est pas plus cinéaste qu’il n’est écrivain. Ça doit être un éditorialiste.
Finalement, le fameux trio Cocteau-Guitry-Pagnol a été l’exception plutôt que la règle. On ne voit guère d’autres écrivains de ce calibre qui aient été également grands derrière la caméra…
Cocteau exécutait des figures libres dans des exercices imposés. J’admirais encore plus le cinéaste que l’écrivain en lui. Chez Pagnol aussi. C’est le cinéaste en lui qui a découvert le secret du masque de fer en imaginant que le roi était toujours reconnu dans la rue à cause des pièces de monnaie reproduisant son visage.
Quel souvenir conservez-vous de votre adolescence?
J’ai énormément lu. Après, j’ai vécu. Mais dans ma vie d’adulte, je n’ai jamais retrouvé les émerveillements que Gide m’avait procurés. Il y a bien eu à 20 ans le choc de Dashiell Hammett et de Thomas Hardy. Jude l’Obscur, ce sont les surréalistes qui me l’ont fait découvrir. Mais depuis, je n’ai eu que des émerveillements de spectateur. Il n’y a guère que la relecture de classiques qui puisse m’éblouir encore.
Et les romans récents, vous les lisez?
Aucun. C’est trop nul. Je préfère l’histoire, les Mémoires, les sciences, la philosophie et surtout les biographies littéraires. Ça m’intéresse ce qu’on croit être les petits côtés des gens, l’attitude de Joyce ou de Conrad vis-à-vis de leur famille. Avant de lire la vie de George Eliot, je croyais que c’était un homme… J’aime bien aussi le journalisme d’investigation quand il est pratiqué par des écrivains, le Truman Capote de De sang-froid, le Norman Mailer de Miami et le siège de Chicago. En France, il n’y a guère que Gilles Perrault. Mon préféré, c’est Un homme à part sur la vie de militant d’Henri Curiel.
A propos, vous avez lu les Mémoires de Brigitte Bardot? Elle vous décrit comme «un intello cradingue et gauchisant» qui conservait son chapeau en toutes circonstances pendant le tournage du Mépris…
Non, non, je ne lis pas ça. Surtout maintenant, après ses déclarations… Avant, je la trouvais plutôt sympa avec ses animaux. A l’époque du Mépris, ça s’est très bien passé, il n’y a eu aucune dispute, c’était très agréable. Ce qu’elle écrit aujourd’hui, ça la regarde. Mais les souvenirs de Bardot, non! Autant lire ceux de Nadine de Rothschild. Je préfère lire les Mémoires de Jean-François Revel. Ou le dernier John Le Carré, ça satisfera mon goût de l’agent double. Je me suis toujours senti double. On ne vient pas de la terre et puis quand même, on y est. Le Carré est un sous-maître qui ne vaut pas Graham Greene, lequel ne vaut pas Conrad… J’ai récemment relu Le rocher de Brighton. Les premiers romans sont souvent les meilleurs, on en revient toujours là. Celui-là, je l’aurais bien tourné. Impossible: il était trop bon. Je ne pouvais pas lui faire ça. Il avait beaucoup de force et moi, je n’en ai pas. Il m’en aurait donné. Quand j’ai adapté Moravia, j’avais de la force: je me suis servi de ses faiblesses pour lui prendre sa base.
Mais vous avez au moins essayé d’en lire, des romans français contemporains?
J’ai essayé. A la gare de Lausanne, j’ai souvent pris des poches sur le tourniquet. Bof… Je fais quand même des découvertes, Léon Daudet, Alexandre Vialatte, Fernando Pessoa, des gens que j’ai lus sur le tard. En fait, je vais peu dans les librairies.
Mais Truismes alors, vous l’avez trouvé comment?
Comme l’éditeur est un ami, j’ai pensé que ce serait bien de prendre une option sur les droits cinématographiques pour deux ans, en ne payant pas trop cher tout en étant correct. Et je me disais qu’un jour, peut-être, je m’y intéresserais…
Mais vous l’aviez lu?
A peine. Ça m’a paru difficile. J’ai essayé de le revendre à d’autres mais ça n’intéressait personne. Dommage que Marie Darrieussecq ne soit pas une cinéaste. Son idée était originale. Elle aurait dû en faire un film plutôt qu’un roman.
Mais toute la presse a annoncé que vous alliez incessamment tourner le film!
Pas pour l’instant. J’ai relu le roman trois ou quatre fois en tant que producteur et non plus seulement comme réalisateur. Et là, ça m’est apparu non seulement difficile, mais cher. Peut-être qu’il faudrait en faire une pièce de théâtre. Ou une fable. J’ai quelques vagues idées de forme, de mouvement, de moments de scène. C’est trop particulier. A la réflexion, il vaudrait peut-être mieux en faire un dessin animé.
A cause de la métamorphose?
Même pas. Il suffirait de dire que la femme se change en truie. Mais est-ce que ça tiendra une heure avec un récitant? C’est le point commun entre le cinéma et le théâtre: le souci du regard de l’autre, des conditions dans lesquelles il s’exerce. On n’a pas le droit de se moquer.
De se moquer du monde?
De se moquer de soi.
Truismes vous paraît donc inadaptable?
Finalement, c’est peut-être la preuve que c’est un bon livre.
C’est votre théorie générale sur la transposition des romans à l’écran?
C’est ma théorie.
Pas un grand roman qui ait donné un grand film?
Je cherche… non, je ne vois pas.
Lolita, de Stanley Kubrick?
Moyen. De toute façon, Nabokov n’est pas un grand romancier.
Mais qu’est-ce que c’est, un grand romancier?
C’est Mme de La Fayette. En ce moment, je relis La princesse de Clèves pour un projet de film sur l’amour et l’Occident. Balzac, Stendhal, Flaubert, Tolstoï, Dostoïevski, Dickens, Thomas Hardy, Meredith, Virginia Woolf, les grands Américains… Voilà des écrivains, il y en a vingt à tout casser. Ils ont un style, c’est-à-dire un endroit où se pose l’âme, tandis que Günter Grass ou John Le Carré n’ont que du talent.
En vous suivant, on se dit que si Le mépris de Godard a été un grand film, c’est que Le mépris de Moravia n’était pas un très bon roman…
Son seul bon livre, c’était le premier, Les indifférents. Il annonce tout le cinéma d’Antonioni. Alors pourquoi Le mépris? Parce que le producteur Carlo Ponti avait les droits.
C’était un film de commande?
J’ai suscité la commande, comme pour tous mes films. J’avais été moyennement emballé par le roman. Je pouvais donc en faire quelque chose. Quand c’est très bon, on ne peut rien en faire. La preuve: ce que Schlondorff a fait avec Un amour de Swann, ou ce que James Ivory a fait de Henry James avec les Bostoniens ou de E.M. Forster avec Chambre avec vue, c’est nul. Les chefs-d’oeuvre, il faut les lire, pas les tourner. Faire un film avec le Voyage au bout de la nuit, ça n’a pas de sens. Quand on a des romans moyens tels que ceux de Hammett ou de Chandler, on peut tout juste en faire un film. Les rapaces d’Erich von Stroheim est un bon film parce que le roman de Frank Norris ne vaut pas grand-chose. John Ford s’est emparé de La route du tabac d’Erskine Caldwell mais ce n’est pas ce qu’il a fait de mieux. A une époque, un King Vidor pouvait s’inspirer de Babbitt parce que Sinclair Lewis n’était pas Faulkner.
Pour autant, le cinéma ne s’est toujours pas émancipé de la littérature…
C’est vrai. Mais on peut dire aussi que la littérature, c’est souvent du cinéma. J’entends bien… je vois… c’est clair… Quand les romans disent ça, qui s’exprime? Le juge d’instruction, le savant, le journaliste d’investigation, saint Paul sur le chemin de Damas… C’est la légende d’un film intérieur.
Mais vous n’avez jamais été tenté de porter à l’écran ce que vous admiriez?
Justement, Les palmiers sauvages de Faulkner. J’y ai souvent pensé. J’ai renoncé parce que ça n’aurait pas été bon. Il ne faudrait prendre que l’histoire d’amour fou de ce couple qui sacrifie tout pour sa quête d’absolu, et laisser tomber l’histoire du vieux forçat.
Mais d’où vous vient votre théorie?
J’ai lu des livres et j’ai vu des films. Et puis c’est logique. Quand le travail d’écriture romanesque n’est pas très poussé, quand il souffre d’un défaut d’invention, le cinéma peut s’en emparer et s’en servir comme structure de base sans lui faire de mal. Alors Le rouge et le noir, on ne touche pas.
Quand vous lisez un roman, vous voyez des images?
Rarement. Si c’était le cas, je serais un mauvais cinéaste. Quel intérêt de voir une jeune fille penchée sur l’oreiller quand on lit Albertine disparue? Si je voyais des images, au sens où Paris Match l’entend, je serais aussi un mauvais lecteur. Il n’y a que Lelouch pour imaginer des plans en lisant Les misérables. Remarquez, il a éliminé le nom de Victor Hugo de l’affiche. Il a dû avoir peur que ça lui enlève des spectateurs, alors qu’on est en pleine médiatisation des noms! Il a dû craindre que ça fasse vieillot. C’est triste d’en arriver là.
Le dilemme trahison/fidélité qui a longtemps agité les adaptateurs doit vous sembler caduc?
On fait ce qu’on veut. Pour Le mépris, Moravia a été gentil. Il m’a dit: «Ça ne ressemble pas, ça va bien.» De toute façon, son avis, je m’en fichais. Je n’allais pas travailler avec lui.
Mais plusieurs de vos films sont des adaptations puisqu’on y trouve, à l’origine, des romans de Benjamin Joppolo, Dolorès Hitchens, Lionel White…
Que des livres quelconques, vous voyez bien…
Vous n’en diriez pas autant de Je vous salue Marie, puisqu’il s’agissait d’un livre de Françoise Dolto…
Mais L’Evangile au risque de la psychanalyse n’était pas un roman! Et je ne lui ai pris que l’idée. De même, pour mon dernier film For ever Mozart, je suis parti d’un article du Monde des livres dans lequel Philippe Sollers disait qu’à Sarajevo sous les bombes, tant qu’à y faire du théâtre, on aurait dû jouer Le triomphe de l’amour de Marivaux plutôt qu’En attendant Godotde Beckett.
Et les deux petits livres que vous venez de publier, c’est quoi au juste?
Pas des livres. Plutôt des souvenirs de films, sans les photos et les détails sans intérêt: «La voiture arrive…» Que des phrases prononcées. Ça donne un petit prolongement. On y trouve même des choses qui ne sont pas dans le film, ce qui est assez fort pour un souvenir. Ces livres ne sont ni de la littérature ni du cinéma. Des traces d’un film, proches de certains textes de Duras.
N’êtes-vous pas un écrivain raté comme tous vos amis de la nouvelle vague?
Truffaut était plutôt un libraire raté et un critique dans la lignée des grands critiques d’art français de Diderot à Malraux, des gens qui avaient un style. C’est vrai que Rohmer et Astruc ont écrit. Mais quand on a vu des films, on s’est sentis enfin délivrés de la terreur de l’écriture. On n’était plus écrasés par le spectre des grands écrivains. Ecrire, j’y songeais au début. C’était une idée mais elle n’était pas sérieuse. Je voulais publier un premier roman chez Gallimard. J’ai essayé: «Il fait nuit…» Je n’ai même pas fini la première phrase. Alors j’ai voulu être peintre. Et voilà, j’ai fait du cinéma.
En passant par l’écriture, tout de même?
C’est vrai, puisque j’ai commencé à écrire sur les films avant d’en faire. Beaucoup de critiques dans les Cahiers du cinéma et dans Arts. Mais je n’envisageais pas le cinéma comme une forme d’écriture. C’était quand même une vision.
Et les scénarios alors?
Il fallait bien prendre des notes pour guider la fabrication du film, mais ce n’était pas écrire. Les scripts américains d’avant-guerre, écrits par des romanciers, avaient une forme qui les rendait dignes d’être publiés. Aujourd’hui, ce n’est pas ça. Ce ne sont plus que des dialogues de théâtre avec de temps en temps «intérieur jour» et «extérieur nuit». Aucun intérêt. On montre ça à des gens pour qu’ils investissent de l’argent dans un film. On se demande ce qu’ils voient quand ils lisent un script. D’ailleurs, ils ne le lisent pas.
En d’autres temps, vous auriez été nettement plus véhément! A 66 ans, la haine culturelle ne s’atténue-t-elle pas un peu?
Elle se manifeste plus rarement, moins violemment, mais elle est toujours là. Vous savez, la nouvelle vague n’avait jamais dit du mal des personnes. Uniquement des oeuvres, et preuves à l’appui.
C’est la lecture de Cioran qui vous a assagi?
Elle correspond à mon penchant pour l’aphorisme, la synthèse, les proverbes. Ce goût me vient peut-être des formules scientifiques. L’aphorisme résume quelque chose tout en permettant d’autres développements. Comme un noeud: il pourrait être fait dans d’autres sens, n’empêche que quand il est fait, le soulier tient aussi. Ce n’est pas la pensée mais une trace de la pensée. Alors Cioran, je le lis tout le temps dans tous les sens. C’est très bien écrit. Avec lui, l’esprit transforme la matière. Cioran me donne une matière dont l’esprit tire sa nourriture.
Mais qu’est-ce qui vous séduit tant dans les aphorismes?
Le côté gare de triage. On y entre, on en sort, on y revient. Si on trouve une bonne pensée, on peut y rester longtemps. Puis on l’emporte avec soi. Pas besoin de tout lire. Pessoa, que j’aime beaucoup aussi, est tout de même très noir alors que Cioran aide à vivre. C’est une autre forme de pensée que la pensée avec un début, un milieu et une fin. Ça ne raconte pas d’histoire, c’est un moment de l’histoire.
On peut voir ce que vous avez coché dans le volume d’?uvres complètes de Cioran?
Des choses comme ça: «Chaque pensée devrait rappeler la ruine d’un sourire»; «Nous sommes tous des farceurs, nous survivons à nos problèmes»; «Tout problème profane un mystère; à son tour, le mystère est profané par sa solution»; «La pâleur nous montre jusqu’où le corps peut comprendre l’âme»; «Tôt ou tard, chaque désir doit rencontrer sa lassitude, sa vérité…» Et puis il y a celui-ci aussi qui me plaît beaucoup: «Objection contre la science; ce monde ne mérite pas d’être connu.» C’est autre chose que les conneries de Georges Charpak. Les scientifiques qui se permettent d’écrire sans savoir écrire, ça non! La logique du vivant de François Jacob, c’était écrit. J’en suis resté à Buffon: le style est l’homme même. Levinas avait de belles idées mais il était incapable de les faire passer à cause du problème de la langue. Popper et Einstein pareil. Il y a une déperdition du savoir-écrire. Alors Cioran… J’avais oublié celle-là: «J’ai perdu au contact des hommes toute la fraîcheur de mes névroses.»
Vous êtes mélancolique?
Rêveur, plutôt. Et solitaire. Trop.
Avec quels créateurs vous sentez-vous une communauté de destin?
Novalis, Nicolas de Staël… Des gens qui sont morts jeunes. Et tragiquement. Aujourd’hui, je me sens surtout proche d’Antonin Artaud. Je l’ai toujours aimé. Quand j’étais étudiant, je louais une chambre rue d’Assas à Paris, à Jean Schlumberger. Un soir, en 1947, André Gide est venu le chercher pour l’emmener à une soirée. «Vous permettez que je vous suive? …» Je me suis retrouvé au théâtre du Vieux-Colombier où j’ai assisté à la fameuse conférence «Tête à tête» d’Antonin Artaud. Il disait qu’il ne savait pas écrire mais qu’il écrivait quand même et qu’il fallait le délivrer en le publiant. Or, j’ai toujours pensé que je ne savais pas filmer. On ne me croit pas parce que j’ai connu le succès une ou deux fois. Or c’est pareil qu’Artaud. La différence, c’est l’argent.
Mais vous souffrez de la solitude?
a solitude n’est pas l’isolement. On est toujours deux en un. Il y a les autres en soi. Quand la solitude devient isolement, c’est dur à supporter.
C’est votre cas?
Un peu.
Mais vous en souffrez?
Un peu…
Mais vous l’avez voulu!
Ben oui. Je trouve peu de partenaires à mon niveau pour jouer au tennis et pour parler après. J’ai besoin de sport, mais pas sous l’angle volontariste. L’important, c’est le mental. Dès qu’on pense qu’on joue, on joue mal. C’est comme la mort de Porthos dans Le vicomte de Bragelonne, quand il a posé son explosif et qu’il revient dans le souterrain. Dès lors qu’il pense qu’il met un pied devant l’autre, il ne peut plus bouger. Parce qu’il a conscience de ce qu’il fait. Le château s’écroule. Comme il est costaud, il résiste plusieurs jours avant de succomber, écrasé par des rochers.
Alexandre Dumas, ça aide pour le tennis?
Heureusement qu’on a les livres et les films. Et encore, les films, on ne les trouve pas, ils sont mal distribués. Le livre, c’est un véritable ami. C’est très seul. Alors que le film n’est un compagnon qu’en pensée. Il faut aller vers lui et passer par une machine. Les livres sont disséminés autour de vous, vous pouvez les toucher.
Que vous donne la littérature que ne vous donnera jamais le cinéma?
Le livre, justement. On peut revenir en arrière. En littérature, il y a beaucoup de passé et un peu de futur, mais il n’y a pas de présent. Au cinéma, il n’y a que du présent qui ne fait que passer. A l’écran, le présent, c’est ce qui vous est présenté au moment où il s’en va. Tout ça, c’est frère et soeur. Ecrire, peindre, penser…: dans cette famille de l’art, le cinéma reste un étranger, un immigré, le serviteur. Il devient l’ami de la famille. J’en suis. Pourtant, je me sens inférieur à tous les créateurs que j’aime. Ça ne me gêne pas. Je sais que je suis dans ce monde-là. Eux ont droit au salon, moi à l’antichambre. Pas parce que je fais des films. Le cinéma est seul alors que les autres sont ensemble. Il vient d’un endroit qu’ils n’avaient pas vu.
C’est pour ça qu’un film et un livre n’auront jamais le même statut?
Je ne sais pas. Un film moyen, un film modeste sera toujours dans le même domaine que les plus grands films. Tout ça, c’est du cinéma. Alors qu’un roman moyen ne relève pas de la même littérature que les grands romans. Je ne me l’explique pas, mais c’est ce que je ressens.
Mais, finalement, que vous aura apporté la littérature?
Une façon de penser plus expérimentale. Le cinéaste pense avec les yeux et les oreilles, le peintre avec les mains. La littérature est un refuge. Elle a approfondi ma vision du monde. Les livres m’ont dit des choses que ne me disaient pas les vivants. La littérature a enquêté sur le monde. En ce sens, elle m’a donné une leçon de morale artistique. Je lui dois ça, une conscience morale. Contre la parole d’Etat, de gouvernement ou de pouvoir, elle est une parole. Non celle des partis mais celle des hommes un à un. Les livres sont écrits un à un. Aussi je fais des films un à un, parce que Kafka nous a demandé de faire du positif avec le négatif. La littérature a été ma marraine. Je la retrouve depuis que je me suis remis intensément à lire. Les films n’apportent plus ce contact avec le réel.
Depuis quand?
Le cinéma a annoncé les camps de concentration, rappelez-vous La règle du jeu, Le dictateur… Mais il ne les a pas montrés. C’est la littérature qui l’a fait. Le cinéma a manqué à son devoir, il a failli à sa mission.
Et pour exprimer le bonheur, lequel des deux est le mieux placé?
Aujourd’hui, le cinéma plonge les gens dans l’erreur, dans la satisfaction. Il y a peu à en attendre. Les gens n’en ont pas vraiment besoin. Ils vont au cinéma parce que ça les fait sortir de chez eux. Ça leur donne du romanesque sans effort, très loin et très en dessous de Graham Greene.
A force d’être dans la marge, vous n’avez pas peur de sortir de la page?
Marginal, je le suis. C’est une constatation. Le risque, ce n’est pas de sortir mais de tomber de la page. Avoir le choix entre le suicide et l’ultrapauvreté. Ce n’est pas le cas, mais je n’en suis pas si loin. Car tout peut s’arrêter du jour au lendemain. Que je sois reconnu comme marge ou comme page pleine, je suis toujours dans le cahier. Pour l’instant…
(« Image extraite du « Mépris » et photos de Godard D.R.)
1 420 Réponses pour Godard, du côté de la littérature plus que du cinéma
Très bon papier.
Bravo !
Faut-il comprendre que cette itw de JLG est parue en 1997 finalement, ou jamais ?… indépendamment de l’anecdote des circonstances de sa réception, passoul ?
Alors ça, c magnifico, jean-luc,
« Elle correspond à mon penchant pour l’aphorisme, la synthèse, les proverbes. Ce goût me vient peut-être des formules scientifiques. L’aphorisme résume quelque chose tout en permettant d’autres développements. Comme un noeud: il pourrait être fait dans d’autres sens, n’empêche que quand il est fait, le soulier tient aussi. Ce n’est pas la pensée mais une trace de la pensée. Alors Cioran, je le lis tout le temps dans tous les sens. C’est très bien écrit. Avec lui, l’esprit transforme la matière. Cioran me donne une matière dont l’esprit tire sa nourriture ».
Quel belle conversation, longue, ample, fine. Vous avez pris le temps. on oublie qui est Godard (le mythe) pour écouter l’homme passionné de littérature qui fait tenir ensemble toutes ses lectures. Comme une solitude rompue. Il évoque une double vie et vous êtes, semble-t-il entré dans son jardin secret. il n’y avait ni micro, ni caméra qui rendent parfois lointain celui que l’on veut atteindre. On vous imagine silencieux, à l’écoute, prenant des notes, peut-être, mettant le cap sur l’inconnu de cet homme trop et mal connu,impressionnant (par son œuvre, son tempérament), devenant peu à peu, un proche par la parole car en confiance. Sa voix (comment était-elle ?) semble être du côté de la vérité, une parole nue. Un cheminement pour éclairer les traces, les choix. Écrit-il ? Un beau cadeau pour la RDL.
quelle
« La littérature a été ma marraine »… ouh là là, Godard cinéaste qui a marché à la baguette (de fée ?)…
Un petit enfant du siècle, ce Jean-Luc. Mais plus de celui-ci. Même son prénom l’indique.
Je trouve qu’on dirait un mec qui s’ennuie, là. Alors pour se désennuyer il fait comme les petits garçons qui jouent avec les insectes. Et que je te décale le rendez-vous. Et que je te fais poireauter. Et que je me délecte, derrière les carreaux, de voir Pierre Assouline assis par terre. Et que je te la joue désabusée, cioranique (ta mère !) et indifférent. Que j’abuse du paradoxe et des noms empilés comme sur un catalogue…
Godard, il me fait penser à Houellebecq, là. Sauf que ça se trouve, il n’abusait même pas de l’alcool, du pétard et du sexe tarifé.
Pierre Assouline, c’est plus que du sacerdoce, enfin. De l’abnégation. J’espère que votre fond de pantalon n’a pas trop souffert !
Avec A B d S, P l F & le Mépris, Godard a écrit l’histoire du 7e art. Mais c’était il y a très longtemps, bien avant 97. Depuis c’est le grand trou noir.
Excellente interview. Il faut dire que peu de « clients » sont aussi bons que Godard quand il est en confiance, aussi lucides et cultivés, avec un côté provocateur unique (« … je ne peux pas serrer la main de quelqu’un qui a serré la main de Claude Berri. … »). Il faudrait publier un gros pavé style Bouquins ou Quarto avec tous les entretiens donnés par Godard du calibre de celui-ci.
On pourrait même publier un livre d’aphorismes de Godard fait à partir de ses écrits et ses déclarations. Il aurait pu être un grand aphoriste s’il n’avait pas été cinéaste, comme le preuve cet aphorisme, dejado caer como si tal cosa (on dirait en espagnol):
« Ils ont un style, c’est-à-dire un endroit où se pose l’âme ».
On dirait du David Hockney cette photo.
Pablo, Godard sur Berri ne fait pas dans l’aphorisme, c’est du cinéma-vérité.
« Avant de lire la vie de George Eliot, je croyais que c’était un homme… »
Inquiétant…
Le problème, c’est qu’on a déjà discuté (enfin, ceux qui discutent ensemble, n’est-ce pas, puisqu’il y en a d’autres qui font comme Godard avec Berri, ignorant superbement que le soleil brille pour tout le monde, bref) qu’on a déjà discuté, dis-je, de Godard, abondamment, sur le fil ci-dessous.
Le papier si gentiment reproduit par notre hôte à notre intention nous forcerait donc, si nous en débattions bien sûr, à « remettre cent balles dans la machine », et en sommes-nous capables collectivement ? Rien de moins sûr…
18.51 on va pour sûr trouver d’autres sujets de discussion (grosso modo, 1/7e des posts concernent les billets, là, ça ne fera qu’1/20e), mais il lui fallait bien saluer un jour des collègues pas toujours confraternels qui lui ont permis de se lancer sur le même sujet rabattu. Mais de quoi voulez-vous « débattre », au juste : des aventures de passoul en suisse ou du contenu de cette vieille itw ? Dans ce cas là, je vous dirai : eh bé, non, pas d’accord, la littérature, celle de Céline par exemple, n’a jamais annoncé la shoah, tandis que le cinéma de l’ex (copain) resnais en a bien montré les effets. Et on peut déjà relever des quantités de propos discutab’ de ce tonneau… mais ce serait apparemment blasphématoires, vu qu’il y a pas à sourire des pâmoisons collectives suscitées par les propos lénifiants de cette anti quicône.
Pourquoi « inquiétant » ? Je suis bin aise de m’abriter derrière mon st godard pour vous dire que moi itou, j’avions toujours pensé que george eliot était un homme. Pourquoi vous inquiétez : ça vous est jamais arrivé, de telles bévues ? Alhons dhonc !
« – Lolita, de Stanley Kubrick?
– Moyen. De toute façon, Nabokov n’est pas un grand romancier. »
Je suis d’accord avec tout ce qu’il raconte, sauf ça. Quand on peut lire Nabokov dans le texte, on se rend compte que c’est un grand, un très grand. Quand au film de Kubrick, c’est une de ses meilleures réalisations. A chaque fois qu’on la revoit, on est pris.
Godard a toujours eu une sorte d’aversion inexplicable pour Kubrick.
Je m’assis par terre en m’adossant au rideau de fer en espérant qu’une idée de génie me vienne.
–
J’aurais ben voulu voir ça.
Vous êtes d’accord avec cette playlist alignée des « grands écrivains », vous autres les prétendus spécialistes, arbitres des élégances : edel, MC, gwg ? Moi, je la trouve des plus gratuites… Cette notion de « grandeur d’éivains » mise à toutes les sauces pour faire accroire qu’on est plus littérature que cinoche. Bouh, quel marronnier, Zarko a fait la même chose, qq temps plus tard !…
« » » »C’est Mme de La Fayette. En ce moment, je relis La princesse de Clèves pour un projet de film sur l’amour et l’Occident. Balzac, Stendhal, Flaubert, Tolstoï, Dostoïevski, Dickens, Thomas Hardy, Meredith, Virginia Woolf, les grands Américains… Voilà des écrivains, il y en a vingt à tout casser. Ils ont un style, c’est-à-dire un endroit où se pose l’âme » » »,
(tandis que Günter Grass ou John Le Carré n’ont que du talent (quelle chute, les zamis !). M’énerve.
nourri dans sa jeunesse à tout ce que la vieille droite littéraire a pu produire (Morand, Rebatet, Montherlant, Mauriac, Bernanos et aussi Nimier, Blondin…)
–
miam…!
« Aphorismes » de Godard:
– La guerre, c’est simple : c’est faire entrer un morceau de fer dans un morceau de chair.
– Le cinéma n’est pas à l’abri du temps. Il est l’abri du temps.
– L’Histoire est l’oeuvre des ouvres.
– L’objectivité, c’est cinq minutes pour Hitler, cinq minutes pour les Juifs.
– Les marges est ce qui fait tenir les pages ensemble.
– Quelle est votre ambition dans la vie ? – Devenir immortel et mourir.
– Notre époque est à la recherche d’une question perdue, comme fatiguée par toutes les bonnes réponses.
– Qu’est-ce que l’art sinon ce par quoi les formes deviennent style.
– C’est lorsque les choses finissent qu’elles prennent un sens.
– L’Art se retire parce que les hommes n’ont plus besoin de lui.
– Je suis (du verbe être) un chien, qui suit (du verbe suivre) Godard.
– Chaque fois que vous verrez passer un camion, dites vous que c’est une parole de femme qui passe.
– Quelle est la vitesse maximum de l’amour ? Soixante-huit kilomètres à l’heure. Parce qu’un kilomètre de plus et on fait un tête-à-queue.
– Je disputais un match de football comme gardien lorsqu’on a annoncé la fin de la guerre. J’ai tourné la tête et j’ai pris un but.
@ D – > « J’aurais ben voulu voir ça ».
de quoi ?… l’idée de génie ? ou la gars assis par terre ? On sait jamais quoi penser avec vos chutes. Bon, c pas la 1ère hypothèse car ça se serait su depuis long time, hein. On bouffe quoi, ce soir après l’Apérol ?
Nous avons un billet sur Godard : c’est byzance.
Pierre Assouline 👍 & 👏
Ben enfin JJJ, Passou assis par terre. Petit impertinent.
Pablo 75
😊 merci 💪 z’êtes costaud.
On bouffe quoi, ce soir ?
–
…un peu de Morand dessalé.
eh bé, après cioran, il peut aller se rhabiller… vous l’enfoncez, pablo57, c bien ce que je pensions intimement : mon pilier de bar alcoolo du coin t’en sort des 10 fois mieux gratinées de cet acabit tous les matins avant de s’jeter sur son p’tit blanc…
@ « Chaque fois que vous verrez passer un camion, dites vous que c’est une parole de femme qui passe ».
celle-là…, margo Dudu l’avait bien méditée pour Depardieu, entre nous, hein…
Et on va nous dire qu’elle était légère !
(pourvu qu’il soit d’accord, le pt’it blanc).
veille, alors que tout avait été réservé, il fit savoir qu’il refusait. Stupeur et tremblement. Il m’appela : « Je viens de lire
à Agnès Varda également il a laissé porte close sans se raviser.
Elle a pleuré.
…
…il courre, beaucoup d’eau, sous les ponts,…
…
…c’est, pas assez,…pour y livrer, des commentaires,…mais, Si, mais, Non,…
…
…laisser, cette Doxa, vivre d’elle-même,…
…trop, moderne, laisser voir, ce que, l’on attend à voir,…en arborescences animées, aux sorties du culte obscurantiste – plein-gaz,…
…
…comme, un Picasso, l’Atelier de Cannes, Cannes, 30 mars 1956. 114 X 146 cm,….
…
…comme, un hommage à Matisse,…etc,…
…
Mais pourquoi Diable rajouter un Chateau par dessus la tète de Porthos? La grotte de Locmaria suffit. étrange version plus proche d’Ann Radcliffe que de Dumas père….
oui. beaucoup d’eau.
Paul Edel a éceit sur.le.Mépris. Le.débat a.commncé la veille grâce à D. Au début par une conversation désabusée avec jazzi. Puis lvdlb est bcp intervenue et d’autres aussi, Clopine etc.
Paul est arrivé avec son talent habituel qui virevolte et pablo 75 a mis la cerise sur le gâteau de D.
Si tous nous avons lu la conf. de 1997 et vu celle de 2018, c’est par D.
1997 : quand les téléphones portables servaient encore à téléphoner plutôt qu’ à filmer ou à shooter – le temps de tuer les dernières cabines téléphoniques dont rien ne me consolera de la disparition ; elles faisaient les radotages plus vivants
Bon, ben « la vieillesse est un naufrage », ça pourrait être une citation de Godard. Sans qu’il ait besoin d’ouvrir trop la bouche, donc.
rôô Court toujours le bonnet (breton) trop près de la tête et du trottoir…
« Encore six de ses formidables enjambées, et il était hors de la voûte ; hors de la voûte, deux ou trois vigoureux élans, et il touchait au canot.
Soudain, il sentit ses genoux fléchir : ses genoux semblaient vides, ses jambes mollissaient sous lui.
– Oh ! oh ! murmura-t-il étonné, voilà que ma fatigue me reprend ; voilà que je ne peux plus marcher. Qu’est-ce à dire ? »
In Le vicomte de Bragelonne, « La mort d’un titan «
Cette conversation avec un homme supérieurement intelligent a quelque chose de divin.
(Clopine, qu’est-ce que vous pouvez écrire comme c…).
joint-venture de péteux (old farts)
un homme supérieurement intelligent
ou bien supérieurement cultivé ?
Un homme aux grands airs ; et c’est presque tout dans la société du spectacle dirait un qui s’y connaissait en la matière, mine de rien
Non, je n’ai jamais trouvé, moi non plus, qu Nabokov était un grand romancier. Je l’ai souvent dit ici, au grand dam de C.P. qui l’admire. Je n’ai jamais compris une telle admiration.
Si ce qu’il aime se résume au genre de aphorisme, on ne peut pas dire qu’il aime la littérature. C’est comme si on résumait H. Michaux à Poteau d’angle. Un poème de Michaux, c’est infini comme la littérature, pas les aphorismes de Poteau d’angle. Mais Cioran et Michaux se connaissaient très bien, je ne sais pas s’ils s’admiraient mutuellement.
Mais tout ce que dit Godard sur l’adaptation des romans au cinéma est fort juste. Le roman de Moravia est médiocre; c’est juste un bon scénario. Proust reste inadaptable à l’écran, c’est l’évidence même. Rien que l’incipit est déjà infini ; c’est de la littérature à l’état pur, qui dit mille choses en peu de mots, et contradictoires en plus.
J’aime beaucoup quand il dit qu’il ne sait pas filmer. C’est vrai, tellement vrai, et tellement plus compliqué que ça en même temps.
Langoncet
https://www.newyorker.com/culture/richard-brody/bob-dylan-in-correspondence
C’est quand JLG avait de la compassion pour Dylan, entré dans sa born again period…
Quelque part il dit qu’il est autiste. Je le crois en effet. C’est typique, c’est ce que je disais sur l’autre fil. Tout dans Le Mépris est typique de ça. Un autisme supérieur comme il dit. C’est ce qu’il appelle sans doute « ne pas savoir filmer ». Einstein aussi était autiste.
le journal d’Alain, le 23 juillet 1940.« J’espère que l’Allemand vaincra ; car il ne faut pas que le genre de Gaulle l’emporte chez nous. Il est remarquable que la guerre revient à une guerre juive, c’est-à-dire à une guerre qui aura des milliards et aussi des Judas Maccabées. Qui peut savoir ? ».
Pourtant, il s’intéresse énormément au monde.
Cela semble contradictoire avec l’autisme. Ne pourrait-on dire misanthrope ?
Non, je n’ai jamais trouvé, moi non plus, qu Nabokov était un grand romancier. (Widergänger)
Widergänger a-t-il lu « Pnine »?
tandis que Günter Grass ou John Le Carré n’ont que du talent
___________
Mais c’est vrai !
Je suis d’accord avec sa liste. et d’accord avec sa définition du grand écrivain, oui, un coin où poser son âme. C’est ça exactement. Une phrase de Flaubert sans qu’on le dise, et on sait que c’est de lui. Il est identifiable. Pas les autres comme Le Carré ou Moravia. Proust idem. Stendhal, etc. Mon ancien prof de khâgne, Lionel Ray, faisait un exercice en début d’année, il énonçait des phrases d’écrivains, et il fallait reconnaître leur auteur. Un excellent exercice pour comprendre l’âme d’un écrivain, l’âme de ses textes.
Je ne sais plus. Il me semble, oui.
Lolita, de Stanley Kubrick?
Moyen. De toute façon, Nabokov n’est pas un grand romancier.
J’adore le côté péremptoire. Quant aux arguments, on va tout de même pas chicaner Msieur Godard, tout de même.
« Pas un grand roman qui ait donné un grand film?
Je cherche… non, je ne vois pas. »
Peut-être le Guépard (Lampedusa/Visconti), Les 120 jours (Sade/Pasolini) ou Querelle (Genet/Fassbinder) ?
c’est vrai que comparé à Darrieussecq, Nabokov est nul.
« Lolita » n’arrive pas à la cheville de « Truisme »
Non, autiste, c’est autre chose. Par exemple un autiste ne sait pas lire sur un visage l’émotion qui l’habite, c’est un langue étrangère pour lui. Ça n’a rien à voir avec la misanthropie. La façon dont les images sont agencées est le fait d’un autiste, une certaine rigidité dans l’articulation des images (ce qui explique son obsession d’ailleurs de la fluidité et des raccords dans le mouvement qui la crée pour Le Mépris; il travaille contre lui-même, Godard), une certaine cérébralité aussi, son goût de l’aphorisme. La rigidité des dieux en plâtre dans Le Mépris. C’est ce qui a causé son échec à sa sortie. L’autiste a une sensibilité très spéciale, il faut un temps d’adaptation, et il est souvent très intelligent comme Einstein.
Non, Querelle, c’est fade. Le roman de Genet, c’est de la poésie pure, c’est du Rimbaud. Le film à côté est nul.
@de la compassion pour Dylan
Longtemps après avoir éprouvé de l’envie pour Grace Slick s’ecposant sur les sommets du building d’en face, alors
https://www.youtube.com/watch?v=XYr5D4lqC0w
ce méli mélo c’est dans le but de prouver l’intérêt de Godard pour la littérature ?
les « grands » lecteurs sont des lecteurs de peu de livres, sinon, passé un certain nombre ils finissent par se mélanger les pinceaux.
on en a quelques bons exemples ici, la palme d’or revenant à Paul Edel.
J’aime le cinéma expérimental, de recherche, d’art et d’essai, d’auteur. Mais j’aime aussi, à l’occasion, le cinoche, le cinéma populaire, le cinéma du samedi soir ou du dimanche en famille, un certain cinéma de genre et les mélos. Godard, pour se grandir, n’a pas à casser du sucre sur Lelouch. On sent un certain ressentiment contre un confrère qui, lui aussi, a créé sa propre société de production et fait les films qui lui ressemblent.
l’autre exemple c’est WGG, en tout cas si on compare le nombre de livres qu’il a lus à celui qu’il a compris…
pour Godard c’est pareil, on se demande à quoi ça sert d’avoir lu autant de livres pour arriver à un degré d’intelligence aussi faible.
c’est d’ailleurs assez triste de constater que l’intelligence est souvent inversement proportionnelle à la quantité de livres lus.
alors que ceux qui louent la littérature essaient d’argumenter là-dessus.
c’est un peu comme les philosophes qui osent encore vanter l’extrême « lucidité » des philosophes, même après l’épisode Heidegger.
Grace Slick > Jefferson Airplane
S’ecposant > S’exposant
Bless it’s pointed little head
https://www.youtube.com/watch?v=iAdKoFVuVHY
C’est pas un peu fini toutes ces gamineries d’adolescent boutonneux, hamlet ?
Jazzi faut quand pas être pas être un grand cinéphile pour dire que Lelouch c’est mièvre et bas de plafond.
pour le coup Lelouch c’est tellement nul que Godard ne sort pas grandi en le critiquant.
c’est un peu comme critiquer « Truisme ».
critiquer signifie qu’on prend déjà la chose en considération.
Il prend simplement Lelouch comme l’exemple paradigmatique du genre de cinéma qu’il n’aime pas. Son opposé en somme.
L’adaptation de Sous le soleil de Satan par Pialat valait le détour. Pialat considérait que beaucoup des romans de Bernanos étaient adaptables. La caractéristique d’un bon texte est quand même de donner lieu à des commentaires intéressants, jusqu’à, dans l’idéal, une adaptation cinématographique. Pour un auteur aussi radical que Godard, il est vrai que cela reste une grande question.
pour le coup Godard aurait dû sortir un film sur Truisme, au moins ça l’aurait mis à sa place pour la postérité.
dommage qu’il se soit aperçu in extremis qu’au mieux on pouvait en tirer un dessin animé.
ce qui démontre un certain mépris pour le dessin animé.
Un penseur n’est pas plus avancé sur l’état du monde que le commun des mortels. Ce n’est pas son statut de philosophe qui l’en garantie. Un philosophe est simplement quelqu’un plus capable que les autres d’expliquer la pertinence ou pas d’un concept.
WGG, non non non pas son opposé, le cinéma de Godard n’est pas très loin de celui de Lelouch.
sans doute faudra-t-il quelques décennies pour s’e rendre compte.
après tout nous n’avons jamais fait l’analyse de cette folie collective qui a entouré la sortie de Truisme, pourtant maintenant, avec le recul ce serait bien de tirer un bilan.
Bernanos est plus visuel que littéraire peut-être, comme Malraux. C’est pour ça qu’il aime Malraux.
« Widergänger dit: 17 mai 2018 à 22 h 44 min
Un penseur n’est pas plus avancé sur l’état du monde que le commun des mortels. Ce n’est pas son statut de philosophe qui l’en garantie. Un philosophe est simplement quelqu’un plus capable que les autres d’expliquer la pertinence ou pas d’un concept. »
WGG : vous avez dû louper l’épisode du mythe de la Caverne.
vous savez quoi WGG ? quand vous énoncez une « vérité » ça me fait toujours pensé au lanceur de poignard dans Tintin : « caramba encore loupé ! »
Je pense qu’un grand cinéaste aurait pu adapter Monsieur Ouine, mais dans les années 50 ou 60. Aujourd’hui, il est trop tard. Par exemple, Visconti, au lieu de faire l’Etranger. Cela aurait été plus durable comme chef-d’oeuvre. Et j’allais dire : plus chrétien.
« Widergänger dit: 17 mai 2018 à 22 h 46 min
Bernanos est plus visuel que littéraire peut-être, comme Malraux. C’est pour ça qu’il aime Malraux. »
et Graham Green plus visuel que le Carré ?
caramba encore raté!!
Bresson a parfaitement réussi son coup avec le Journal d’un curé de campagne, et avec Mouchette.
le seul truc digne d’intérêt dans cet interview c’est ça :
Du bon vieux, pour se remettre en condition
https://www.onf.ca/film/trip_down_memory_lane_fr/
« Pas un grand roman qui ait donné un grand film? »
faut avoir lu le grand roman, alors,
pas lu L’enfance d’Yvan.
Et un p’tit roman qui donne un grand film ?
En règle générale, un cinéaste n’a pas à se mettre au service d’un écrivain, mais au service de sa vision du cinéma. L’adaptation est un piège, une facilité, une faiblesse. D’où la rareté soulignée par Godard. Les quelques exceptions, c’est quand le cinéaste trahit et fait sien le roman de départ. Tel Pasolini avec la trilogie de la vie ou Fellini avec le Satyricon. Mais ce n’est pas leurs plus grands films…
la palme d’or revenant à Paul Edel.
l’est déjà Goncourt ; c’est pas un peu cumuler les honneurs ça ?
le seul truc digne d’intérêt dans cet interview c’est ça :
https://filialen.migros.ch/fr/supermarche-migros-rolle
Self-Scanning / Self-Checkout
:
« Dans ce magasin, vous pouvez scanner vous-même vos produits, les ranger dans votre cabas et régler la somme due en toute indépendance, sans recourir à de l’argent liquide, grâce au self-scanning et au self-checkout. »
ça c’est une info importante qui marque bien un changement d’époque : adios les caissières et bienvenue dans le monde du self-scanning !
hamlet aux pommes de terre.
delicioso (la tortilla)
« Et un p’tit roman qui donne un grand film ? »
Oui, rose. Les grands romans donnent de petits films, toujours. Je vais encore le constater demain, date de sortie du Don Quichotte…
la seule question qu’on est en droit de se poser serait : comment encore lire du Nabokov dans un monde où les caissières ont disparu ?
l’autre question que vous devriez tous vous poser c’est :
pourquoi adapte-t-on des films à partir de romans alors que jamais un roman n’a été tiré d’un film ?
alors qu’il a des films qui auraient pu donner d’excellents romans.
comme quoi le monde n’est pas aussi bien fait que certains le croient.
Godard, pour se grandir, n’a pas à casser du sucre sur
ni sur Truffaut ni sur Claude Berri, Tchao Pantin hein avec not’ Coluche, ni sur Duras et India Song avec Anne Marie Stretter;
Et les peplums Ben Hur et SPARTACUS ( il vit à Mexico) et les westerns, spaghettis ou pas (la prisonnière du désert, le bon la brute et le truand). Et tout et tout ; et Bambi.
Le seul film d’Orson Welles que je n’aime pas trop, c’est Le Procès. J’avais été désemparé par cette adaptation si loin de l’original.
Les caméras de surveillance du migros de Rolle on un grand film dans leurs archives : les images de Godard faisant ses courses depuis plusieurs décennies. Un montage en accéléré, nous le montrerait passant de l’âge mûr à la vieillesse !
Jazzi : vous qui êtes à la fois un grand cinéphile et un immense lecteur, à tel point qu’on ne rencontre rarement un esprit aussi bien éclairé sur des arts aussi distants, pouvez-vous me dire pourquoi on n’a jamais tiré aucun livre d’un film ? pourtant quand on regarde en ce moment les films sont bien meilleurs ? non ? tellement meilleurs qu’ils devraient inspirer certains écrivains ? non ? qu’en pensez-vous ?
L’autiste je le vois très replié sur lui-même et confit dans son monde. Là il a sacrément communiqué Godard.
Bon à vous de voir.
« jamais un roman n’a été tiré d’un film ? »
Rien n’est moins sûr, hamlet !
Je cherche… non, je ne vois pas. »
moi aussi je cherche, et je ne vois pas non plus.
Les grands films ne sont pas des adaptations de romans.
Jazzi, tu connais Rolle, dans la même rue à proximité de la gare il y a un super restaurant où l’on mange d’excellentes fondues savoyardes (là bas on dit « jurassiennes »), et ce resto a la particularité d’être tenu par une… devinez quoi ? une hollandaise !
« jamais un roman n’a été tiré d’un film ? »
ça c’est quand on se fait son cinéma ; c’est tout un roman. Cela a été dit avant hier. On se fait une toile. C’est l’aventure. Pas de nouvelle. Un vrai polar. C’est du cinoche. Quel roman noir.
Mais si ! Le ciné roman, Robb-Grillet.
« Jazzi dit: 17 mai 2018 à 23 h 06 min
« jamais un roman n’a été tiré d’un film ? »
Rien n’est moins sûr, hamlet ! »
ah bon ? Jaz vous savez que vous m’excitez, je veux dire ma curiosité, cela dit vous m’avez toujours aussi excité, je veux dire pas que ma curiosité, mais je ne vais pas encore vous faire la fleur d’une avance que rejetterez comme les autres !
si on ne prend pas la chose en considération, on ne jette pas un oeil. Comme dans Orange mécanique.
ça y est : hamlet à l’oignon.
On va pleurer dans les chaumières.
jusqu’à, dans l’idéal, une adaptation cinématographique.
ben non : c’est pour ceux qui ne lisent pas. On fait un film pour eux exprès.
et bien voilà une discussion qui cemmence à être intéressante, au lieu de nous sortir ces vieux marronniers « Nabokov est-il meilleur que Conrad ???? » « quelles est la meilleurs adaptation d’un roman? » blablabla
quelles sont les meilleures adaptations littéraires de film ?
et voilà ! là vous faites dans l’original au leiu de répéter toujours les mêmes trucs qu’on finirait par se croire dans un asile ou une maison de vieux !!!
j’ai toujours bien aimé le rôle de Nicholson dans « vol au dessus… » c’est pour ça que je me sacrifie à le jouer ici pour vous aider.
vous croyez que c’est drôle de finir lobotomisé ?
il aime Malraux, mais il a épousé la petite fille de Mauriac.
Quand on aime, on ne compte pas, me direz-vous à tort.
Un philosophe a l’avantage d’être clair lorsque le commun des mortels est confus. D’où l’avantage des philosophes : on quitte le surplace et on franchit des km.
La réponse à ta question se trouve dans mon Goût du cinéma, hamlet.
SALMAN RUSHDIE
Le film de ma vie
L’enfant de Bombay Salman Rushdie imaginait-il, lorsqu’il vit pour la première fois Le Magicien d’Oz, que ce film allait non seulement jouer un rôle prépondérant dans sa vocation d’écrivain, mais peut-être, aussi, lui montrer par anticipation ce que serait son propre destin ? Revenant quelques décennies plus tard sur ce film-culte, il en fera une analyse éblouissante, montrant qu’un de ses thèmes principaux est probablement l’exil, et que le seul foyer véritable est celui que chacun se fabrique. N’y a-t-il que dans les contes de fées que les vilaines sorcières acharnées à vous détruire peuvent être anéanties ? Les films, tels Le Magicien d’Oz, peuvent nous faire espérer, tout du moins, qu’il en est de même dans la vie !
Le petit garçon de dix ans qui a vu Le Magicien d’Oz au « Metro » de Bombay ne savait pas grand-chose des pays étrangers et ignorait tout de ce que grandir veut dire. En revanche, il en savait bien plus long sur le cinéma fantastique que tous les petits Occidentaux de son âge. A l’Ouest, ce film était une tentative loufoque pour réaliser une sorte de dessin animé à la Disney avec des acteurs en chair et en os, malgré les idées reçues d’une industrie cinématographique convaincue que les films fantastiques faisaient généralement un four. Il ne fait guère de doute que la décision de la MGM de sortir le grand jeu et de remuer ciel et terre pour un livre vieux de trente-neuf ans doit beaucoup à l’engouement pour Blanche Neige et les sept nains. […]
En Inde, il s’inscrivait pourtant dans ce qui était et demeure un des courants majeurs de la production cinématographique de « Bollywood ». […]
D’importantes différences séparaient le cinéma de Bombay d’un film comme Le Magicien d’Oz. Les bonnes fées et les méchantes sorcières avaient beau rappeler superficiellement les divinités et les démons du panthéon hindou, en réalité, un des aspects les plus frappants de la vision du monde du Magicien d’Oz est son caractère joyeusement et presque intégralement profane. La religion n’est évoquée qu’une fois dans le film. Tante Em, bégayant de colère contre la cruelle Miss Gulch, lui déclare que cela fait des années qu’elle attend de pouvoir lui dire ses quatre vérités mais que, parce qu’elle est « une bonne chrétienne », elle s’en abstiendra. Hormis cet instant où la charité chrétienne nous prive de quelques propos vieillots et bien sentis, le film est jovialement athée. Il n’y a pas trace de religion à Oz même ; on craint les mauvaises sorcières, on aime les bonnes, mais on n’en sanctifie aucune ; et alors même que l’on attribue au Magicien d’Oz une qualité très proche de la toute-puissance, personne ne songe à lui rendre un culte. Cette absence de valeurs supérieures accroît considérablement le charme du film et n’est pas étrangère au succès avec lequel il a su créer un monde où rien n’importe davantage que les amours, les tracas et les désirs d’êtres humains (et, cela va sans dire, d’êtres de fer-blanc, d’êtres de paille, de lions et de chiens).
L’autre différence majeure se définit plus malaisément parce que, tout bien considéré, il s’agit d’une question de qualité. La plupart des films hindis étaient et sont toujours ce qu’il faut bien appeler des navets. Le plaisir qu’ils vous procurent (et certains sont extrêmement agréables à regarder) se rapproche de celui qu’on éprouve à s’empiffrer de cochonneries. Le « Bombay talkie » classique exploite des scénarios d’un sentimentalisme atterrant et sombre tantôt dans le clinquant, tantôt dans le vulgaire et bien souvent dans les deux à la fois, tout en comptant sur la popularité de ses vedettes et des numéros musicaux pour apporter un peu de pep à l’ensemble. Il y a évidemment des vedettes et des numéros musicaux dans le Magicien d’Oz, mais c’est aussi, indéniablement, un Bon film. Il ajoute à la fantaisie de Bombay des critères de production élevés, mais ce n’est pas tout ; il possède quelque chose que l’on ne rencontre pas souvent au cinéma, quel qu’il soit. Appelez cela vérité d’imagination. Appelez cela (c’est le moment ou jamais de sortir vos revolvers) art. […]
La découverte du Magicien d’Oz a fait de moi un écrivain. Bien des années plus tard, j’ai commencé à imaginer la trame de ce qui allait devenir Haroun et la mer des histoires et j’ai été convaincu que si je pouvais trouver le ton juste, je devrais arriver à intéresser les adultes comme les enfants : ou, pour employer une formule chère aux publicitaires, « les jeunes de sept à soixante-dix-sept ans ». Le monde du livre est devenu une entreprise soumise à des catégorisations et à des catalogages draconiens, dans laquelle la littérature enfantine constitue une sorte de ghetto, subdivisé de surcroît en différentes classes d’âge. Le cinéma, en revanche, s’est généralement élevé au-dessus de ces segmentations. De Spielberg à Schwarzenegger, de Disney à Gilliam, il propose des films devant lesquels gamins et adultes s’asseyent côte à côte, unis par ce qu’ils regardent. […] Mais de tous ces films, c’est Le Magicien d’Oz qui m’a le plus aidé dans mes efforts pour trouver la voix d’Haroun. Ses traces sont du reste parfaitement visibles dans le texte ; on perçoit dans les compagnons d’Haroun des échos limpides des amis qui dansaient avec Dorothée le long de la Route de Briques Jaunes.
(« Le magicien d’Oz », traduit de l’anglais par Odile Demange
nouveau monde édition, 2002)
Adapté du livre de L.Frank Baum, Le Magicien d’Oz a été réalisé par Victor Fleming et est sorti aux USA en août 1939. Au début ce ne sera pas un franc succès, du fait principalement de la Seconde Guerre mondiale qui venait juste de commencer. Malgré tout, il sera distribué en Angleterre l’année suivante et connaîtra progressivement une audience internationale qui ira en s’amplifiant. Jusqu’à ce qu’il devienne un classique du cinéma, qui révéla au monde entier le talent exceptionnel de la toute jeune Judy Garland, dont on garde tous en souvenir l’émouvante interprétation de la chanson Over the rainbow. D’autant plus émouvant, que Judy Garland (1922-1969), qui épousa, entre autres, le cinéaste Vincente Minnelli et donnera naissance à leur fille Liza, connut par la suite un destin plutôt tragique. Elevée, dès la prime enfance, dans le sein d’Hollywood pour être une enfant star, elle tournera plusieurs chef-d’œuvres, dont l’inoubliable Une étoile est née (A star is born) de George Cukor en 1954, avant de sombrer définitivement dans l’alcool et les barbituriques, à l’instar de Marilyn Monroe.
De toute façon, littérature et cinéma sont deux arts dont les moyens sont très étrangers l’un à l’autre. Rose citait Tarkovski. Voilà justment un pur cinéaste, dont les images sont fascinantes mais n’ont rien à voir avec les moyens de la littérature. Delaporte cit Le Procès de Wells, qui vaut bien le roman de Kafka dans son genre mais les « trucs » du cinéaste sont très différents du roman de Kafka. Il est impossible de mettre une phrase de Proust en image. Et pourtant il y a bien chez Proust aussi tout un monde d’images mais elles fonctionnent avec des mots, pas avec une caméra. Tout le début par exemple avec l’espace de la pièce qui s’amplifie et dépossède le héros de son corps, prend la dimension d’un grande mère, sans différence avec son propre corps, trait psychotique par excellence, les mots le disent mais on ne peut pas le faire sentir avec une caméra. Et tant d’autres passages de Proust qui mettent en scène un corps morcelé comme dans la psychose.
pour revenir à cette interview, ce n’est pas le fait de sortir une liste d’écrivains comme on sort une liste des courses à faire au migros de rolle qui prouve quoi que ce soit.
au contraire c’est le genre de truc qui aurait dû rendre méfiant passou, je veux dire qui aurait du rendre passou méfiant.
alors que là il est tombé dans le panneau, et Godard question panneau il s’y connait le bougre, pour enfumer les gens il est pas tombé de la dernière pluie.
L’Étranger de Visconti, malgré son patronyme, n’est pas à la semelle du Camus. Il est lent et long et on ne réfléchit pas comme dans le livre : le texte parfois aide à penser. Plus que l’image qui réjouit la rétine plus que le cerveau.
d’ailleurs tous les réalisateurs sont des enfumeurs, les premièrs qu’ils enfument ce sont leurs acteurs.
et là, quand on lit cet interview il est évident que Godard nous raconte une histoire, avec des rebondissements et des temps forts : il nous fait un film !
et penser que de cette histoire qu’il nous raconte on pourrait en tirer quelques conclusions c’est un peu comme sauter par la fenêtre après avoir vu le dernier Batman.
À mon avis, hamlet aussi doit être un peu autiste.
Les grands cinéastes sont en général des écrivains ou des peintres ratés.
alors là jazzi pardon mille fois : je me suis faite iech au magicien d’oz autant qu’au peau d’âne de jacques demy. C’est d’un gnan-gnan ces deux films.
Parle-moi de Full metal Jacket. Ou de Barry Lyndon. C’est autre chose que les histoires cucul.
Tout le roman de Camus repose sur l’usage du passé composé. Il est impossible de mettre en image le passé composé, ni d trouver un équivalent image de cet usage si rmarquable du passé composé. On enlève le passé composé et le roman de Camus ressemble à un film de Henri Verneuil avec Gabin.
De toute façon, littérature et cinéma sont deux arts dont les moyens sont très étrangers l’un à l’autre
suis d’accord avec vous.
Aurai tendance à croire avec de gros préjugés que l’écrivain est un gros travailleur, forcené et -je ne sais quoi, un côté allumé- et le cinéaste un paresseux, indolent et faste mais sans doute est-ce aller vite en-besogne.
Non, Tarkovski nest pas un écrivain raté. C’est un inventeur d’images. L’Enfanc d’Yvan raconté donnerait un roman épique traditionnel. Tarkovski nous montre des images extraordinaires qui sont de la poésie pure.
qui aurait du passou, le rendre méfiant.
ah oui ; d’ailleurs c’est une histoire vraie, l’enfance d’Yvan, ai le synopsis mais pas sûre du tout qu’il y ait un livre au départ.
en bagnole aussi on peut croire qu’on décolle comme la voiture de batman ; je l’ai fait l’autre jour. Deux discutaient côte à côte. Quand ils eurent fini je leur dis je sors les ailes de Batman la prochaine fois. Ils m’ont crue. J’étais cuite. Obligée de faire comme si que.
rose, il ne s’agit pas de savoir si tu as aimé ou pas le Magicien d’Oz. Je répondais à l’affirmation d’hamlet qui disait qu’aucun film n’avait inspiré de livres.
« La découverte du Magicien d’Oz a fait de moi un écrivain. Bien des années plus tard, j’ai commencé à imaginer la trame de ce qui allait devenir Haroun et la mer des histoires l(…) de tous ces films, c’est Le Magicien d’Oz qui m’a le plus aidé dans mes efforts pour trouver la voix d’Haroun. » (Salman Rushdie)
Truffaut et Godard sont des écrivains ratés, WGG, et Fellini et Pialat des peintres de même… Bien sûr, ne généralisons pas, mais on pourrait en trouver un tas d’autres, Bresson, par exemple…
Le cinéma nest ni du théâtre filmé, ni de la peinture en mouvement ni de la littérature adaptée au monde de l’écran. Il a ses lois esthétiques propres, sa rhétorique, sa syntaxe. C’est un langage a part entière. L’adaptation d’un roman sra forcément autre chose, il ne peut en conserver que la trame. Mais c’est sa faiblesse parce que la trame du Voyage par exemple est très banale ; c’est le langage de Céline qui en fait tout autre chose.
Peut-être après tout, mais ça n’a aucune pertinence de parler comme ça. Ça ne dit rien de leur art qui est lui une réussite.
« Truffaut et Godard sont des écrivains ratés, WGG, et Fellini et Pialat des peintres de même… Bien sûr, ne généralisons pas, mais on pourrait en trouver un tas d’autres, Bresson, par exemple… »
Peut-être, mais ils ont trouvé leur voie dans le cinéma. Demandez-vous, Jacuzzi, ce que serait a contrario un « cinéaste raté » ?
Le cinéma, art ontologique né au XXe siècle, a bouleversé la donne des arts antiques précédents. On la vu avec Cocteau…
Il y a beaucoup d’écrivains « ratés » ou des peintres « ratés » qui n’ont pas changé de voie, et qui ont fini par s’imposer. Rien à voir avec les surdoués dont nous parlons.
C’est quoi un art ontologique ?
« ce que serait a contrario un « cinéaste raté » ? »
Un raté sur toute la ligne, Delaporte. « raté » n’est pas un jugement de valeur dans mon esprit, mais une façon de parler…
Art de synthèse, qui contient tous les autres arts : peinture, musique, théâtre, littérature, poésie, danse, architecture, mode… le cinéma est aussi un art ontologique, en ce sens, comme l’écrit Eric Rohmer, qu’il : « dit autre chose que les autres arts ne disent pas. »
L’art c’est qui perd gagne, a écrit Sartre. Godard n’avait pas de talent pour écrire mais en avait pour fabriquer des images et manipuler des images. Gœthe s’interrogeait dans sa jeunesse pour savoir s’il allait devenir peintre ou écrivain. Ira-t-on dire pour autant que c’est un peintre raté ? — Non.
C’est plutôt ça, Jazzi ! Mais cela n’en fait pas une ontologie, science de l’être. L’art n’est pas l’être, mais il en est le signe.
Hitler est un peintre raté, WGG !
« Un raté sur toute la ligne, Delaporte. »
Exact, ce qui semblerait démontrer que le cinéma est le dernier des métiers. En tout cas, il tend à le devenir. Presque pire que journaliste putride.
Hitler, oui, en effet ! Mais justement, ça n’a rien à voir avec le cinéma de Godard, qui n’est pas fondé sur le ressentiment.
L’art ne dit pas l’être, il « agit à la façon de la nature », comme l’écrit Flaubert. C’est très différent. C’est un mode d’être parallèle au monde, qui est en soi un monde.
D’ailleurs, ce n’est pas pour rien qu’il cite Novalis en premier. Les théories de la littérature de Novalis, c’est du Flaubert avant la lettre.
The Other Side Of This Life
https://www.youtube.com/watch?v=ltyjNjsz8UU
Novalis utilise pas mal de concept de la sophistique grecque qui renvoient non à l’être chez Platon mais à la rhétorique qui crée un monde. Le bouquin de Barbara Cassin sur la pensée sophistique qui place l’homme comme msure de tout chose, c’est-à-dire qui nie les prétntions de Platon d’atteindre jamais par la pensée le mond ds idées, et permet de mieux comprendre l’esthétique de Godard qui a plus à voir avec une « plastique » au sens sophistique du terme, dans la philosophie d’un Protagoras par exemple, qu’avec le monde de l’être et des Idées platoniciennes.
Bon nombre d’écrivains sont des « cinéastes ratés », WGG. A commencer par Sartre, mais aussi Genet, ou Giono, qui s’y est essayé. Le seul à avoir réussi les deux, c’est Marcel Pagnol.
Plastic Fantastic Lover
J.M.G. répond aussi à Hamlet dans son livre « Ballaciner ».
« En vérité, la question que je voudrais poser (à chaque réalisateur, mais elle se pose aussi pour le spectateur) est : pourquoi le film plutôt que le livre? On objectera que le choix ne se présente peut-être pas de façon aussi nette, qu’il s’agit de deux modes d’expression radicalement différents – pour ne pas dire à l’opposé l’un de l’autre. Pourtant, il a bien fallu prendre, au moment de passer de la rêverie, ou du désir, à l’accomplissement, une décision. Le cinéma s’inspire du roman, ou du poème (Godard part de Capitale de la douleur de Paul Eluard, Pasolini ou Bergman, des écrits du marquis de Sade, Fellini de Boccace). Les films ont souvent inspiré les romanciers ou les poètes, directement ou indirectement. Il y a du Chaplin dans le Plume de Henri Michaux, du Fritz Lang dans Aldous Huxley et du Huston dans Vernon Sullivan. […]
Donc, il faut choisir : écrire ou filmer ?
Certains ont fait les deux : Malraux est cinéaste et romancier. Colette s’y est essayée, Bergman oscille entre théâtre et cinéma, et plus récemment, c’est le cas du cinéaste coréen Lee Chang-dong. Lorsqu’on lui pose directement la question, ce dernier reconnaît que pour lui ç’a été avant tout une question d’efficacité. Le roman, le théâtre ont un public restreint. Par le cinéma, on touche plus de spectateurs, on a le sentiment d’être en prise directe. Cela a un sens lorsqu’on identifie la création à un combat (en vue de la justice, d’une réforme des institutions ou des mœurs). Mais est-ce vraiment la raison d’être de l’art ? »
Ce « ratage » leur a bien réussi en tout cas.
Je ne crois pas que l’artiste, de toute façon, puisse être autre chose qu’un raté. C’est le Cygne de Baudelaire, c’est l’Al.batros. C’est le saltimbanque de Baudelaire. Un marginal, un raté. C’est même le propre de la modernité.
Le Clezio…
Il y a aussi du Chaplin chez Kafka.
@la vie dans les bois dit: 17 mai 2018 à 16 h 52 min
Très bon papier.
Bravo !
la folle ambiance, quoi
Le Clezio, suite…
« En littérature, la liberté, c’est de s’adresser directement à la source des émotions, de la mémoire, de l’imagination, c’est-à-dire au langage. C’est peut-être là que se trouve la raison du choix dont je parlais plus haut. Le cinéma, c’est une autre façon de parler. Son langage est fait d’images, il ne s’adresse pas à la même partie du cerveau, il ne touche pas à la même mémoire, ne met pas en branle les mêmes mécanismes. Dans les livres, je trouve un envoûtement, comparable à celui du chant, ou de la musique. En même temps que je suis transporté par l’histoire, ou les histoires, ou les segments d’histoire qui me sont racontés, les mots déclenchent en moi une rêverie sur le langage. Je suis touché au plus profond par cette façon de dire, par l’accent, la texture, l’intimité de la personne qui m’invite à lire. Je sens le sarcasme, l’orgueil, l’odeur, la tendresse, la chaleur qui sont dans ces mots, et au même moment, je me souviens d’autres mots, d’autres chants. Cela jaillit d’une vie brillante, d’une vie inépuisable. […]
Ce que me donne le cinéma n’est pas moins personnel, pas moins profond. C’est différent. C’est une incantation. Une fascination. Le cinéma s’adresse à nos sens du réel, c’est-à-dire non seulement à nos stéréotypes, ou à notre mesure humaine du monde (ceci est un chapeau, ceci une femme, un enfant, ceci un vieillard, cela une scène d’amour, de poursuite, ou de douleur), mais à notre cénesthésie, à notre synesthésie. Le haut, le bas, la profondeur, le passé, le futur, le vrai, le dangereux, le répulsif, le douteux… Nous voilà donc transportés, déshabillés, enlevés, enchaînés, mais nous sommes au même instant libres, conscients, consentants – nous pouvons nous lever et claquer le strapontin, pousser la porte, sortir. C’est un état très particulier.
On dit du cinéma qu’il donne tour à tour, ou parfois simultanément, le rire et les larmes – c’étaient les deux masques du théâtre grec classique. Ce pouvoir dans les émotions contraires est sans doute ce qui définit le mieux cet art. »
(« Ballaciner », Editions Gallimard, 2007)
Bah, Chaloux de 20 h 50, disons que vous les trouvez telles, mes c…, comme vous dites. J’ai été la première, sur le fil précédent, à m’élever contre ceux qui voulaient enterrer Godard sur le champ, et à souligner que regarder ses films en les analysant un petit peu, pas simplement en les visitant comme on visite un monument du patrimoine, vous en apprend long sur la liberté de création. Mais l’interview de Pierre Assouline me donne aussi raison sur un autre point : c’est que Godard n’est pas né « ex nihilo », et que sa culture est plus que solide. Par contre, je réclame le droit de dire ce que je pense du boursouflé du personnage, avec ses caprices à la diva shootée à l’ennui. Godard devenu une sorte de Castafiore houellebecquienne, c’est une déchéance à mes yeux, mais vous n’êtes pas obligé d’être d’accord… Même si vous pouvez le dire sans employer un mot méprisant…
D’autant que, et même si derrière les caprices il n’y a pas de « pose » mais un réel désenchantement de vivre et de rencontrer autrui, Godard foule quand même au pied la plus élémentaire courtoisie. Or, s’il m’est arrivé parfois de rencontrer des gens un peu hors du commun, qui possédaient de la culture et du talent, j’ai constaté que les « vrais » sont généralement d’une parfaite simplicité, et surtout très respectueux d’autrui… Vous me direz que derrière les bougonneries infantiles de Godard il y a une sorte de fidélité à ce qui l’a construit, au refus de la compromission et au jusqu’au boutisme de l’homme intègre ? Oui, peut-être. Ou bien aussi les vapeurs de l’encensoir du succès, les cris autour de lui qui le qualifient de « génie » l’ont-ils enivré au point qu’entre la réalité et lui, s’établit désormais le fossé d’un orgueil démesuré ? Allez savoir ! En tout cas et en attente de plus amples informations, je préfère, par charité, mettre son impolitesse et ses « mises à l’épreuve » de ses visiteurs sur le compte de l’âge, et de ses vicissitudes. Ce qui ne m’empêche pas de dire « merci, Monsieur Godard », pour ce qu’il a apporté au cinéma – mais il n’a pas tiré la trappe derrière lui, vous savez, et certains cinéastes contemporains ont su tout aussi bien que lui ouvrir de nouvelles portes, laisser leur trace et influencer durablement des générations de jeunes gens sensibles. Des frères Cohen à Tarantino, de ce Nolan si méprisé à Jane Campion, le cinéma, tel le phénix, renaît toujours des cendres que d’aucuns sont si prêts à lui verser sur la tête…
Cela a un sens lorsqu’on identifie la création à un combat (en vue de la justice, d’une réforme des institutions ou des mœurs).
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Que de naïvetés !
Je trouve aussi que le cinéma est moins profond que la littérature mais il est capable de nous saisir d’effroi, ce dont la littérature est incapable.
« Le cinéma, c’est le damné du concret, c’est le forçat du réel. Il n’y a qu’en littérature qu’on voit des images ; au cinéma on ne voit que l’apparence et elle est irréfutable. Par-dessus le marché, au cinéma tout le monde voit la même chose alors qu’en littérature tout le monde voit des choses différentes, mais personne ne verra jamais ce que les lecteurs voient (il n’y a pas deux Anna Karénine semblables dans la tête de deux lecteurs assis côte à côte et lisant au même rythme). »
(Philippe Muray)
« Par-dessus le marché, au cinéma tout le monde voit la même chose.. » Murray cité par Pablo
Non. seulement si le film est mauvais et le cinéma considéré effectivement comme un « marché »
le seul à avoir réussi les deux, c’est Marcel Pagnol
oui mais ce sont des bluettes.
Pagnol n’ est pas Marcel Carné.
C’est du grand et bon cinéma populaire.
je cherche encore
Et la reine Margot avec Adjani ?
D’ un coup, on comprend toute l’ histoire, en // les intrigues de cour et en // les femmes sulfureuses éblouissantes. Cela fait beaucoup en une séance.
amais ce que les lecteurs voient (il n’y a pas deux Anna Karénine semblables dans la tête des spectateurs)
c’ est pour cela que c’ est redoudable : le résultat doit impérieusement correspondre à l’ attente d’ une multiplicité en étant dans l’ unicité. Drôle de boulot.
Comme lier une sauce, associer de multiples ingrédients en harmonisant les goûts pour le plaisir du palais.(le palais de la Méditerrañnée, pas laid).
C’est un boulot.
Puis, il y a les caprices des Stars.
a un sens lorsqu’on identifie la création à un combat
pourtant c’ est cela : convaincre et persuader.
Mais en un c’est vivre, non ? Avant toutes arguties.
saisir d’effroi, ce dont la littérature est incapable
ah : ai été saisie d’ effroi en littérature.
Clopine
je l’ ai compris aitrement ce qui vous est adressé.
Parce que là, on a la chance d’ établir un // à 20 ans d’ intervalle. Et il se montre étonnamment jeune d’ esprit Godard. Il joue le jeu de l’ interview.
On ne critique pas un moine qui se retire du monde.
Ce n’est pas forcément une posture. Ce peut être une méditation. Sans doute est il heureux à vivre avec sa troisième femme loin du star système. Qui sait ?
Drôle : je vois l’artiste comme un « réussi ». L’a sa montre Swatch.
pardon.
Il a osé exprimer ce qu’il a à dire à travers son art.
C’est très différent. C’est un mode d’être parallèle au monde, qui est en soi un monde.
C’est en tout cas le mode de vie qu’ils ont choisi de vivre. Lui dit je suis un marginal. Cela correspond. En marge.
bien sûr que cela n’a aucune importance le magicien d’oz ou pas. N’empêche que savoir le point de départ d’une vocation c’est stupéfiant.
Vous dites Magicien d’Oz, Versets sataniques, vous restez sur le q.
Chacun ses goûts, bienheureusement.
C’est intéressant ce point du déclic pour un artiste.
Je crois Clopine que c’est votre art du contre argument qui m’agace toujours un peu. Vous remarquerez qu’Assouline a accepté les épreuves, et qu’il a certainement passé une journée exceptionnelle (le fait de faire attendre fait très couvent bouddhiste). La simplicité consiste-t-elle à se laisser envahir par le premier venu? Quant à la parole de Godard, elle n’est pas l’équivalent de n’importe quelle parole. On n’y entre pas comme dans une conversation avec la boulangère du coin, c’est autre chose. Mais il est évident qu’il y là des points sur lesquels il nous serait impossible de nous comprendre.
qu’il y a…
Langoncet, indeed.
JL Godard, ambianceur.
Judy Garland and Toto :
https://blogfigures.blogspot.fr/2012/04/judy-garland-and-toto-on-set-of-wizard.html
Postcard :
8h03 chaloux, une différence d ‘essence ou un point dans les alpages que peu visitent. Faudrait-il vous comprendre dans le sens accepter vos contradictions intelligentes et si complexes que vous même à moins que vous taisiez une grille de lecture rare et chère (donc) n êtes pas en mesure de présenter une explication acceptable, logique, sensée, poursuivant un autre but que votre satisfaction qu’elle qu’en soit la méthode , le moyen. Les artistes sont vraisemblablement tous irrationnels et en tout ce qui sous tend l expression artistique.
Hamlet, j ai lu l interview hier soir et vos réactions, c est amusant car en le lisant j ai pensé que vous lui ressembliez dans cette façon logique un peu loufoque de poursuivre l argument jusqu’à la chute.
Lavie et Renato, levés en même temps pas du même lit, livrent sons et photographies de quoi refaire « La jetée » de Marker, chef d’oeuvre pour cinéphiles idéologiques. Les sources de l’inimitié Godard Berri sont plus claires mais aussi infilmables qu’inflammables aujourd’hui.
pourquoi on n’a jamais tiré aucun livre d’un film
Il y a Tous les matins du monde, qui au départ était un scénario de film et dont Quignard a finalement tiré un roman, adapté dans la foulée par Alain Corneau, si bien que les deux sont étroitement imbriqués dans leur processus de création. Le film est la retranscription du livre, et réciproquement, le livre s’est écrit en vue de sa propre adaptation. Un cas assez étrange… Mais il doit y en avoir d’autres.
Et puis il y a le cas de Céline, revendiquant l’influence du cinéma
» Je crois que je ne dois rien à aucun écrivain. Ce qui m’a influencé, c’est le cinéma. Ah ! ça, le cinéma, je le connais. Le music-hall aussi et puis les journaux, les journaux illustrés principalement. Au fond, mon livre, c’est, en bien des endroits, une sorte de reportage comme on en trouve dans les magazines.
Et même, est-ce bien du reportage ? Les souvenirs des choses que j’ai vues dans ma vie ne comptent pas tant que cela. Ce ne sont que des points de départ, des prétextes qui me fournissent l’occasion de noter mes rêves. Car si la littérature a une excuse (je crois bien d’ailleurs que nous arrivons à la fin de la littérature ; mais après tout, peut-être ai-je tort de vous dire cela ; quand on a eu quelque succès dans un genre, on est toujours tenté de croire que ce genre-là va disparaître parce qu’on voudrait se persuader qu’on a été un des seuls à y réussir) ; si la littérature donc a une excuse, c’est de raconter nos délires. Le délire, il n’y a que cela et notre grand maître actuellement à tous, c’est Freud. Peut-être, si vous tenez absolument à me trouver d’autres influences plus littéraires, peut-être que vous pourriez indiquer les livres de Barbusse. »
Interview avec Charles Chassé, La Dépêche de Brest et de l’Ouest, n°18187, 11 octobre 1933.
Tout ça pour montrer à Hamlet que son affirmation était loin d’être juste.
rose, je te trouve bien ingrate, d’autant plus que Marseillaise, vis à vis de Pagnol dont l’influence se retrouve chez un Guédiguian, entre autres !
Tout à fait d’accord avec Phil contre Murray. Pourquoi verrions nous tous le même film ! Il n’y a qu’à lire les critiques…
(je crois bien d’ailleurs que nous arrivons à la fin de la littérature ; mais après tout, peut-être ai-je tort de vous dire cela ; quand on a eu quelque succès dans un genre, on est toujours tenté de croire que ce genre-là va disparaître parce qu’on voudrait se persuader qu’on a été un des seuls à y réussir)
Remplacez littérature par cinéma et Céline par Godard !
Michel, je suis passé comme ça. Libre à vous comme à Godard de dire que Nabokov n’est pas un très grand romancier. En réalité, les deux adaptations au cinéma de « Lolita » ne m’ont pas beaucoup intéressé, il y manque notamment le plus étrange, la mort de la mère. Et surtout, même si j’admire « Lolita », « Pnine », »Ada »…, c’est « Pale Fire / Feu pâle » que de loin je préfère, les correspondances entre le poème et le grotesque cheminant de la seconde partie, qui auraient dû pourtant vous plaire.
« Le cinéma a annoncé les camps de concentration, rappelez-vous La règle du jeu, Le dictateur… Mais il ne les a pas montrés. C’est la littérature qui l’a fait. Le cinéma a manqué à son devoir, il a failli à sa mission. »
Affirmation péremptoire mais non moins sûre également. Qui pourrait adapter au cinéma « Les Bienveillantes » de Jonathan Littell ?
@ 9.14 jean, pourquoi avoir changé de pseudo pour ce ridicule l-f. lévy ? Aviez-vous eu honte de vos derniers propos ? Je vous signale que simone de beauvoir revient à la mode.
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@ « On ne critique pas un moine qui se retire du monde ».
Si… y compris un moine mahométan perclus en Suisse. C’est toujours un peu suspect d’ailleurs, surtout quand on fait lanterner les gens qui viennent vous voir. Un autre Jean ne s’en était d’ailleurs guère privé, souvenez-vous de la fable :
(Les Levantins en leur légende
Disent qu’un certain rat, las des soins d’ici-bas,
Dans un fromage de Hollande
Se retira loin du tracas.
La solitude était profonde,
S’étendant partout à la ronde.
Notre ermite nouveau subsistait là dedans.
Il fit tant, de pieds et de dents,
Qu’en peu de jours il eut au fond de l’ermitage
Le vivre et le couvert ; que faut-il davantage ?
Il devint gros et gras
: Dieu prodigue ses biens
À ceux qui font vœu d’être siens.
Un jour, au dévot personnage,
Des députés du peuple rat
S’en vinrent demander quelque aumône légère :
Ils allaient en terre étrangère
Chercher quelque secours contre le peuple chat ;
Ratopolis était bloquée :
On les avait contraints de partir sans argent,
Attendu l’état indigent
De la république attaquée.
Ils demandaient fort peu, certains que le secours
Serait prêt dans quatre ou cinq jours.
« Mes amis, dit le solitaire,
Les choses d’ici-bas ne
me regardent plus:
En quoi peut un pauvre reclus
Vous assister ? Que peut-il faire
Que de prier le ciel qu’il vous aide en ceci ?
J’espère qu’il aura de
vous quelque souci. »
Ayant parlé de la sorte,
Le nouveau saint ferma sa porte.
Que désignai-je, à votre avis,
Par ce rat si peu secourable ?
Un moine ? Non, mais un dervis :
Je suppose qu’un moine est toujours charitable).
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Aujourd’hui, maman n’est pas encore morte. Elle a juste 87 ans. Mais tu ne le sais pas, maman, car tu es totalement perdue dans la trajectoire humaine de notre temps. Tu ne sais plus où est ton âge mentalisé, ce qui m’effraie, bien sûr, mais je suis au moins sûr que ce n’est pas ton réel souci.
Je t’aime, ma puce. Porte toi bien dans ton monde, tes nouveaux médicaments devraient réduire tes hallucinations visuelles et te calmer. Tu vas voir, cela va bien se passer, aujourd’hui.
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Bonjour à toussent des rdliens qui avez la chance de vous reprérer dans le passé, le présent et le futur du présent. Bonjour aussi au duc de Bilhoreau : il parait qu’aujourd’hui, une fête royale se prépare de par le monde. J’espère que vous en êtes heureux pour la Ristocratie en général et la Roture en particulier.
« Transport z raje » (Transport vers le paradis), film tchèque de 1965 a très bien montré les camps de concentration. « La règle du jeu » annonce aussi peu les camps que « M le Maudit » préfigure Goebbels et les nazis. Ce sont des critiques exaltés comme Siegfried Kracauer qui ont fait abusivement du cinéma à rebours. Godard dans sa conférence de Cannes smartphonée a de nouveau dénoncé la déferlante des images numériques dénuées de montage et sans réflexion.
Cadeau. Cas, rare, d’un film qui vaut bien le livre dont il s’inspire…
https://www.youtube.com/watch?v=UaIXUXdYthA
Hier, j’ai trouvé qu’Dddy Belleguelle s’était assagi pour présenter son dernier livre. Il était un brin ridicule de se prêter au jeu des Q/R au piano. Mais il faut bien convenir qu’il a fini par être broyé par la machine à récupération, comme tous les autres. J’avais déjà rien lu de ce garçon blond cendré, comme de christine angot, raison de plus pour persister. Une qui m’a scotché, c’est l’infirmière de chez P.O.L, Marie Dorsan (?)…, quelqu’un sait-il quoi en penser ?
(Excusez-moi, je sais que le sujet est Godard, mais il n’arrive pas à m’intéresser. Passons notre chemin, et j’hallons bosser au jardin).
https://lejournal.cnrs.fr/articles/mai-68-la-science-saffiche
ci-joint,… le CNRS en 1968, vu par Pierre Papon.
CP ,bien d’accord, « Feu pâle » est un des plus beaux textes de Nabokov.A lire et relire. et « Pnine », n’est pas mal non plus , avec un côté du personnage Jacques Tati dans la séquence des bruits de tuyauteries chez sa logeuse .
Dites, vu que je l’insupporte, ce serait mal placé de ma part de le lui souhaiter, m’enfin c’est l’anniversaire de Paul Edel aujourd’hui.
Chaloux, je ne sais si je « contre-argumente », en tout cas il y a quelque chose, chez moi, qui réagit toujours quand on me dit « ça, vous ne pouvez pas le comprendre », que je traduis (j’espère à tort ?) par « nous ne sommes pas du même monde », ou pire encore « on ne mélange pas les torchons et les serviettes ». Or, j’ai beau effectivement avoir beaucoup du torchon, j’estime cependant pouvoir soutenir une discussion, sans qu’on m’esquive ou qu’on mette à la poubelle mes arguments non à cause d’eux-mêmes, mais à cause de leur provenance, c’est-à-dire, mon dieu, mon pauvre moi.
D’autant que le cas Godard pourrait servir de socle à une réflexion qui, en fait, englobe aussi certains participants de ce blog. La vénération, et/ou l’orgueil, et/ou la préservation de soi : jusqu’où et comment s’arrête-t-elle ? Rose (je crois que c’est Rose) dit qu’il faut accepter le retrait monastique. Certes, mais dans ces conditions, pourquoi accepter un rendez-vous, puis faire volte-face, puis imposer une sorte de rite initiatique, etc. ? Je ne crois pas que les « moines retirés » fassent autant de manières… Il y a là quelque chose qui, à mon sens, appartient à la même problématique que certains trolls ou certains participants qui pratiquent la technique des mains coupées. Plutôt que de voir leur domaine de prédilection « souillé » par des illégitimes, ils sont prêts à manier la hache pour empêcher qu’une autre parole que la leur ne pénètre dans le canot…
C’est psychologiquement intéressant, et un peu pathétique, en vrai.
Janssen, il présentait son livre où, Edouard Louis ? A la télé ?
Nabokov est non seulement un grand écrivain (et un grand écrivain dans 2 langues, comme Beckett), c’est aussi un fabuleux épistolier (Lettres à Vera).
Heureux ceux qui ont lu Lolita dans le texte, un bout de paradis de la langue anglaise leur appartient
« (…) how eventually I might blackmail — no, that it too strong a word — mauvemail big Haze into letting me consort with the little Haze by gently threatening the poor doting Big Dove with desertion… »
“It was love at first sight, at last sight, at ever and ever sight.”
et l’inégalable:
« Lolita, light of my life, fire of my loins. My sin, my soul. »
Lettres à Vera, extrait:
“You came into my life-not as one comes to visit (you know, “not taking one’s hat off”) but as one comes to a kingdom where all the rivers have been waiting for your reflection, all the roads, for your steps.”
@10.56, ah J.P. et Paul Edel, que vous me faites plaisir dans votre hommage à Feu Pâle ? Vous sauvez l’honneur de Nabokov, prétendument romancier de seconde zone, par lce brutal de godard. Mais comment peut-on lui accorder crédit. Donc Feu Pâle, voici ma fiche de lecture du journal d’un amateur que je revois comme quasi tétanisé tout en étant subjugé. J’ai raconté ce roman à mon cercle, mais n’ai pas su les convaincre. Trop difficile, ont-ils pensé.
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(journal des lectures, 2016 ? – Comment raconter Feu Pâle, ce roman éblouissant, d’une complexité de construction abyssale ? Il y a plusieurs niveaux de lecture que je n’ai pas forcément saisis sur le moment, mais mieux perceptibles à la lecture de la préface (après coup). 1 – Le plus simple, c’est de suivre ce que raconte le personnage de Ch. Kinbote qui a réussi à se voir confier la publication par son ami le poète J. Shade, Feu pâle, un poème inachevé de 999 vers qu’on peut lire d’une seule traite au début, mais dont ne peut comprendre grand-chose. A ceci près qu’il évoque des rêveries crépusculaires liées aux sensations et réminiscences quotidiennes, des souvenirs liés à la mémoire de sa fille morte dans un stupide accident. 2 – Kinbote a entrepris de commenter le poème pour expliquer et décortiquer aux lecteurs ses intentions et son contenu, mais d’une manière très orientée. Car il met constamment l’accent sur des événements communs, entendant retrouver les traces et ses propres suggestions dans le poème. Car il a passé son dernier été à espionner les faits et gestes du vieillard en manque d’alcool pour espérer voir retranscrits dans son poème tous les aliments d’inspiration qu’il lui a sans cesse fournis à ce moment-là. Ce matériau est en effet mille fois plus intéressant que la vie triste, banale, conformiste et sans intérêt de Shade, toujours sous la coupe d’une épouse tyrannique qui, veillant au grain, se méfie de l’amitié intéressée de Kinbote. 3 – Le troisième niveau est lié aux histoires imaginaires ou réelles (on ne le sait pas d’emblée) de Kinbote qui raconte la progression des aventures d’un jeune roi exilé de Zembla, persécuté par les services secrets de son royaume pour l’obliger à assurer sa descendance, alors qu’il n’a toujours été attiré que par les garçons et les plaisirs sodomitiques. Or, ce que Kinbote raconte de sa vie privée est celle d’un pédéraste (sic) rêvant de garçons fleurs d’Arcadie, exclusivement entouré d’éphèbes et de mâles, sans compter une réjouissante misogynie. 4 – Evidemment, on se dit rapidement que ce jeune roi exilé pourrait bien être Kinbote lui-même, sur les traces duquel une espèce de tueur à gage, un robot analphabète du nom de Gracchus tout droit sorti d’un asile d’aliénés, aurait été chargé de le buter. Finalement, Kinbote, lui-même complètement ravagé par ses chimères d’identification paranoïaques à Shade survit in extremis à l’assassinat du tueur, qui n’aurait évidemment fait que se tromper de cible »).
Je laisse maintenant aux spécialistes, PE et C.P. à leurs interprétations, moi je m’en tiens au seul plaisir de la lecture rétrospective de mes notes, faute de …
1.27 très juste, c’est l’insupposrtable défense du « pré carré ». Mais pourquoi en faire un drame ? Moi, je vous ressemble beaucoup, vous le savez, mais je préfèrerais mourir plutôt que de le reconnaître. C’est pourquoi, je préfère me distancier drastiquement de vous, comme tout le monde icite, et vous décrire comme insupportable, en espérant que vous pourriez le devenir un peu moins. Peine perdue.
Oui, Edouard Louis, c’était hier soir à l’émission LGL de Busnel sur la 5, ça doit pouvoir se retrouver sur la toile, je pense.
Message précédent dédié à CT de 11.27 et 11.29.
Les anniversaires ça ne sert strictement à rien; je n’en souhaite aucun. Il n’y a rien de plus désolant qu’une fête d’anniversaire. Accepter que soit fêté son anniversaire relève d’un comportement égocentrique que les parents ne devraient pas inculquer à leurs enfants sous prétexte de leur faire plaisir. Les cadeaux ne devraient correspondre qu’à de grands événements de leur vie : communion, confirmation, Bar Mitzva, obtention d’un diplôme, entrée à l’école primaire, au collège, au Lycée, Noël et Pâques à condition d’avoir été à la messe et éventuellement la fête d’entrée au ciel de leur saint patron.
faut pas oublier le cadeau à la fin du ramadan, dédé. vendredi, raviolis aux sardines.
« Janssen, il présentait son livre où, Edouard Louis ? A la télé ? »
Hier jeudi, dans le supplément littéraire du Figaro, le livre de Louis a été descendu en flammes. Quand la presse putride de droite règle ses comptes…
Tu l’as lu, Clopine ?
D’autant plus, D., que tout le mérite de nos naissances revient à nos mères et à la graine de nos pères !
Pour Edouard Louis sur la Grande Librairie, c’est ici, mais il faut se taper la publicité !
https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/saison-10/511197-qui-a-tue-mon-pere-le-nouveau-livre-d-edouard-louis.html
Le « traître » à sa classe s’en fait le premier défenseur…
Gérard Genette ce matin par Enthoven…
https://www.facebook.com/ehess.cral/posts/1271670546297099:0
D, 12h50/ une rigueur qui j espère ne s attarde pas dans le rayon de l’avarice. Les anniversaires sont aussi une occasion de rappeler des sentiments sincères â ses enfants qui sont contents aussi d avoir la permission d’organiser une fête et d inviter leurs amis(es). Bien sûr il faut récompenser l’effort et ne pas oublier la gratuité .
Janssen, un « drame », vraiment ? Non, ce serait bien exagéré… Mais si nous nous taisons, nous entretenons le système, non ? Beauvoir dit « il est peu de vertu plus triste que la résignation » , et le mouvement « metoo » démontre triomphalement que la parole mise au jour et le collectif arrivent à faire bouger les lignes. Alors, si mes gémissements, appelons ça comme ça pour éviter le côté « dramatique » que vous y voyez, arrive à empêcher, ne serait-ce qu’une seconde, la danse en rond des propriétaires, et les fait réfléchir ne serait-ce qu’une seconde à ce qui alimente vraiment leur répulsion à mon égard, je n’aurais pas tout-à-fait perdu mon temps ici, non ? Et si oui tout de même… Eh bien, disons que cela me regarde…
Jazzi, tu parles bien de « qui as tué mon père ? » Eh bien, la médiathèque va m’appeler dès qu’il sera disponible (je suis prioritaire, ahaha !)
Jazzi, nous ne devons nos vies qu’à Dieu.
Les parents ne font que coupler plus ou moins bestialement. Le jour de la copulation a une forte influence sur la destinée des enfants. Par exemple des études ont montré que ceux conçus un vendredi saint sadonnaient aux vices et devenaient criminels. Ceux conçus le même vendredi saint entre 12h et 15 heures solaires forment la plus grande part des grands criminels éternellement damnés.
Clopine, Qui a tué mon père _ . Sinon parcourant Le Monde du week-end celui-ci donne un article qui démontre nos engagements écologiques, il n y aura pas de Palme d’or cette année sans huile de palme. Clopine, êtes vous certaine que la résignation soit une vertu?
Bérénice, vous me contredisez à tort. Ce que vous dites n’a ni queue ni tête comme bien souvent hélas.
n y aura pas de Palme d’or cette année sans huile de palme.
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N’importe quoi. Vous me faites honte.
Pour s’ébrouer de Godard, il faut lire l’interview de Lebris dans Télérama ; un hymne à la littérature, et à la vie.
Phil dit: 18 mai 2018 à 13 h 12 min
faut pas oublier le cadeau à la fin du ramadan, dédé. vendredi, raviolis aux sardines.
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Tout à fait, Phil. Cela est de bon sens et bonne convenance.
bérénice, j’ai toujours eu pour le mot et la chose la plus grande réticence. Beauvoir l’emploie parce qu’à son époque, c’était ce qui était proposé, prôné, aux femmes : et je crois bien qu’elle a écrit les trois nouvelles de « la femme rompue » pour mettre à jour les effroyables mécanismes, dans trois cas symptomatiques, des femmes résignées… (« l’intellectuelle vieillie », la femme rendue folle de rage, et l’épouse exemplaire mais trahie et quittée).
Je crois d’ailleurs que même en m’y appliquant, je n’arriverai jamais à être une femme résignée, sinon à la mort, bien sûr. Mais aux autres ? Jamais.
Pitié, non? Honte , pourquoi, on ne se connait pas et je ne risque que de très loin d entraîner votre réputation vers le gouffre béant de ma vacuité . Ainsi donc vous me témoignez un intérêt , à moins que vous soyez soucieux . Je vous assure D , que tous ces beaux discours ressemblent à des embryons de volonté politique à moins que on puisse les assimiler à une discipline artistique, l état du monde et sa gestion me désespèrent.
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