Au tour de Minuit
Qui peut se vanter d’avoir vu un signe dans la récente parution de Nouveau roman chez Gallimard ? Il était si subliminal que nul ne l’avait décrypté dans le milieu littéraire et le petit monde feutré de l’édition. A moins que ce fut qu’une coïncidence. Allez savoir ! Toujours est-il qu’elle prend tout son sens avec le rachat la semaine dernière des éditions de Minuit et de ses librairies (Compagnie au Quartier latin et des participations dans d’autres en province) par le groupe Madrigall, holding dans laquelle Antoine Gallimard, son président, a réuni une quinzaine de maisons d’édition, neuf librairies et des filiales de distribution et de diffusion, ce qui en fait le troisième groupe éditorial français. A côté de ce géant, les éditions de Minuit ne sont que poussière d’étincelles ((14 551 200 euros de chiffre d’affaires et 737 900 euros de résultat net en 2018), mais d’un prestige sans égal.
S’il y a, dans cette industrie si particulière du livre, un cas d’école où le capital symbolique excède largement le capital matériel, c’est bien dans le bilan de cette Maison créée dans la clandestinité sous l’Occupation. Vouée à la publication et à la diffusion sous le manteau des écrits de la Résistance par Pierre de Lescure et Jean Bruller, à commencer par le Silence de la mer que celui-ci signa sous le pseudonyme de Vercors, elle fut reprise en 1948 par Jérôme Lindon qui en conserva l’esprit de rébellion, le perpétua et lui fit honneur jusqu’à sa mort en 2001, notamment pendant la guerre d’Algérie et les batailles contre la censure et plus tard en faveur de la loi pour le prix unique du livre.
Durant un peu plus d’un demi-siècle, Lindon et Minuit ne firent qu’un au service d’un absolu de la littérature et d’une éthique du métier d’éditeur. Une discrétion que l’on disait glaçante, une sobriété en toutes choses qui confinait à l’austérité. Mais une vision l’animait et il n’en a jamais dérogé, fier que sa société n’ait jamais dépassé le chiffre de neuf salariés malgré les fromages collatéraux de ses deux prix Nobel de littérature (Samuel Beckett et Claude Simon) et ses trois prix Goncourt (L’Amant de Marguerite Duras, Les Champs d’honneur de Jean Rouaud, Je m’en vais de Jean Echenoz). Il entretenait des rapports affectifs et exclusifs avec ses auteurs.
Son œuvre, c’est son catalogue. L’un des plus beaux, des plus riches, des plus audacieux non seulement de la fiction française dans la seconde moitié du XXème siècle mais aussi des sciences humaines et sociales, notamment en sociologie, philosophie et critique littéraire. Ne citer qu’une poignée d’auteurs et de titres serait injuste vis-à-vis des absents mais la place manque pour les citer tous. On a même pu parler d’une ligne éditoriale au risque de l’uniformité des styles, en raison de la couverture typographique, blanche à liseré bleu, identique pour tous, d’une certaine « écriture blanche » commune à plusieurs auteurs, comme une musique en commun round midnight un « Autour de minuit » qui n’eut pas déplu au regretté Christian Gailly, et du désir ardent de beaucoup (Echenoz…) d’en être parce que Beckett en était puis, à la génération suivante, d’un semblable désir d’en être (Marie NDiaye…) parce que Echenoz en était et ainsi de suite. De quoi susciter à défaut une famille d’esprit.
En lui succédant, sa fille Irène Lindon a respecté et prolongé l’héritage spirituel. A 72 ans, sans héritier direct et inquiète de la transmission du trésor patrimonial que son père lui avait légué, elle s’est naturellement tournée vers Gallimard. « Chez les ploucs !… Un haut le cœur ! », a aussitôt tweeté François Bon qui y avait publié une dizaine de livres, scandalisé par ce qu’il tient pour une trahison ; il s’en explique dans une longue intervention sur Youtube qui lui permet de développer le problème de fond : quand un éditeur vend son catalogue, il vend aussi les droits des livres qu’il a publiés sans demander leur avis à ses auteurs… Pourtant, même si elles ont souvent été conflictuelles, les relations sont anciennes entre les deux éditeurs. Il est vrai que le directeur littéraire de Minuit, Georges Lambrichs, avait été recruté en 1959 par Gaston Gallimard, que plusieurs auteurs sont passés d’un catalogue à l’autre (Marie NDiaye, Jean Rouaud, Hervé Guibert…) et que certains, telle Marguerite Duras, savaient faire jouer la concurrence entre ses deux éditeurs en naviguant habilement de l’un à l’autre.
Dès lors que la grande petite maison de la rue Bernard Palissy était à vendre, le choix du groupe Gallimard, qui en assure déjà la diffusion et la distribution, s’imposait face à Hachette, Editis et autres mastodontes dont l’histoire n’a jamais eu partie liée avec les établissements Lindon&fille. P. O. L. et Verticales, entre autres filiales du groupe Madrigall au semblable profil littéraire, peuvent témoigner que, si elles ont perdu leur indépendance financière, elles ont bien conservé leur indépendance éditoriale. La logique industrielle dicte désormais son propre mantra : hors des groupes, point de salut ! Avec tout ce que la concentration suppose aussi : réduction d’effectifs, absorption de maisons par d’autres et vente par appartements en raison de la situation de monopole (c’est d’actualité avec les projets de fusion Hachette/ Editis actuellement prêtés à Vincent Bolloré). Ce qui ne sera pas le cas chez Minuit qui continuera avec neuf salariés sous la direction éditoriale de Thomas Simonnet, venu de Gallimard où il animait notamment la fameuse collection L’Arbalète. Il y aura bien sûr des synergies à la suite de cette nouvelle acquisition ; on peut supposer qu’elles vaincront quelques anciens blocages ; mais qui irait se plaindre de voir enfin paraitre les œuvres complètes de Samuel Beckett dans la collection de la Pléiade ?
(Photos D.R.)
1 021 Réponses pour Au tour de Minuit
J’ai fait le mille et unien commentaire.
Le réalisateur a donc provoqué chez le spectateur moyen ce qu’il cherchait : le faire rire (=gras ?) par des allusions ironiques entendues en certains passages, de sorte à faire passer la pilule générale par ailleurs…son message implicite aurait été : ne pas prendre au tragique cette affaire de mœurs conventuelles au 17e s., et démontrer que le 21e s. n’ rien à envier à l’exotisme du 17e… Dédramatiser…, sinon ‘provoquer’ les culs bénits du catholicisme intégriste qui sévissent encore ici ou là de par le monde.
Bien évidemment, il échoue dans son intention pour la bonne raison que les cinéphiles déjà convaincus et blasés ricanent, tandis que les autres restent chez eux…
Merci jzmn d’avoir éclairé le sens des rires de votre salle… par votre perception vécue… Finalement, votre entreprise de démolition de ce film aura-t-elle atteint son objectif sur l’RDL ? Pas sûr… Nous irons peut-être le voir plus tard, soit en salle, soit dans deux ans, en restant dans nos chaumières, avec Arte.
POUR un lecteur de philosophie, intention appelle Anscombe ;
Il ressort cependant que l’un des thèmes centraux de ces recherches est ce que
« Miss Anscombe » nomme, à la suite d’Aristote, le savoir pratique, c’est-à-dire cette
connaissance d’agent qui caractérise le rapport d’un individu à ses propres actions
intentionnelles. Il apparaît ici que la compréhension de ce savoir pratique est loin d’être
univoque.
En effet, les lecteurs d’Anscombe, et en particulier de sa monographie bien connue
sur L’Intention, connaissent la difficulté de son écriture, qui justifie la nécessité d’un réel
travail d’exégèse pour quiconque veut saisir la pensée raffinée et puissante de cette
auteure.
https://www.revue-klesis.org/pdf/Klesis-Anscombe-01-Valerie-Aucouturier-Anscombe-savoir-pratique-ethique.pdf
Étant donné le contexte — Contreréforme —, les autorités censurèrent surtout les visions de Benedetta Carlini car révélaient son autonomie intellectuelle et son mysticisme hétérodoxe davantage scandaleux que sa sexualité — même si la question de sexualité suffira à la condamner — ; mais pas de bûcher pour B., elle fut privée de sa charge d’abbesse et fut placée sous surveillance pendant les 35 années restantes de sa vie.
Intéressante aussi l’histoire de Maria Domitilla Galluzzi qui passa d’inspirée par le diable (donc condamné au silence par l’Inquisition) à sainte.
Ses expériences mystiques bien à part, influencée par la littérature qui circulait à l’époque dans les monastères qui visait à guider les moniales sur le chemin de la perfection, MDG a aussi écrit. Ses écrits n’ont jamais été publiés, mais beaucoup des copies — il s’agit d’œuvres d’une certaine valeur qui, présentent les topoi typiques des œuvres religieuses pour femmes du XVIIe siècle.
jakobson:
http://www.leseditionsdeminuit.fr/auteur-Roman_Jakobson-1572-1-1-0-1.html
Mikhaïl Bakhtine (N. V. Volochinov)
Le Marxisme et la philosophie du langage
Essai d’application de la méthode sociologique en linguistique
Traduit du russe et présenté par Marina Yaguello
Préface de Roman Jakobson
1977
Collection Le sens commun , 232 pages
bakhtine
http://www.leseditionsdeminuit.fr/livre-Le_Marxisme_et_la_philosophie_du_langage-1919-1-1-0-1.html
il échoue dans son intention pour la bonne raison que les cinéphiles déjà convaincus et blasés ricanent, tandis que les autres restent chez eux…
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Le cinéma et les livres ne prêcheraient-ils que les convertis?
D’où le rôle fondamental de l’École (Université comprise), pour expulser l’individu hors de ses divers déterminismes.
Mais oui, Bloom.. Nous sommes d’accord depuis longtemps sur le rôle de l’Ecole… Il faut continuer à y croire et nous y croyons, car nous n’avons pas d’autre choix.
nb / J’ai bien noté votre attente sur Conrad/ACDT dont j’ai entrepris la découverte, ce matin même… Je crains de vous décevoir plus tard, mais on verra bien… hein. Belle journée à vous,
(Votre pronostic pour GB/Italie, ce soir ? Avez-vous bookmakerisé ?)
« D’où le rôle fondamental de l’École (Université comprise), pour expulser l’individu hors de ses divers déterminismes. »
Ou pour en créer de nouveaux !
(Votre pronostic pour GB/Italie, ce soir ? Avez-vous bookmakerisé ?)
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3J, comme vous le savez, je suis de très près tout ce qui touche à nos « gentils » voisins d’outre-Manche, et ce que je vois, lis et entends me terrifie et m’attriste. L’Opium du populo fonctionne à plein et stocomise les cerveaux déjà amochés par choc Brexit-Covid.
Peut-être en irait-il de même si je suivais de près l’humeur transalpine?
Sur le plan sportif, je trouve les Azurri plus élégants et leur souhaite de démontrer qu’ils peuvent gagner sans faire expulser le meilleur joueur adverse, i.e. Raheem Sterling, à qui Radio 4 a consacré une émission intéressante hier soir.
https://www.bbc.co.uk/programmes/m000xsh0
Je souhaite juste que l’arbitre ne se sente pas obligé de donner la victoire au pays hôte…
Quelque part, le résultat importe moins que la qualité du jeu et surtout que les comportements qu’il induira de part & d’autre.
(Le foot professionnel me met toujours un peu mal à l’aise, pour la même raison que l’industrie du cinéma – le « pognon de dingue » qui y circule)
Ou pour en créer de nouveaux !
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L’art de l’oxymoron, Baroz, du type ‘les liens qui libèrent’.
stocomise 🙂
moi, je scotomise le match, à défaut de le sodomiser…
Et juste pour le fun, vu que, hein, le foutr’et moi… je dis : 1 – 1 ; avec départage aux buts : -> la GB gagne, grâce à la protection de votre Queen…
Bàv,
Bloom
L’Angleterre gagne.
L’ai dit à Bill qui n’était pas convaincu.
Sera heureux.
Janssen J-J
Finalement, votre entreprise de démolition de ce film aura-t-elle atteint son objectif sur l’RDL ? Pas sûr
La critique de Jazzi m’a plutôt donné envie de voir ce film pour me faire ma propre idée.
Bill va pleurer. Ou pire.
JJJ
Au Coeur des Ténèbres, il faut l’avoir lu je pense, parce qu’il a compté pour beaucoup de nous tous, la folie et la guerre, l’enfermement de Kurz, le côté Aguirre, la monstruosité des hommes, la puissance de la jungle (dans le désordre) donnent une force et une portée à ce texte que vous sentirez, je l’espère, à défaut de l’apprécier -sait on jamais.
De Conrad, Lord Jim m’a scotché.
Bloom
l’Angleterre a perdu. Mais moi je ne m’intéresse qu’au rugby, alors…
Oui, on a eu tout faux… J’ai encore perdu dans mes pronostics… Heureusement que j’avais pas engagé mon argent… il parait que l’Italie est contente, et que la reine a trépigné de rage… Voulait ressortir son trophée, depuis 1966 ! Bon, ce sera pour la prochaine fois, elle est inusab’…, c pas comme la Victoria, petite joueuse ! Hein…
Allons voir Benedetta, alors, grâce à jzmn ! Bàv,
Le robot débloque
un commentaire innocent posté a propos de l’appel solennel à la vaccination lancé par le le president qui a joué lau joueur de flute de Hameln est apparu quelques secondes sur le commentarium et en a a disparu presque aussitôt
pourquoi ?
err eur de ma part
je m’etais trompée de fil mon commebntaire existe bien sous le billet nouveau roman
mes excuses au robot
Depuis quand on s’excuse devant un 🤖?
On lui dit va te faire foutre et puis c’est tout.
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