
Inclassable et paradoxal, Vladimir Jankélévitch
Comment une pensée radicale peut-elle se déployer chez un intellectuel sans qu’il renonce à la nuance et à la complexité ? Vladimir Jankélévitch (1903-1985) a réussi cet exploit. Un cas d’école que ce grand philosophe qui parvint dans le même temps à demeurer actuel sans jamais cesser d’être inactuel. Intitulé « Vladimir Jankélévitch, penser la vie », un documentaire de Fabrice Gardel et Mathieu Weschler rend justice tant à sa vie qu’à son œuvre, qui est diffusé ce lundi à 20.30 sur LCP (puis en replay) à l’occasion des 40 ans de sa disparition, diffusion suivie d’un débat.
Titulaire de la chaire de philosophie morale à la Sorbonne de 1952 à 1979, cet esprit gouverné par l’urgence d’écrire, d’une langue toujours fine et précise qu’il s’agisse de ses thèmes de prédilection (la mort, le mensonge, la mauvaise conscience, l’irréversible, l’ineffable, la nostalgie, le Mal, l’ironie , le pur, l’impur…) ou de la musique, il a tenu tout au long du siècle une place singulière dans le débat intellectuel et, partant, dans l’histoire des idées. Il tenait que sans la philosophie, le monde serait une statue sans âme. Par sa capacité à être pleinement de son temps tout en mettant l’époque à distance, il n’a jamais cessé de se situer en marge et dans les à-côtés quitte à se retrouver en porte-à-faux avec son temps. Question de personnalité, de caractère, de tempérament : indépendant, libre, pourfendeur des tendances dominantes dans l’université (marxisme, existentialisme, structuralisme), il tint dur comme fer que la clef de la morale est dans l’action et non dans le discours.Toutes choses que l’on retrouve dans »Un été avec Vladimir Jankélévicth », podcast confié à la philosophe Cynthia Fleury.
Une forte morale de l’action l’a gouverné tout au long de sa vie. On n’est pas philosophe lorsqu’on se répand en conférences au cours desquelles « on s’engage à s’engager ». Suivez le regard de cet antisartrien absolu. D’où une certaine solitude dans son milieu. Il n’en demeura pas moins un contemporain par ses actes. La guerre et la Résistance, bien sûr, puis sa signature au bas d’innombrables pétitions, et surtout la parution retentissante de son article « L’Imprescriptible » dans Le Monde au début de 1965, quelques jours après l’adoption d’une loi « tendant à constater l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité par leur nature », aussi éternelle qu’un numéro tatoué sur l’avant-bras. A ses yeux, les crimes contre l’humanité entrainant une rupture de civilisation, le pardon est mort dans les camps de la mort. Mais lorsqu’il prit la parole en uniforme FFI au moment de la libération de Toulouse, lors d’un discours enflammé sur la place de Capitole, il traita les Allemands de … « polissons » !
Après 1945, il fit le choix de ne plus jamais parler allemand, d’exclure toute partition d’un compositeur allemand de sa riche musicothèque à commencer par celles de Wagner « le teuton par excellence », de ne plus lire d’œuvres d’écrivains, de poètes, de philosophes allemands alors qu’avant-guerre, cette culture-là irriguait sa pensée (il avait même consacré sa thèse à « L’Odyssée de la conscience chez Schelling » !). Il responsabilisait tout le peuple allemand et tenait leur culpabilité collective comme inexpiable. En 1983 encore, il disait encore l’Allemagne « pétrie de nazisme ». Ni oubli, ni pardon, ni prescription. De l’après-guerre à sa mort, il réserva son clavier quotidien à Fauré, Ravel, Satie, Debussy… Lui qui avait appris le piano dans une famille musicienne « par imprégnation », lorsqu’il en jouait, c’est-à-dire tous les jours, il disait respirer dans un état dans un complet état d’innocence. La musique comme remède à l’ennui. Il aurait goûté la lecture de l’enquête de Caroline Piketty retraçant dans Harmonies volées (250 pages, 19,90 euros, l’Archipel) le destin des 8000 pianos spoliés par l’occupant, dont le sien (ici un extrait).
Le documentaire qui lui est consacré recèle tant d’archives d’époque sur l’impact de son œuvre et la réception de sa parole par les étudiants qu’on le croirait réalisé dans les années 60 n’eussent été de savoureux extraits d’un mémorable numéro d’ « Apostrophes » en 1980 qui le révéla au grand public à la faveur d’un je-ne-sais-quoi et d’un presque-rien, et des témoignages des philosophes Cynthia Fleury et Sophie Nordmann, de l’historien Pascal Ory, du compositeur Karol Beffa, du pianiste André Manoukian, de sa biographe et amie Françoise Schwab, sans oublier, le plus inattendu, Wiard Raveling, un enseignant allemand qui avait réussi par ses lettres à creuser une faille dans son mur du refus.
Malicieux, inclassable, paradoxal, mèche rebelle et timbre de fausset, cultivant sa passion de la légèreté, de l’équivoque, du paradoxe sans que ce ne soit jamais gratuit, causeur d’un humour infatigable, orateur d’un charisme sans égal parmi les professeurs, il éblouissait. Toujours aussi absolutiste et intransigeant, le grand âge le fit (un peu) économe de ses colères. Toujours à gauche, jamais marxiste, cosmopolite à coup sûr mais certainement pas européen tant l’esprit, le sentiment, l’homme européens lui paraissaient être des notions absurdes, il admirait chez les historiens leur culte des faits, se réjouissant chaque fois que l’expérience historique et l’exercice philosophique s’interpénétraient. A la fin de sa vie, il demeurait fidèle à un conseil que lui avait prodigué son maitre Bergson avec qui il noua des liens d’amitié entre les deux guerres :
« N’écoutez pas ce qu’ils disent, regardez ce qu’ils font ».
(« Vladimir Jankélévitch à la Sorbonne , 1970 » photo Mali : idem 1932, photo D.R. ; idem 1976, photo D.R.)
620 Réponses pour Inclassable et paradoxal, Vladimir Jankélévitch
Vedo
Magnifique.
Et cela fait une hampe florale très haute.
Merci.
le temps qui passe n’a pas – fort heureusement – pour seul effet de faire le lit de la nostalgie
3j je crois que tu ne m’as pas bien compris : quand je dis que la popularité de Trump grimpe en flèche (cf les derniers sondages) c’est parce qu’il met un coup de pied au cul à tous les mecs et les meufs qui te ressemblent.
puck dit: 4 juin 2025 à 19h53
Encore une fois, tout ce qui écrit ici PPPPPPPP (Puck la Pathétique Pute Pétomane Pro-nazie Payée Par Poutine) est totalement faux, systématiquement faux:
La popularité de Trump « grimpe en flèche » de 42,9 % à 44,3 % alors qu’elle a été à 50,7 %.
Cote de popularité de Trump durant son deuxième mandat
Depuis son investiture, le 20 janvier 2025.
Trump est le président américain le plus impopulaire depuis l’après-guerre
fr.statista.com/
On y va pck sur internet, la fille a trouvé « le meilleur aïoli de Marseille ». C’est vendredi saint, elle honore sa mère, puisque c’est sa manière de faire. Elles ne se garent pas trop loin et remontent qq ruelles avant de déboucher sur la Vieille Charité.
Quelles accointances ont-ils avec les algorithmes pour se décrocher un avis pareil ?
La morue c’est du loup, ou du cabillaud, les haricots plats du chou kale, les carottes du radis chinois, etc.
Elles mangent sans se plaindre. Parce que les deux ne se plaignent jamais. La mère pleure parfois. Il est écrit dépressive sur son dossier médical. État suscité par ses trois gniards depuis la mort de l’homme qu’elle a follement aimé en ne dérogeant jamais. Deux pilleurs et la combattante à la ceinture bourrée d’explosifs.
Un dessert au titre pompeux et a la réalité contraignante.
Elles repartent direct a la voiture. Airbnb a déjà colonisé l’espace. Les gens ont besoin de retour au bonheur, vivent hantes par la nostalgie des instants passés, alors que c’était terrifiant.
Alors, elles passent le sas de sécurité, contrôle des sacs et prennent un billet. L’entrée est gratuite puisque c’est la passation entre deux expositions. Elles tournent en fer à cheval. À l’arrière de l’hôpital, de la chapelle, un banc plein soleil. La mère s’asseoit et voudrait ne plus partir. La fille l’arrache, au banc, au soleil. Elles rentrent. Dans les toilettes, l’eau coule à flots, tout le monde s’en fout. À droite, à droite, à gauche, la voiture est là. Elle va lui faire longer la mer. Elle empile les bons moments. Zéro nostalgie. Zéro regrets.
La Vieille Charité quittée.
Trump est une brute. La plus parfaite horreur.
Un jour, quelqu’un, son factotum, un groom, dira-t-il » c’était un brave type ? »
Pour nous changer du sale mec.
Je ne sais pas si Stromae a compris le parfait hiatus.
À Barcelone, 70 artistes refusent de participer à tel gala, en refus du soutien à Israël.
L’immense organisation autour du spectacle, les centaines de techniciens. Les milliers d’euros. L’exaltation des gens qui s’en mettent plein les oreilles, cette foule compacte. Du grand désert de Sonacotra, de Sonora, de terracotta, ils boivent, se shootent, baisent, dans la boue, Rivka, se déglinguent.
Je ne sais pas si Stromae.
Pas sa femme, qui fait dans les chaussettes, mais les autres, celles de Julien Doré, de Fabrice Luchini, de Ousmane Dembélé, Loïs Boisson »je ne regarde pas trop (?) le foot », de 168ème au quart de finale sur les courts, toutes, les femmes de, vivent cachées, si ce n’est voilées. Voilà.
Vedo,
Ils vivent comme ça les jeunes connectés sur chatgpt. Albert Moubecker (?)(juif, ou arabe, libanais ?) dit qu’il fonctionne, ce robot, sur le mode W.E.I.R.D.
Pour les plantes, cela ne doit pas avoir trop d’importance.
Je croyais que l’on se mettait sur LENS ou bien flaschait un QR code et que l’on lisait la réponse clash, cash.
Vedo,
Dove ?
Me suis garée au-dessus du musée archéologique, dans une grande pompe à essence. Le soir tard, j’aurais fait l’essence. Qu’elle ne te dise pas je ne roule plus quand même. Petite place , toute petite, entre des arbres. Plus personne. Ni à la boutique. Ni à la pompe. Ce n’ est pas le premier mai, pourtant. A longé le musée archéologique, pris le trottoir de droite et descendu vers la mer. Bien plus loin, sur la gauche, de gros oliviers multi centenaires, justement, et en arrière-plan d’iceuxlà, les temples qui se découpent sur le ciel bleu de janvier.
Certes.
Plus tard, faudra passer sous un tunnel pour pénétrer dans la vallée.
Longer et encore et plus loin.
Au bout, faudra revenir en longeant la mer mais en la surplombant d’assez loin, contrairement à Sélinonte.
Des centaines de familles. C’est le premier dimanche du mois, l’entrée est gratuite dans les musées. Des enfants, et encore.
Puis, tout le retour, avec le soleil qui va plonger dans la mer Méditerranée. Chacun attend qu’il touche l’eau. Et il plonge, finito la lumière du jour. D.va encore nous faire peur avec ses sorcières.
Certes.
Pour un bonheur pareil.
34, c’est chez moi.
Agave americana.10, 30 ans, fleurit, meurt. Mais s’est beaucoup reproduite entre temps. Des pousses partout autour d’elle. Mexique, Espagne aussi, plus pâle que les aloe vera.
Aloys Zötl, Gepard, 7 April 1837
https://lesempio.blogspot.com/2011/04/aloys-zotl-gepard-7-april-1837.html
« Elles mangent sans se plaindre. Parce que les deux ne se plaignent jamais. La mère pleure parfois. Il est écrit dépressive sur son dossier médical. »
C’est beau comme du Duras, rose.
Un extrait de « Des journées entières dans les Ehpad » ?
gepard
Belle bête austro-hongroise
Labro était un peu causeur, tropisme de cette génération qui a pu jouer sans vergogne les couteaux suisses dans les médias français, idem Jean-Claude Carrière. Voilà pour les hommages sur le prestigieux blog à passou.
@ »Trump est une brute. La plus parfaite horreur.
Un jour, quelqu’un, son factotum, un groom, dira-t-il » c’était un brave type ? » »
une des facette du complotisme est de s’opposer à ce qu’on pourrait appeler la machine qui fabrique des évidences.
c’est un peu différent de la propagande sauf que l’objectif est aussi de faire en sorte que tout le monde adhère à ces idées et finissent par penser la même chose, même si ces choses sont démenties par une autre évidence : celle de la réalité.
on le voit avec l’Ukraine comme dans la phrase de pedro : l’Ukraine fait…
il y a eu un long article de 3 pages dans le NY Times qui explique la façon dont les ukrainiens sont pilotés par l’otan.
l’otan désigne les cibles et fournit les moyens de les atteindre.
cet article montre la façon dont les ukrainien vonjt dans une base américaine située en Allemagne prendre les consignes de ce qu’ils doivent faire.
même l’incursion des ukrainiens à Koursk n’était pas une initiative ukrainienne : le but de l’otan était de s’emparer de la centrale nucléaire située dans cette oblast parce que la prise de cette centrale nucléaire aurait réellement créé un changement.
pareil pour l’attaque de la salle de concert à Moscou etc… où les ukrainiens ont besoin de l’aval des autres pays pour faire une opération qui va tuer plus de 300 civils venus écouter un concert.
pareil pour l’attaque contre les bombardiers nulcéaires russes : il est évident que les ukrainiens ne peuvent pas prendre seuls la décision de s’attaquer au dispositif nucléaire russe.
etc.. et pourtant on continue de fabriquer de l’évidence contraire au réel.
pour Trump c’est pareil : dire « Trump est une brute, la plus parfaite horreur » est un discours quasi automatique induit par cette machine à fabriquer de l’évidence niant le réel.
déjà parce qu’il a été élu démocratiquement par le peuple américain, donc le fait de dire Trump est une brute est non seulement une attaque contre la démocratie mais une insulte contre ce peuple qui a voté pour lui.
ensuite dire « Trump est une brute » laisse imaginer que le camp d’en face, les choses contre lesquelles il se bat qui représentent les raisons pour lesquelles il a été élu hé ben toutes ces choses représenteraient la douceur.
la brutalité de Trump contre la douceur des démocrates.
exemple : il se bat contre ce système néolibéral construit par les élites mondialistes qui, avec leur logique comptable, ont créé du chômage, de la pauvreté, de la précarité, de la violence sociale etc…
la question est : est-ce que ce système néolibéral porté depuis 3 décennies (depuis Reagan aux US) par ces élites mondialistes visant leur seul profit représente la douceur de vivre ?
Trump c’est la brutalité et en face c’est la douceur ?
Bien sûr que non !
donc on voit que là encore la machine a créé de la pensée commune et de l’évidence va directement à l’encontre du réel.
on peut soit s’en amuser, soit s’en inquiéter.
c’est pour ça qu’il est difficile de parler de Jankélévitch : parce que ces élites intellectuelles appartiennent au même camp que les élites qui pilotent ces machines à fabriquer des évidences qui s’opposent au réel.
Rose,
Une des meilleures façon de communiquer avec une génération plus jeune est de partager l’admiration pour les belles choses que nous ont laissées les siècles de notre civilisation.
cet éloignement entre les individus et le réel, avec ces machines à fabriquer des évidences, est probablement le phénomène le plus important des sociétés européennes.
cela peut soit mener à la guerre comme avant 1914 où le conditionnement des esprits était à peu près le même, soit mener à des formes d’autocratie (on le voit avec le durcissement de la censure, la condamnation pas des juges d’opposants politiques, l’annulation d’élections etc…)
les individus et les peuples sont-ils en mesure de conserver un esprit de résistance ou bien seront-ils broyés par ce système pilotés par les oligarchies et les élites mondialistes ? perso je pense que oui.
Chaloux,
Le billet donne une fausse impression sur « l’exclusion » par Jankelevitch de tout compositeur allemand. Cela apparaît comme un sacrifice. En fait, ses écrits avant la guerre montrent clairement qu’il n’avait pas d’affinité avec elle et préférait d’autres musiques, dont celle des compositeurs français. Cette préférence est essentielle pour comprendre sa façon de considérer la musique. Cela correspond à quelque chose d’important en musique. En cela, il a été précédé par d’autres, dont Chopin.
pour l’attaque de l’otan contre le dispositif de dissuasion nucléaire russe Trump a dit qu’il n’était pas au courant.
soit il ment, soit c’est vrai.
perso je pense qu’il dit la vérité : un des objectifs de Trump est d’anéantir le pouvoir de nuisance des néoconservateurs, cette attaque contre le dispositif de dissuasion nucléaire russe (un truc qui est d’une gravité extrême) est un moyen pour ces néoconservateurs de rappeler à Trump qu’ils sont toujours là, qu’ils peuvent passer outre les personnes mises en place par Trump, et qu’ils sont toujours capables de nuisances.
parce que vu la gravité de cette attaque une des réponses possibles des russes peut être par exemple de décider de donner l’arme nucléaire à l’Iran : c’est là qu’on voit que seuls les néoconservateurs peuvent être à l’origine de cette attaque dans la mesure où leur objectif est de créer de l’escalade pour créer du chaos, ce qui n’est pas le but de Trump.
Non non, je confirme, Puck, Trump n’est pas au courant.
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