de Pierre Assouline

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La République des livres
Dans les zones grises de la rentrée littéraire

Dans les zones grises de la rentrée littéraire

Et d’abord, afin de dissiper tout malentendu, ce que la zone grise n’est pas : synonyme de flou, confus, vague, insondable, passif… Gris, quoi. En se popularisant, l’expression s’est galvaudée puis dégradée en métaphore. A la lumière des récents débats sur l’inceste et le viol, elle est même instrumentalisée pour désigner l‘incertaine frontière entre la résignation et le consentement. Qu’est-elle alors ? Même si en l’espèce la recherche de paternité est périlleuse, Primo Levi semble bien être le premier à l’avoir utilisée dans Si c’est un homme (1947) puis à l’avoir conceptualisée dans un chapitre des Naufragés et les rescapés (1986) intitulé justement « La zone grise » comme le lieu ambigu censé séparer les opprimés des oppresseurs. Il sépare autant qu’il relie le camp des maîtres et celui des esclaves. C’est le camp du troisième type irréductible à une opposition frontale, tranchée, manichéenne entre les deux catégories. Quelques livres de la rentrée déploient leur histoire dans ce non-lieu.

Ceux qui suivent Tanguy Viel depuis ses débuts prendront ce train et ne le regretteront pas. Ils s’embarqueront dans La fille qu’on appelle (176 pages, 16 euros, éditions de Minuit), titre qui sonne bizarrement au premier abord, moins dès que l’on devine qu’il est la traduction de call girl. Comme dans Article 353 du code pénal, (2017), Tangy Viel a trouvé la note juste et s’y est tenu tout le long autour de quelques personnages : Max, le maire aux grandes ambitions politiques d’une ville de la Bretagne maritime ; son chauffeur qui fut jadis un boxeur ; Laura, 20 ans, la fille de celui-ci. Au sein de ce triangle se tisse un réseau d’échanges tendus et inattendus dont l’objet initial (la recherche d’un logement par la jeune femme) n’est qu’un prétexte à une très sensible exploration des caractères.

C’est ce qu’il dit d’autre que ce qu’il raconte (même s’il maitrise parfaitement son récit) qui fait le prix de ce roman. Une vraie réflexion en filigrane, implicite, esquissée sur l’arrogance du pouvoir lorsqu’il exerce sa domination. On l’aura compris, Laura couche avec le maire dans l’espoir d’obtenir ce foutu logement de la municipalité. Mais c’est évidemment plus complexe car son attitude se situe dans une valse-hésitation où toute la palette du consentement est explorée et circonscrite dans le langage. De quoi produire une tension qui accorde à ce roman sa juste musique.

On retrouve immanquablement les échos ou les accents d’une écriture blanche caractéristique de Minuit, mais Viel a bien son monde propre. Le tout est d’une remarquable fluidité dans la circulation entre les mots et les choses pour produire de la vie, tout simplement. Surtout dans le récit haut en couleurs du combat de boxe (qui vaut bien mais dans un genre différent les comptes rendus que le journaliste sportif Henri Decoin écrivait dans les années vingt et son roman Quinze rounds. Histoire d’un combat que L’arbre vengeur réédite ces jours-ci). Une technique au service d’un styliste : ellipses, images, répétition, précision, suspense, métaphores, monologues intérieurs, économie d’effets, distanciation, sobriété de l’expression dans le plus grand souci du romanesque. Il ne dévie guère de sa ligne depuis le Black Note (1998) et on ne s’en plaindra pas, mais il la perfectionne de livre en livre.

A la lecture des premières pages du Voyage dans l’Est de Christine Angot, (214 pages, 19,50 euros, Flammarion), on se dit : encore l’inceste, décidemment, elle n’en sort pas plus de vingt ans après L’inceste (1999) et tant d’autres textes et prises de parole où elle y est revenue encore et encore et maintenant opportunément à la faveur de récentes affaires. Et puis ça prend, on se rend compte que si la question est bien centrale, il y a aussi bien d’autres choses dans ce roman qui mériterait d’être lu pour lui-même et non à la lumière d’un énième et vain débat sur l’autofiction. Angot y est débarrassée de la violence et de l’agressivité de ses débuts, de la vacuité de certains de ses livres (Pourquoi le Brésil ? Le marché des amants), elle est dans la veine de ses récentes réussites (Une semaine de vacances, Un amour impossible) et ce nouveau livre en est le couronnement. Car la violence ne l’a pas déserté mais elle s’y manifeste autrement, ce qui lui donne une puissance stupéfiante.

Bien sûr, on est en terrain connu, tant l’auteure s’inscrit dans le paysage littéraire depuis longtemps ; on croit même avoir déjà lu le livre : Chateauroux, Reims, Strasbourg, Paris, Géradmer… Dès la première page, en vingt lignes, elle réussit à placer cinq fois le verbe « avoir » à l’imparfait. Angot, quoi. Le ton est donné. Mon père, ma mère et moi, une éducation entre deux langues l’autre étant l’allemand. Son histoire, leur histoire. Comment on vit avec ça quand un père admiré, aimé, dont elle a fait tardivement connaissance (il avait refait sa vie ailleurs) l’embrasse sur la bouche à 13 ans, et durant les années suivantes lui fait comprendre qu’à ses yeux elle est une enfant de seconde zone à qui il assigne d’abord une fonction sexuelle. Fellations, sodomies, cunnilingus. C’est une époque où le mot « inceste » ne figure pas dans le code pénal. Le viol y est bien mais comme délit.

Plus tard, quand elle le confrontera à son crime, il fera comme s’il n’avait fait qu’obéir à son désir à elle. Entre temps, elle aura essayé de se reconstruire, d’avoir des relations avec des garçons, de se marier, d’être mère. Dépressions, anorexie, tentatives de suicide. Elle n’en voit pas l’issue si bien que parvenu à l’âge adulte, elle revoit son père à sa demande à elle après des années de mise à distance et reprend des relations sexuelles. Sans voyeurisme ni exhibitionnisme, dénué de tout pathos, ce roman en état limite permanent, à l’image de ses trois personnages principaux, gagne en intensité lorsqu’elle prend conscience de son impuissance à combattre une autorité et s’incline, perd le contrôle de sa vie, sent son avenir gangrené par « la chose ».

Bien sûr il y a la question du consentement mais comment en parler quand on se sent verrouillée de l’intérieur ? De la page 133 à la page 155, le rythme change avec la tenue d’un journal intime relatant ses premiers essais littéraires, ses envois aux éditeurs, le dépôt du manuscrit à l’esbroufe au domicile niçois de Le Clézio. Avant de revenir à l’inceste : un déni de filiation qui passe par l’asservissement de l’enfant à la satisfaction sexuelle du père ou d’un membre de la famille qui exerce une emprise. Il y a toujours une obscénité à évoquer le plaisir et le consentement même si in fine Angot ose évoquer l’amour qu’elle a ressenti pour lui- et réciproquement. Car si scandale il devrait y avoir avec ce livre, c’est dans l’injonction que nous adresse l’auteure de le lire comme un roman d’amour. Non un scandale de la vérité mais scandale de sa vérité.

C’est si inaudible en nos temps manichéens, binaires, exclusifs que cela ne peut que heurter, révolter même et ce serait tant mieux puisque la littérature, la seule qui importe, a juré de nous troubler. Et comment ne pas l’être face à un tel père amoureux de sa fille… L’écriture, tranchante, saisissante, au cordeau, devrait faire de ce roman l’un des événements de la rentrée, non pour des mauvaises raisons (la personnalité d’Angot etc) mais pour sa force. Le pire malentendu serait de le considérer comme un témoignage opportuniste en résonnance avec l’actualité récente sur un sujet de société (ce qui était bien le cas du livre de Vanessa Springora sans intérêt sur le plan littéraire) ou une forme d’autobiographie et non pour ce qu’il est : une œuvre littéraire qui met à nu la folie d’une femme, ses racines, ses mécanismes. Plus que jamais, il faut séparer un livre du bruit qu’il pourra faire.

Après Perec, on ne peut plus intituler un roman La disparition. Et encore moins Une femme disparait après le film A lady vanishes. C’est pourtant bien de cela qu’il s’agit avec Danger en rive (180 pages, 17 euros, Léo Scheer), titre qui figure sur un panneau de signalisation en route. L’étrange le dispute au fantastique dans cette histoire « à la Nathalie Rheims », et pour cause, qui voudrait faire penser parfois à du Hitchcock revu par Simenon.

De son exil intérieur dans une maison du pays d’Auge, une écrivaine réduite à l’impuissance fuit sa propre vie, s’enferme dans sa mise à distance de la société, à la recherche de la douceur, des instants furtifs, de la beauté des paysages, lorsqu’un harceleur revient bouleverser sa solitude. Rien de sexuel mais une volonté affichée, calculée et fondamentalement perverse de la déstabiliser pour lui faire perdre pied et mettre sa mémoire en miettes. Sa mémoire vacillante, ultime béquille de celle qui a assisté un soir à la disparition d’une infirmière et qui se demande à mesure du récit, si, comme le croit la police, elle n’a pas fantasmé ce dont elle croit avoir été témoin. Une persécution de toute heure qui la pousse à fuir à nouveau.

Le mécanisme est parfaitement mis à nu par l’auteure. C’est si finement, méthodiquement, cruellement raconté que ce ne peut être que du vécu même s’il serait vain d’y chercher des clés. Seuls ceux qui sont passés par là savent que ce mal à l’œuvre ronge, use, traumatise et que parfois, la mort volontaire est la seule porte de sortie pour en finir. C’est peu dire que l’on sort troublé de cette lecture.

A ce jour, Grande couronne de Salomé Kiner (288 pages, 18,50 euros, Bourgois) est bien l’une des plus secouantes révélations de cette rentrée. Cette auteure a 35 ans, c’est son premier roman. Le sujet est d’un grand classique du roman d’apprentissage : la naissance d’une adolescente à la sexualité, à la découverte du monde, aux rapports humains, les relations avec la mère. Sauf que ça se passe dans la France des années 90 (on y est vraiment, avec la crainte du grand basculement dans la perspective de l’an 2000, ce n’est pas qu’un décor) avant les réseaux sociaux et internet dans la banlieue pavillonnaire du côté du Val d’Oise.

Père absent, mère dépressive, milieu modeste où il faut se débrouiller pour faire semblant d’avoir de l’argent quand on n’en a pas, ce qui ne va pas de soi lorsqu’on est obsédée par les marques en toutes choses (vêtements bien sûr mais aussi sodas, chewing gum, objets du quotidien, etc) et qu’on aimerait tant ressembler aux autres filles. Elle fait la pute pour régler « mon problème avec les marques ». Aussi implacable et cruel que drôle et joyeusement glauque, c’est plein de fantasmes sur la vie ailleurs et autrement, de désirs inassouvis, d’émerveillements et de désillusions. Paris y est mythifié, comme l’est l’idée survendue aux jeunes consommateurs de la réussite en toutes choses.

Le style emporte tout : vif, rapide, culotté et surtout authentique. Quel rythme dans le rendu de l’oralité ! et quelle habileté pour décrire la maladresse des garçons, quelle finesse pour dire la confrontation d’une sensibilité encre enfantine avec des réalités d’adulte. Les émotions jaillissent dans la bouche et les réactions des personnages avant même qu’ils aient eu le temps de les maitriser. La lucidité aigüe de la narratrice tient la cadence sur près de 300 pages. Ca ne sent ni l’imitation ni l’emprunt. On ne voit pas l’effort pour écrire comme on parle. Salomé Kinner a un vrai don d’observation.

De son propre aveu, c’est le chant d’amour d’une adolescente face à la décomposition de sa famille. Mais un chant d’une belle tonicité. Ses personnages ont leur propre langue et elle est bien pendue, les copines comme les deux frères. Chacun sa gouaille, chacun sa colère, chacun son contrôle de la violence. Mais une seule voix en émerge, celle de la romancière installée en Suisse romane et dont le cosmopolitisme irrigue l’écriture : père russe, mère italienne, beau-père américain. Prêtez l’oreille à cette nouvelle voix : même s’il s’en trouvera toujours pour y déceler échos et résonnances de celle du Momo de La vie devant soi, on n’a pas fini de l’entendre.

(Photos Passou, Yann Dissez, Dion, Philippe Conrad, Marie Taillefer)

Cette entrée a été publiée dans Littérature de langue française.

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1 262 Réponses pour Dans les zones grises de la rentrée littéraire

Janssen J-J dit: à

@c’est pas d’aujourd’hui que j’ai compris que les Ph Descola, B Latour, etc, oeuvraient pour l’obscurantisme

& l’en a compris des choses depuis des plombes !… ben mon ieux, avec tout le fric de ses impôts qu’elle leur a rfilé .. Elle, çà l’empêche pas de penser progessistement aux millénaires de culture éclairée dont elle a hérité et qu’elle va pas renier hien, face à ses vieux cons !…
Pauvre fille ! violée par son père à 13 ans avec l’argent du contribuab’ -… tu m’étonnes de la tache congégnitale icitge étalagée !… Et cette garce d’Angot qui y’a pris sa place sous les sunlights, c vrai que c injuste, koi… ! ça fout les boules…
C’est le côté obscur de sa force, que kidi depuis que jlakonéssion, doit tjs bruler ce qu’elle a adoré, dès fois qu’haltères lui piétinent les bandes plates… Ouelbèk et Karère, passés à la chausse trappe… Et ce pauvr’Latour qu’en peut mais… Y a longtemps qu’javions compris qu’il dilapidait nos sous pour atterrir sur mars et mieux s’approcher du bon dieu….
Didier, lui, l’est dans le bon chemin… suis les traces de SMS, atteint par l’âge de la saumure… Est pas relativisssss, lui, avex ses cachtons de klorokinésithérapie…

Meuh… duconnass’ ou daronnass’, tu lakoné ou lakoné-tu @ jmb… Une grande chrétienne éclairée par jésucrie, et Tu y fait boire quoi koi, ce soir, hein, comme tisane avec sa mariejane ?

Marie Sasseur dit: à

C’est vrai quoi à part des naturalistes comme Descola, qui xa va intéresser cette histoire du pouvoir colonial francais et ses collabos 1906-1947, face à la tribu du Royaume de Bornoude ?

Marie Sasseur dit: à

@c’est pas d’aujourd’hui que j’ai compris que les Ph Descola, B Latour, etc, oeuvraient pour l’obscurantisme.

Oui je confirme, ça date d’un peu avant la médaille d’or du ceneneress qui a récompensé les travaux remarquables de ce très grand anthropologue.

D. dit: à

Je vois que vous esquivez le débat, renato. Généralement on fait ça quand on ne connaît pas du tout un sujet.

Jibé dit: à

« Ohff, c’est pas d’aujourd’hui que j’ai compris que les Ph Descola, B Latour, etc, oeuvraient pour l’obscurantisme. »
c’est pour rire ou pour provoquer, cette affligeante et ridicule sentence? Sait de quoi et qui a’ cause?
Pas même envie d’argumenter, inutile.

Jibé dit: à

JJJ « Ce qui pourrait nourrir de fructueux échanges passionnés cet automne à venir sur l’RDL. Je l’espère, du moins »
quand vous voulez, si passou pouvait intitier la chose, j’en suis!

renato dit: à

Quel débat, D. ? ah, le mignon de porc, etc. Je ne esquive pas le débat, simplement je me fous amplement de survivances mono et pluri théistes.

D. dit: à

Voulez-vous savoir le sens profond de ce commandement, renato ? Oui ou Non.

DHH dit: à

Un souvenir de ma lecture de Batouala en réponse à’une observation de Bloom sur la RDL il y a quelques mois :
Vous écrivez à juste titre « En France, les soldats des troupes coloniales ont rarement été mis à l’honneur dans la littérature »
Je crois néanmoins qu’il faut rappeler que le roman de Rene( ?) Maran qui donne la parole à un vieillard africain ancien des troupes coloniales évoquant ses jeunes années a reçu un prix Goncourt dans les années 20.
Mes souvenirs de cette lecture sont assez flous mais je me rappelle une scène précise celle où il raconte un souvenir de son temps en métropole,une virée au bordel entraîné ses camarades bidasses « de souche » d’où il s’est sauvé terrifié lorsque la fille qu’on lui avait attribuée l’a appelé mon poulet et qu’il compris cette parole comme le sort qu’elle lui jetait pour le métamorphoser en volaille

D. dit: à

Marseille est complètement foutue et pour toujours. Macron n’y changera évidemment rien du tout.
Marseille n’est plus qu’un immense égout, bien hélas. Et Paris lui emboite joyeusement le pas par son incessant et désormais durable nivellement par le bas.

D. dit: à

Il faut vraiment avoir de la merda dans les yeux pour ne pas le voir.

Janssen J-J dit: à

@ vous êtes toujours à tout catastrophiser, alors que non, y a pas d’raison, D.
@ tu vois ben qu’elle est à moitié tarée, à écrire tout et son contraire sans même s’en apercevoir. Ni pour rire ni pour provoquer, non… Se rendre juste un brin intéressante…, tellement pauvre est sa vie pourrave depuis des plombes dans la pitance du darkweb. Argumenter ?… La prend’en pitié, putôt, voui, au moins yaxa-affaire, y’apprendre le vibro-message évangélirque.
@ pourmapar, me suis fait piquer par une guêpe ce soir, en pissant près du seringa… (petit rappel) et j’ai bousillé le vieux frigo, fu sobligé d’en racheter un tout neuf (499 euros) : l’art de gérer le froid jusqu’à vendredi – c’était une journée pleine d’avancées ragmatiques, chaude et productive. Bon,
BNàvous, et bises à Sylviane e&Christiane, je sais qu’elles nous écoutent.
(nb / et les fontaines du 17e, 18e,19e et XXe rondiss ?…)

D. dit: à

Marseille est ze cloaque. Pire qye Grenoble.

D. dit: à

Mais Paris et son crack leur emboite le pas.

et alii dit: à

Manifeste pour la science sociale
Par Bernard Lahire

SOCIOLOGUE
Les sciences sociales sont aujourd’hui l’objet de querelles stériles, mi-scientifiques mi-politiques. Pour s’en éloigner, les chercheurs doivent revenir à l’ambition fondatrice qu’ils ont eu tendance à négliger : dégager des lois, des invariants, des principes, des fondamentaux… Seule l’élaboration d’un programme de travail collectif et interdisciplinaire permettra d’accomplir collectivement ce pas de plus vers une science sociale digne de ce nom, en établissant un cadre intégrateur et unificateur, au-delà des disciplines, comme ont su le faire les sciences du vivant. Lahire

et alii dit: à

rose, et le chabichou?

Marie Sasseur dit: à

Jeudi 2 septembre 2021, rentrée des classes.

Le mot chèvre est également admis comme synonyme de derrick.

Marie Sasseur dit: à

Jojo Savigneau et son enfant triste et très sage, parfait de partout, éternel premier de la classe, vient de mourir a 92 ans.
Il y a des necros plus dégoulinantes que d’autres.

et alii dit: à

Au moins 15 millions de doses de vaccins anti-Covid ont été jetées aux États-Unis depuis le 1er mars, selon le média américain NBC ce mercredi 1er septembre, citant des informations obtenues auprès des autorités sanitaires américaines.

Jazzi dit: à

Le léZard n’oublie pas JJJ et a inventorié les fontaines des 17e et 18e arr., qui manquent d’eau !
Il a aussi dû aussi rajouter des addenda, édifiants, après être retourné sur place dans les 14e et 16e arr. !

et alii dit: à

Rose, un petit supplément avoir sa chèvre!
En Suisse ; à rapprocher de : devenir chèvre = devenir fou, ou allusion à l’outre en peau de chèvre (Rabelais disait : tirer au chevrotin = boire à l’outre) (MCC) /
parce que « capri », »c’est fini » comme léonore
(: il ne dérive donc pas du latin (capreae = chèvres), mais du grec ancien κάπρος (kapros = sanglier).

Jibé dit: à

A propos du LéZard
Ce qui est remarquable, c’est à quel point ces fontaines induisent une végétation accompagnante et pas l’inverse -sauf quand elles sont conçues dans le cadre d’un jardin. Très peu sont strictement minérales.
Je me souviens d’un magnifique chien, immense et gris, précédant un maître qui le laissait un peu courir, et se ruant dans une fontaine pour boire à grand bruit. Le chien, la sonorité, la fontaine baroque, magique.

et alii dit: à

et qu’en faire?
Toutes nos chèvres sont fabriquées dans notre mégisserie. Tannées exclusivement à base de tanins végétaux, elles bénéficient de finitions différentes selon les divers domaines d’applications auxquels elles sont destinées ; la maroquinerie, la reliure, la chaussure ou encore la décoration.

Chèvres reliures : Les cuirs de chèvre pour reliure sont spécialement conçus pour les travaux minutieux des artisans relieurs tels que le marquage et l’embossage à chaud, la dorure à la feuille, l’estampage… Elles sont proposées en différents grains et finitions, sans oublier les parchemins de chèvres, traités selon les méthodes traditionnelles.

Chèvres maroquinerie : Les chèvres pour maroquinerie ont un toucher naturel et souple. Ce sont des cuirs pleine fleur dont les finitions répondent aux standards de fabrication des clients les plus exigeants. Les collections sont renouvelées 2 fois par an lors des présentations des différents salons internationaux de mode.

Jibé dit: à

JJJ, moi pourmapomme, c’est un moustique qui m’a sauvagement agressé à l’heure où je pissai près de l’érable rouge. C’est l’été et c’est bon. Ici, on mobilise les bras pour les vendanges, c’est l’embauche pour être là dans deux semaines. On peut grapiller dans les vignes, petits grains chauds et sucrés, presque assez.
J’aimerais que ceux qui manquent fassent signe, s’ils (elles) entendent.

Jibé dit: à

Pour rester dans le thème du père, j’au vu Nothomb hier, chez Busnel, avec Chalandon et Dugain, une triade de relecteurs de leur vie. Un drôle de sentiment de mise à poil sur une scène où chacun était au bord des larmes.
Marie Vingtras, avec Blizzard, nous jetait en Alaska, à grands coups de vents et d’aventures, respirons! J’irai voir ce livre là, littérature américaine en inspiratrice. A suivre je pense.

et alii dit: à

obs:
où un tiers des recherches sur internet serait consacré à la pornographie.

scoop:
je n’ai jamais été sur un autre site porno que la RDL

puck dit: à

Jazzi dit: à

Veux-tu jouer avec Flaubert, puck ?
 »

yes ! je l’ai fait, c’est vraiment une initiative absolument géniale du service culturel de la ville de Rouen. Ils veulent aussi construire à la bordure de la ville un « parc Flaubert » sur le modèle du « parc Asterix ».

Le truc que j’ai préféré c’est la balade en fiacre en compagnie du gros Léon (celui qui tient d’habitude la Brasserie chez Léon située derrière l’église), j’ai tellement bien aimé que j’ai refait 3 tours ! L’occasion de voir déchirante avec des épouses pleurs « je veux refaire un tour… je veux refaire en tour… wouiiin wouiiin… » et leur mari qui leur balançait des « non maintenant c’est fini ! on avait dire un tour de fiacre : un tour c’est un tour ! allez viens pour te consoler je vais te payer une crêpe à la banane avec une boule de glace au chocolat ». rien que des maris genre sales petits bourgeois abjects.

puck dit: à

L’occasion de voir des scènes déchirantes

on avait dit

puck dit: à

un des épisodes les plus marquants chez Angot c’est l’affaire Elise Bidoit avec sa phrase balancée au tribunal :

« Je veux que vous compreniez la souffrance que mes enfants et moi avons subie à cause de Christine Angot. A la parution de son livre, j’ai tenté de mettre fin à mes jours. Tout est vrai dans son livre, c’est ma vie. Elle veut ma mort, elle veut détruire mes enfants. » : aucun média n’avait défendu cette femme.

Quand on a soi-même une fille bientôt en âge de devenir mère on se sent compte que la dernière chose que l’on désire c’est qu’elle subisse le même sort. C’est là où je dis sa fille a transformé Angot. C’était aussi le cas de Camille Laurens qui l’explique dans une interview.

C’est le genre de truc qui ressortira probablement dans 40 ans quand la génération future jugera cette génération et les dégâts causés par l’autofiction.

puck dit: à

le cas du bouquin où Angot parle du banquier qui a une grosse queue c’était différent : le type a trompé sa femme, Angot a inconsciemment voulu le punir, elle a réussi et c’est peut-être une bonne chose. Elle aurait dû titre ce livre : « le Jugement dernier ».

certains écrivains se prennent pour Dieu tout puissant : c’est la différence entre ces écrivains et Dieu.

JiCé..... dit: à

SUJETS AUSTERES

Loin de ces sujets lubriques qui n’intéressent que des pervers comme l’ami Puck (formation Mariste, rue Sainte Victoire Marseille, prix d’Excellence 1946), abordons le problème de la conduite de la cité par les meilleurs.

– Jeux Olympiques électoraux, les meilleurs mais si rares !
– Jeux Paralympiques électoraux, les nuls démocrates partout en Europe

Jazzi dit: à

« Tout est vrai dans son livre »

C’est le plus beau des compliments, puck !
J’ai longtemps défendu Christine Angot, sur ce blog, soutenu uniquement par C.P.
J’avais même dis qu’elle méritait le Goncourt pour « Un Amour impossible ».
Cette fois-ci, elle ne pourra y échapper !
Heureux de voir que Marie Sasseur reprend le flambeau…

Jazzi dit: à

dit…

Disons que c’est plutôt le Goncourt qui ne pourra lui échapper.

et alii dit: à

je suis d’avis de défendre ANGOT,maintenant plus que jamais ; il n’y a pas que le Goncourt!

et alii dit: à

Sélectionné pour l’International Booker Prize 2021

Quand nous cessons de comprendre le monde est un livre sur les liens compliqués entre la découverte scientifique et mathématique, la folie et la destruction.

Fritz Haber, Alexander Grothendieck, Werner Heisenberg, Erwin Schrödinger, voilà quelques-uns des sommités dans la vie troublée desquelles Benjamín Labatut plonge le lecteur, nous montrant comment ils ont été aux prises avec les questions les plus profondes de l’existence. Ils ont des coups de génie sans pareil, s’aliènent amis et amants, sombrent dans l’isolement et la folie. Certaines de leurs découvertes remodèlent la vie humaine pour le mieux ; d’autres ouvrent la voie au chaos et à des souffrances inimaginables. Les lignes ne sont jamais claires.

À un rythme effréné et avec une richesse de détails troublants, Labatut utilise les ressources imaginatives de la fiction pour raconter les histoires des scientifiques et des mathématiciens qui ont élargi nos notions du possible.
https://www.nyrb.com/products/when-we-cease-to-understand-the-world?variant=37890166784168&utm_medium=email&utm_campaign=NYRB%20September%202021%20Monthly&utm_content=NYRB%20September%202021%20Monthly+CID_f0d7c6578a9aaf47d912e745defd5c27&utm_source=Newsletter&utm_term=WHEN%20WE%20CEASE%20TO%20UNDERSTAND%20THE%20WORLD

et alii dit: à

ENTRE GÉNIE ET FOLIE, LE ROMAN VRAI DE LA SCIENCE AU XXe SIÈCLE

Quel est le lien entre le bleu de Prusse et la capsule de cyanure d’Hitler ? Comment une seule et même invention a-t-elle pu à la fois entraîner la mort de millions de gens et permettre de nourrir l’ensemble de la population mondiale ? Comment les travaux du plus grand mathématicien de notre temps sont-ils restés cachés pendant vingt ans dans un village perdu des Pyrénées ? Et si c’était grâce à la tuberculose qu’a été développée la théorie de la mécanique quantique ?

Galerie d’anecdotes extraordinaires – parfois trop belles pour être vraies, souvent trop vraies pour être belles – et de portraits saisissants des plus grands esprits du siècle passé, Lumières aveugles avance sur la ligne trouble qui sépare le génie de la folie, nous entraînant avec verve, passion et suspense dans les coulisses de la science.

Révélation de la nouvelle scène littéraire sud-américaine, Benjamín Labatut, en digne héritier d’un Roberto Bolaño, mêle à l’enquête historique l’imagination narrative la plus débridée pour évoquer le feu qui consumait ces hommes à l’intelligence exceptionnelle – et qui menace, aujourd’hui encore, de consumer l’humanité tout entière et la planète sur laquelle elle a élu domicile.

Benjamín Labatut est né à Rotterdam en 1980. Il a grandi à La Haye et à Buenos Aires avant de s’installer à Santiago du Chili, où il vit toujours aujourd’hui. Ses deux premiers ouvrages (un recueil de nouvelles et un essai) ont reçu plusieurs prix au Chili et au Mexique. Lumières aveugles est son premier livre traduit en France.
https://www.seuil.com/ouvrage/lumieres-aveugles-benjamin-labatut/9782021429329

Marie Sasseur dit: à

@Heureux de voir que Marie Sasseur reprend le flambeau…

Heu, oui ?

C’est peut-être une façon de  » voir » les choses.

J’en sais rien en fait, car en 2002, la rdl n’existait pas.
Et ce n’est pas sur ce blog, a une exception près, deux en comptant Delaporte, que j’ai pu reconnaître un lecteur d’Angot.

et alii dit: à

The Book of Blam , The Use of Man , Kapo : Dans ces trois romans impitoyables, l’auteur yougoslave Aleksandar Tišma a anatomisé le sort de ceux qui ont survécu à la Seconde Guerre mondiale et aux camps de la mort, pour vivre dans un monde hanté par la mort. Blam a simplement eu de la chance et peut à peine se regarder dans le miroir. En revanche, les amis adolescents de The Use of Man sont condamnés à vivre indéfiniment en endurant toutes les afflictions. Kapo parle de Lamian, qui a traversé Auschwitz en servant ses maîtres allemands, sachant qu’à tout moment et pour n’importe quelle raison, son « statut spécial » peut être révoqué.

Mais la guerre est finie maintenant. Auschwitz appartient au passé. Lamian s’est installé dans la ville bosniaque de Banja Luka, où il occupe un poste respectable en tant que surintendant de la gare de triage. Tout est assez normal. Puis un jour dans le journal il tombe sur le nom d’Helena Lifka, une femme — comme lui une Yougoslave et une Juive — qu’il a violée dans le camp. Peu de temps après l’avoir vue, âgée et disgracieuse, Lamian est inondé de culpabilité et de terreur.

Kapo , comme les autres grands romans de Tišma, n’est pas simplement un document ou un acte de témoignage. Le don terrible de Tišma est de voir avec la clarté impartiale d’un artiste comment la peur, la violence, la culpabilité et le désir – que ce soit pour la vie, l’amour ou la simple compréhension – sont inextricablement liés dans le sein humain.
https://www.nyrb.com/products/kapo?variant=30272677347465&utm_medium=email&utm_campaign=NYRB%20September%202021%20Monthly&utm_content=NYRB%20September%202021%20Monthly+CID_f0d7c6578a9aaf47d912e745defd5c27&utm_source=Newsletter

et alii dit: à

Ce qui est sûr, en revanche, c’est que le « tecuitlatl » a réellement existé. Il s’agissait en fait de galettes sèches confectionnées à partir de spiruline, une algue bleue microscopique (une « cyanobactérie ») vieille de 3,5 milliards d’années !
Et cette micro-algue a des qualités nutritionnelles exceptionnelles ! Très riche en protéines, elle contient tous les acides aminés dits « essentiels » (soit non synthétisables par notre organisme et devant être apportés par l’alimentation).

Il s’agit de la matière première nécessaire à la fabrication de toutes les molécules (protéines, hormones, enzymes…) indispensables au bon fonctionnement de notre corps.
BON APPETIT

puck dit: à

Jazzi dit: à

« Tout est vrai dans son livre »

C’est le plus beau des compliments, puck !
 »

Jazzi, pour moi la « véracité » (au sens où tu l’entends) c’est tout sauf une qualité littéraire.

cela dit cela ne m’étonne pas que pour toi ce soit une chose essentielle : comme Angot tu déteste tout ce qui est « fictionnel ».

Sasseur c’est différent : elle défend Angot parce que ça lui donne l’impression de lutter contre l’inceste et autres abus sexuels. Ce qui complètement débile parce que Angot n’a contribué en rien à ce combat des femmes.

En plus, contrairement à toi Sasseur est capable d’aimer à la fois de le Tellier et Angot : chose dont je suis totalement incapable, c’est comme l’huile et l’eau : incompatibles.

puck dit: à

j’adore quand elle dit par exemple des trucs du genre : un écrivain ne peut pas écrire sur une chose dont il n’a pas fait l’expérience.

le genre de propos qui permet de se donner une petite idée son niveau d’intelligence.

puck dit: à

sans compter la façon de le dire, elle balance ses vérités à la Onfray, droit dans ses bottes, ne doutant jamais de rien.

Onfray on peut lui pardonner parce qu’il est philosophe et en philo mêmes les sceptiques ou les relativisme ne doutent jamais de leur scepticisme ou de leur relativisme.

par contre la littérature, en principe, ça permet d’instiller le doute, parce que nos existences sont faites de doutes, d’erreurs, de culpabilité, de honte, de regrets etc… dans un monde qui lui-même nous échappe, et dont nous ne possédons jamais la lucidité nécessaire pour le cerner et le comprendre, même pour nos vies nous n’avons jamais la lucidité permettant de la comprendre.

du coup moi des gens qui parlent comme Angot ou comme Onfray, droits dans leurs bottes, sûrs de leur certitudes, avec tout leur totalitarisme qui déborde de leur tête, je trouve ça à la fois très con et en même temps très flippant, à la fois eux et aussi surtout tout cet environnement qui l’adoube.

et alii dit: à

PUCK CEST PARCE QUE VOUS NE SAVEZ PAS CHOISIR VOS BOTTES.ESSAYEZ CELLES du chat botté!

et alii dit: à

sorry puck

Janssen J-J dit: à

l’humanité erdélienne vous saura gré d’avoir souvent « flippé » pour les cons et les connes fourvoyés… Vous nous (les) sauvez, quelque part… car ce n’est pas nous (les) mépriser que de flipper pour celzéceux qui vous font Flipper grave ou un brin…
(le Dauphin du 19 et du 20e)… Bàv, ciao !…

rose dit: à

C une immigrée.
Bor… de m…., vient de Nîmes nous squatter le vallon des off.

Des addenda édifiants.
Un addendum dum dum.
Des addenda guili guili.

Nota bene : sa recette des baklavas.
Ses photos du Vallon des off.
Ses deux body-guards. Pourraient être trois, voire quatre pour faire le tour.
L’est pas encore allée à la Calade, ni à la traverse des Maurelles à Frais Vallon, 12 ème. J’ai eu peur, mais peur. Le grand frisson.
L’est tombée amoureuse de chez moi. Obligée de partager ; t’as pas le choix biloute.

rose dit: à

La religion est zoroastrisme.
Le but est « […]pour qu’ils soient dévorés par des vautours, protégeant ainsi la terre de toute souillure »

In wiki
Pour les correcteurs de langue sauce piquante.

Nota bene :
Peu sont concernés.
Etc.

Pas choquant du tout un singulier qui suit nombre et puis deux pluriel ensuite pour accorder les verbes.
Se fier à son oreille ?

rose dit: à

Des addendi guili guili

rose dit: à

Parmi eux, un nombre sans doute important ira aussi visiter les caves de Roquefort, achèteront du fromage de lait de brebis ou mangeront de la viande d’agneau dans les restaurants. » L’esprit habitué, nous allions dire routinier, s’attend à l’accord des trois verbes soit au singulier soit au pluriel, soit avec un nombre soit avec eux etc.

Etc.
Etc.

Si on avait écrit parmi eux certains le pluriel devenait inévitable, mais là un nombre induit le singulier.
Et pourquoi pas, amha ?

Janssen J-J dit: à

@ X
qq éléments de réponses dans ce compte rendu plus fouillé que celui de la RDL, à partir desquelles on pourrait rebondir et discuter de ces « benêts de policiers »… (in EAN, 1/09/2021),

Tanguy VIEL, La fille qu’on appelle. Minuit, 176 p., 16 € (par JN Czarny)

Max Le Corre est le chauffeur de Quentin Le Bars, maire d’une cité portuaire bretonne. Le personnage principal du nouveau roman de Tanguy Viel est surtout champion de boxe et sur le point d’affronter un jeune adversaire, pour marquer, à quarante ans, son retour sur le ring. Sa fille, Laura, est venue le retrouver dans sa ville natale. Elle cherche un logement. Le maire peut l’y aider. Tout semble simple. Trop simple. Tout bascule avec ce retour d’une enfant peu prodigue.
La fille qu’on appelle est bâti en deux parties ou deux actes, comme si la tragédie n’avait pas besoin des cinq temps traditionnels pour se déployer. Et puis les dieux, s’ils s’en mêlent, sont moins déterminants que l’argent et le pouvoir. Le Bars est-il « maire de la ville ou seigneur du village » ? Quand elle entre dans l’imposant bâtiment, Laura s’interroge. Elle est jeune, belle, le regard des hommes vient « s’effranger sur elle », celui de la secrétaire, soupçonneuse ou jalouse, « tombe comme une guillotine de la tête aux pieds ». Dans le bureau, tout devient vite affaire de place et de déplacements. Le maire tutoie la jeune femme, sa respiration se modifie, il lui prend la main. Quelque chose se noue là, qui prendra bientôt une tout autre dimension.
Le pouvoir encore, comme toujours. Le maire tient sa ville, il tiendra Laura « en laisse ». Plutôt que celle « qu’on appelle », que « la fille de Max », ou « du grand boxeur », elle est « la fille de son chauffeur ». Impatient, indélicat, méprisant. Quant à Max, Le Bars le tient comme un « cheval reconnaissant dès qu’on lui lâche le mors ». Sa puissance, Le Bars la doit à tous les « poissons » qu’il rencontre au Neptune, le casino de la ville. Là règne Franck Bellec, dont le costume blanc a pu provoquer la « risée collective » avant de « susciter le respect absolu ». Bellec et Le Bars se disent amis : ils sont comme suzerain et vassal. On ne sait toutefois pas qui occupe la fonction suprême. C’est affaire de circonstances. Le narrateur les compare à des araignées dont les toiles se seraient emmêlées. Ces toiles pourraient tomber, si une Parque en colère donnait un coup de balai.
Mais le risque est minime : ils sont deux hommes qui connaissent la « grammaire » puisque être maitre est d’abord l’être de la langue, des mots comme de la syntaxe : « Et si quelqu’un autour d’eux avait suivi leur conversation, à partir de là il l’aurait trouvée bien opaque, incapable de saisir ce qui se disait vraiment sous des mots aussi abstraits que “on”, ou “quelque chose”, rompus qu’ils semblaient être, les deux hommes, à cette grammaire des pronoms et des points de suspension, comme deux mafieux qui auraient pour code d’honneur de ne jamais désigner les choses par leur nom. »
Tout est là, dans ces mots évités ou remplacés par d’autres, et quand la relation entre Le Bars et Laura fait scandale, quand la jeune femme porte plainte et dénonce le comportement de ce maire qui se veut « proche des gens », lui réplique en disant « son respect et son amitié » pour celle dont il a abusé. Quelques euphémismes, des paroles saturant la parole de la victime, et on s’en trouve quitte lorsqu’on possède les mots. Tanguy Viel n’écrit pas un roman « sur » la politique, sur la puissance qu’elle confère à certains. Rien de documentaire, même si le comportement de Le Bars et les motifs de sa mise en examen peuvent rappeler des faits réels. L’auteur poursuit ce qu’il a commencé avec Paris-Brest et Article 353 du Code pénal (Minuit, 2009 et 2017) dans lesquels des notables locaux faisaient l’expérience de la gloire et de la chute, quand la panique s’installe et que « rien ne les vexe plus que d’être rattrapés par la trivialité du monde dont un temps ils ont oublié qu’ils faisaient encore partie ».
La trivialité du monde, c’est Max, c’est Laura. Quand elle décide de porter plainte et répond aux questions de deux policiers souvent aussi benêts que des « collégiens de bonne volonté », elle évoque « un monde normal » pour parler de la première rencontre avec le maire, « un monde où chacun reste à sa place ». Bien des faits, dans le roman, ont à voir avec la place et les déplacements, au sens propre autant que figuré. Ainsi, quand Le Bars s’approche de Laura sur le lit, dans la chambre qu’elle a obtenue au Neptune, la jeune proie ne peut lui échapper et monte sur la « première marche ». Lorsqu’elle use de cette métaphore avec les deux policiers, ils ne comprennent pas : « Vous savez pourquoi la deuxième fois est pire que la première ? Eh bien parce que dans cette fois-là, dans cette deuxième fois, il y a toutes les suivantes. » La seconde marche est celle qui la rend honteuse et lui donne envie de se révolter. Cette révolte, ce sera son père qui la mènera à bien, et on apprendra à la toute dernière page ce qu’elle lui coûte au plan pénal. Mais la jeune femme n’était-elle pas montée sur la première marche avant de rencontrer Le Bars, quand, travaillant dans « la mode », elle avait posé en (ou sans) sous-vêtements, pour des revues que l’on préfère cacher ? Chacun en jugera.
Un père « sauve » sa fille. Ainsi pourrait-on résumer la seconde partie du roman, mais l’inverse serait également vrai : une fille sauve son père. Il a boxé, il a perdu mais pas forcément le combat que l’on croit. Certes, il a fini étendu à la troisième reprise, accablé par les coups de son adversaire, les accueillant plus que les encaissant, comme en un autre printemps Jésus a subi les insultes et les coups, mais la douleur et la rage de Max, c’était surtout de savoir Laura assise « entre ses deux bourreaux », le maire et Franck Bellec. Franck obéit au maire, et le maire obéit à son désir. Tous deux sont au centre : « Dans toutes les histoires il y a cela, un passé minéral qui sert de socle à tous, du genre qui dans les livres se rédige au plus-que-parfait, paysage de ruines qu’on trouve en arrière-plan sur certains vieux tableaux. » Les temps, la façon dont le romancier fait coulisser le récit du présent au futur dans le passé ou au passé composé, créent ce sentiment de fatalité que l’on retrouvera à la dernière page : la plainte de Laura restera sans suite. Le dire ici importe peu : on s’en doutait ; elle ne peut « s’installer en haut de la situation ».
Qui voit sait. Hélène, « la plus fatale de toutes les putes de la côte bretonne », sœur de Bellec, contemple de sa fenêtre Le Bars, Laura et Max. Elle fait le lien. Autrefois, elle a séduit Max, a provoqué le départ de Laura et de Marielle, épouse de Max, et telle « l’abeille fécondant du regard tous les hommes-fleurs, elle a aspiré tout ce qu’il avait, peut-être ce qu’il était, jusqu’à ce que la lumière des rings s’éteigne ». Hélène garde quelque chose de magnétique, que rendent les éclairages du casino. Elle a vieilli plus vite, elle n’a plus cette allure de « pute princière » mais elle est là et elle a compris.
Elle est donc l’un des deux regards qui nous mènent de lieu en lieu, l’autre étant celui d’un narrateur fantôme ou régisseur dont la voix s’entend off, comme celle que l’on entend dans les films des frères Coen. Ce « je » intervient ici ou là, avec une légère ironie, et devient un « nous tous » lors du discours du maire devenu ministre, dans l’ultime scène du roman. Un discours à toutes les autorités locales, du maire remplaçant au président de la commission des sports. On se rappelle une scène semblable, lors de comices agricoles. Tanguy Viel est un joueur et nul n’oublie La disparition de Jim Sullivan (Minuit, 2013), exercice d’admiration sur le roman américain comme nous le lisons de ce côté-ci de l’Atlantique.
On n’épuise pas la richesse d’un tel roman, à la construction subtile et savante. La façon dont les personnages se croisent, se lient, se lâchent, provoque des rebondissements, donne à cette tragédie sociale les contours du roman noir, de ces romans qui fascinent longtemps.
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rose dit: à

Très belle analyse du roman se Christine Angot, par Sasseur.

« Et où elle a d’ailleurs fini par se faire laminer, chez Ruquier »

Cette scène scandaleuse est montrée dans le film : ai constaté les animateurs de ce talk-show tellement imbéciles ; cela ne s’est pas amélioré depuis.

rose dit: à

Avant celui-ci, les cinq derniers commentaires ne sont pas de moi, on pseudo a été subtilisé.

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