de Pierre Assouline

en savoir plus

La République des livres

Littérature de langue française

Pierre Michon, écrivain de l’ouïe

Pierre Michon, écrivain de l’ouïe

JILL A. McCOY

6

commentaires

De but en blanc, tentons cette proposition : Pierre Michon est un écrivain de l’ouïe. Un écrivain de l’ouïe serait celui qui entend ou demande que les autres entendent, et dont l’écriture est inextricablement liée au son. La manière idéale de lire un tel écrivain est à voix haute, et lentement, pour que la force de ses mots frappe de plein fouet. Les poètes s’imposent bien sûr dans cette dimension sonore, obligeant leurs lecteurs à écouter leurs vers. Si Pierre Michon n’est pas  techniquement parlant un poète, il l’est spirituellement et artistiquement, auteur d’une prose si rythmique et musicale qu’on pourrait sans peine l’appeler […]

lire la suite .../ ...
Poétique de Céline, éthique de Kraus

1076

commentaires

L’ego-histoire, c’est bien, surtout lorsque d’autres que des historiens s’en emparent aussi. Encore faut-il avoir envie de sacrifier au racontage de mézigue, expression qui n’est pas de Louis-Ferdinand Céline mais de Jacques Perret. Il est remarquable qu’un écrivain aussi tempétueux ait suscité un exégète aussi paisible qu’Henri Godard. Comment devient-on le spécialiste les plus respecté et le plus incontesté de l’œuvre d’un grand écrivain ? Richard Ellman avait autrefois répondu pour Joyce ; Jean-Yves Tadié pourrait répondre pour Proust, Pierre Citron pour Giono. Jacques Body pour Giraudoux, Henri Mitterand pour Zola… En attendant, Henri Godard le fait dans A travers Céline, la littérature […]

lire la suite .../ ...
De bons enfants, malgré tout

601

commentaires

Parfois, on se demande ce que serait la littérature sans les géniteurs de l’écrivain. Qu’il leur mette une claque ou qu’il les envahisse de leur tendresse, l’exercice a tout de la figure imposée. Comme un passage obligé pour mieux tourner la page, dût-elle peser des tonnes, avant d’entrer dans le vif du sujet. Encore que certains s’y résolvent à mi-chemin tel Albert Cohen avec Le Livre de ma mère (1954) ou Marcel Pagnol avec La gloire de mon père/ le château de ma mère (1957). On observera d’ailleurs que les parents sont plus rarement traités en couple. Soit l’un, soit […]

lire la suite .../ ...
Caprice d’Echenoz, insignifiance du Kundera

1175

commentaires

Après la petite rentrée, comme on nomme désormais la rentrée de janvier, mars est le rendez-vous des poids lourds. Ils convient de les admirer. Ils ont la carte. Le club est sélect : Kundera, Modiano, Le Clézio y côtoient Carrère, Echenoz, Ernaux, Ndiaye, Toussaint…. Autant d’écrivains que l’on a aimés, et que l’on est tout prêt à aimer encore, mais sans complaisance ni indulgence coupables. Sur la durée, certains (Modiano) sont remarquablement constants dans la qualité ; d’autres, moins. Leurs nouveaux livres sont pourtant loués systématiquement par un effet d’emballement médiatique qui demeure l’un des plus étonnants mystères de la vie littéraire. […]

lire la suite .../ ...
Comment j’ai traduit « Albucius » de Pascal Quignard en japonais

9

commentaires

On me demande de temps en temps : « Comment avez-vous traduit ces livres quignardiens ? » Je sais très bien que c’est surtout de ma traduction d’Albucius, des Tablettes de buis d’Apronenia Avitia ou de La Raisonqu’on me parle. Je leur réponds les yeux baissés, gardant le sourire : « Ne me le demandez pas, je vous en prie. » Cela pour éviter toute excuse, mais intérieurement je me demande s’ils ont vraiment lu ces miraculeux romans à la fois romains et contemporains. On parle souvent de l’érudition ou de la pédanterie de Pascal Quignard. C’est vrai qu’il y a de nombreuses citations latines, grecques, ou d’autres langues anciennes partout dans ses ouvrages. […]

lire la suite .../ ...
Monsieur Girard n’est pas bégueule

634

commentaires

Mais que veut-il au juste, le phénomène de la rentrée ? Le beurre, l’argent du beurre et le cul du crémier ? J’ai déjà écrit dans ces colonnes (c’est ici pour les mal-voyants de la Toile) tout le bien que je pensais de Pour en finir avec Eddy Bellegueule, un vrai… coup de poing dans la gueule, ainsi que Cavanna définissait un bon dessin de presse. Inutile de revenir sur ses qualités littéraires, sa force, sa maîtrise. Le problème s’est désormais déplacé de la rubrique littéraire à celle des faits divers (rebaptisée « Société » en levant le petit doigt). Lorsqu’un écrivain subit un […]

lire la suite .../ ...
Lui, c’est lui et moi, c’est moi

374

commentaires

Ce doit être terrible de passer pour un clone littéraire. Pas un plagiaire, un imitateur ou quelque chose du genre. Ni le nouveau Faulkner ou le nouveau Joyce tels que des éditeurs paresseux l’annoncent fièrement en quatrième de couverture. Ni même un néo-Proust, comme nous l’assurent en chœur ces derniers temps des écrivains et des critiques anglais et américains à propos du norvégien Karl Ove Knausgaard au motif que son roman My struggle est long de 3600 pages réparties en six volumes sans que le récit soit tenu par une véritable intrigue, avec la description sur une centaine de pages […]

lire la suite .../ ...
Antoine Sénanque, qualité française

437

commentaires

Un mot et une vie bascule. Vraiment ? Disons deux ou trois mots. « Fusain est un con ». Et comme le graffiti est public, il suffit à faire d’un désabusé un désespéré, avant de le faire douter de la qualité de son petit bonheur. S’ensuivent deux mois sabbatiques de la vie d’un quinquagénaire rongé par le doux démon de l’intranquillité. Pessoa en personne ? Pas tout à fait. Il s’appelle Etienne Fusain. Professeur de philosophie en banlieue parisienne, il n’a plus le goût d’apprendre quoi que ce soit aux autres. Transmettre, quelle plaie ! Quant à sa femme…  Zéro défaut. Juste une conception peu aiguë […]

lire la suite .../ ...
Regagner l’univers de l’enfance

Regagner l’univers de l’enfance

Catherine Hermary Vieille

Rien n’est plus difficile que de regagner l’univers de l’enfance, voir, écouter le monde, l’apprécier ou le juger à travers la personnalité d’un garçonnet de 9 ans. Adopter une vue trop puérile ou au contraire trop grave est l’écueil majeur et omniprésent sur lequel sont venus s’échouer de nombreux romanciers. Avec L’Été des Lucioles, Gilles Paris signe une parfaite réussite. Aucun faux pas ni fausse note tout au long de ce joli roman qui relate l’histoire de Victor et de sa famille durant des vacances d’été passées au Cap Martin dans la prestigieuse résidence Napoléon III  dominant la mer. Un été pas […]

lire la suite .../ ...
Il n’y a que la Patagonie qui convienne à mon immense tristesse

948

commentaires

Serait-ce la naissance d’un genre littéraire ? Comme on se dit sagement qu’en cette matière on n’invente jamais rien, ou alors une fois par siècle, on se doute qu’il doit bien y avoir des précédents, même si celui qui nous vient le plus naturellement à l’esprit, Jérôme Lindon de Jean Echenoz, est assez récent (éditions de Minuit, 2001), ainsi que les évocations de la figure Jean-Marc Roberts, patron de Stock, par Philippe Claudel et Jean-Marc Parisis. Bizarre tout de même que d’autres titres plus anciens ne s’imposent pas spontanément à notre mémoire. A croire que l’hommage de l’auteur à son éditeur […]

lire la suite .../ ...