Lire et écouter le théâtre… à défaut d’y aller !
Si ce que tu as à dire n’est pas plus beau que le silence, alors tais-toi (vieux proverbe chinois). En effet, rien n’est plus beau à condition que, comme la solitude, il soit choisi et non subi. Pendant plus d’une année, les passionnés de théâtre, comédiens, metteurs en scène, techniciens, spectateurs, y ont été condamnés en se demandant : que faire du théâtre en attendant le théâtre ? Même si cela n’a pas hâté sa résurrection lors des temps récents de confinement et de couvre-feu, le lire et l’écouter. Ce n’est pas d’aujourd’hui que cette double activité nous est offerte mais les temps difficiles nous y ramènent.
Même les grands lecteurs de littérature n’inclinent pas spontanément à la lecture des pièces au motif qu’elles n’ont pas été conçues pour être enfermées dans les pages d’un livre mais pour vivre sur une scène. Exception faite des grands classiques, d’Eschyle à Claudel en passant par Shakespeare, le fait est qu’on ne lit guère nos contemporains alors qu’ils sont publiés. Les catalogues de l’Avant-scène, d’Actes sud-Papiers, de l’Arche, des Solitaires intempestifs, des éditions Théâtrales notamment témoignent de la richesse de cette production à faible tirage car y sont publiés des livres considérés comme à dire et non à lire. Il suffit pourtant de se laisser tenter par exemple avec l’un des plus récents la trilogie de Florian Zeller Le Père/ La Mère/ Le Fils (290 pages, 8,60 euros, Folio Théâtre).
L’expérience est d’autant plus saisissante car ces textes nous arrivent précédés par leur immense succès sur les planches un peu partout dans le monde. L’apparence est trompeuse : ce sont des pièces complexes dans la plus simple tenue, d’une langue vive, sobre, parfois cruelle, aux didascalies réduites a minima (la préface du critique Gilles Costaz est à cet égard particulièrement bienvenue). Pour le Père, écrit sur mesure pour Robert Hirsch, on entend sa voix entre les pages, on le voit s’égarer puis s’effondrer dans le labyrinthe du temps. Le lecteur ne doit pas seulement imaginer un décor, des mouvements, des personnages : il lui faut les visualiser par la seule puissance d’évocation de l’écriture.
Tout ce qui apparait au théâtre a vocation à disparaitre. Ce qui reste, c’est le texte. On ne peut pas revoir une pièce, fut-ce le lendemain de la première fois, car ce n’est jamais exactement la même chose. Mais on peut la relire ; sauf que là, si ce n’est pas elle qui a changé, c’est souvent le regard du lecteur qui a pris de l’âge entretemps. On peut aussi la revoir à plusieurs reprises dans la même mise en scène avec les mêmes comédiens sur une période vingt ans, expérience à tenter en ce moment avec par exemple Six personnages en quête d’auteur (Sei personaggi in cerca d’autore dans la traduction de François Regnault) de Luigi Pirandello, cent ans presque jour pour jour après sa création au Teatro Valle de Rome (elle le fut à nouveau mais en français deux ans après par Georges Pitoëff, dans une adaptation de Benjamin Crémieux, à la Comédie des Champs-Elysées). Dirigée par Emmanuel Demarcy-Mota au Théâtre de la Ville/Espace Cardin à Paris, la troupe qui rend justice à cette apothéose de la mise en abyme, est habitée sinon hantée depuis tant d’années par ce classique qu’elle a joué un peu partout en France et dans le monde, notamment un Hugues Quester exceptionnel dans le rôle du père.
A défaut de lire le théâtre, on peut l’écouter le soir sur France Culture. Cela se sait peu mais Radio France est depuis longtemps le premier employeur de comédiens en France. Chaque soir, ses « Fictions » captivent « un certain nombre » (douloureuse litote) d’auditeurs eu égard à la concurrence de la télévision ; mais c’est l’honneur d’un media du service public de les maintenir de longue date à un tel niveau de qualité et d’exigence hors du souci obsessionnel des chiffres, ce qui n’empêche pas parfois des audiences, disons… relativement spectaculaires ! et de plus en plus, le succès phénoménal des podcasts les sortant de la confidentialité (de Madame Bovary aux Aventures de Tintin !). Blandine Masson, qui les dirige depuis 2005, s’en est faite l’inspirée chroniqueuse dans Mettre en ondes (216 pages, 18 euros, Actes sud-Papiers).
Son récit, aussi passionné qu’érudit, n’est pas seulement une ode à la radio et à ses artistes depuis la première pièce radiophonique (en 1924 !) avec un long et vibrant portrait d’Alain Trutat en hommage à tout ce que la fiction radiophonique doit à ce pionnier humaniste et inspiré dont l’influence fut aussi réelle que l’empreinte, anonyme. L’auteure y propose en creux une profonde réflexion sur la voix, ces voix dont la houle légère et prenante exprime une sensation qui arrache l’auditeur à sa solitude, au plus profond de l’intime et de l’intériorité, la nuit de préférence.
A l’écoute de ce théâtre-là, plein d’images mentales qui ne donnent rien à regarder mais tout à imaginer, qui exige de fermer les yeux pour mieux voir, un théâtre où il n’y a que des gros plans, nous sommes autant d’aveugles invisibles prêts à recevoir des confidences. Ce que le comédien Alain Cuny traduisait par les mots du poète Rainer Maria Rilke :
« Notre intérieur nous environne comme un lointain parfaitement exercé ».
L’art de la diction y triomphe à nouveau en majesté. Jacques Copeau faisait observer que, le texte sous les yeux, le comédien y était délivré du stress, du trac, du souci de la mémoire, du cabotinage, des réactions du public. Tout pour le texte. Il n’est jamais mieux servi que dans la nudité absolue du décor, sans musique ni bruitage, quand un comédien d’exception lit seul assis à la table tel l’inoubliable Serge Merlin empoignant et, selon son vœu, « prononçant » Extinction de Thomas Bernhard, ou Denis Lavant explorant le Beckett de Cap au pire et de la Dernière bande dans la petite salle de l’Athénée Louis-Jouvet.
Tous les genres concevables sur une scène de théâtre s’y côtoient car on peut faire radio de tout. Innombrables sont les comédiens qui ont lu ou joué devant les micros et pas les moindres, la convention historique qui lie la Comédie-Française à la Maison de la radio remontant à 1937 à l’initiative de Jean Zay, ministre de l’Education nationale et des Beaux-Arts. Alain Trutat, maitre de la fiction radiophonique, cet art hybride qui ne renvoie qu’à lui-même, rêvait d’une radio tirée à un seul exemplaire où les comédiens franchiraient chaque soir le cercle de feu au-delà duquel l’état de silence confine à l’état de secret. Ses derniers mots ? « Silence, silence, silence ». Après ça, rideau !
(« Serge Merlin » photo Dunnara-Meas » ; Six personnages en quête d’auteur » photo D.R. )
1 046 Réponses pour Lire et écouter le théâtre… à défaut d’y aller !
Gérard Fromanger. Impression, soleil levant 2019. 2019. Col. Part.
J’ai choisi une œuvre toute récente, réalisée par Fromanger pour le musée Marmottan en hommage à Monet et à son Impression, soleil levant. Avec son centre/soleil du rouge si cher à Fromanger, ses planètes de couleurs pures, sa ligne de passants/acteurs qui ensemble avancent vers la chaleur et la vie, avec sa filiation revendiquée avec l’histoire de l’art, elle me semble refléter au mieux son œuvre, tout comme sa volonté jusqu’au bout de peindre, de vivre….
Et je ne pardonnerai jamais aux fanatiques qui, au nom de la tradition la plus étriquée et minable, ont tant fait dans l’obscurantisme que les vitraux que Fromanger avait conçus pour la superbe église romane d’Anzy le Duc n’ont jamais pu être installés.
Eh bien, nous voilà tous d’accord, Nomadland.
Non.
Pas encore vu.
L’affaire d’Anzy le Duc ici clairement énoncée :
En réponse, tardive, à J.
( Je consulte très sporadiquement ce blog…)
Pat V
Je comprends la polémique.
Aime bcp les vitraux de l’église du souvenir à Berlin, faits par un maître verrier français, à coté de la cathédrale détruite de Guillaume II.
Ceux-ci
https://www.routard.com/photos/berlin/1381370-vitrail.htm
Pat V
N’aime pas du tout ceux-ci.
http://www.musee-de-salagon.com/bienvenue-a-salagon/explorer-le-monument/des-vitraux-contemporains.html
Quasiment, ils m’agressent. I-e je me sens agressée par eux.
Quelles différences « d’interprétation » ?
Les seconds ne me parlent pas.
Les premiers m’émeuvent.
Je voudrai aller voir Soulages avant que de trancher.
Fromanger, aucun enthousiasme pour ses vitraux : paix à son âme toutefois, et aime +++ ses cercles concentriques colorés avec cette foule qui traverse.
Un vitrail pour moi a pour fondement d’être ouvert, open-minded et pas « restrictif ». I-e permettre l’élargissement du regard et pas son rétrécissement.
Ce n’est pas pour rien qu’ils sont situés en hauteur, c’est pour l’élévation de l’âme.
Sinon, nous avons les soupiraux.
@ CP,à propos du théâtre ,à Nohant.Dans un autrefois très lointain, on pouvait on pouvait voir le castelet et presque toute la troupe des marionnettes. Mais,il y eut une restucturation, le bâtiment qui servait de remise aux carioles a été « rénové » les carioles ont disparu et il y a, encore peut-être, une présentation de marionnettes, plus aérée mais sans grand charme. Il y a une édition des pièces de théâtre créées par Maurice à Paris.Je dois en avoir 2 volumes,et un volume d’analise. Intéressant à plus d’un titre.
Quant aux « dessins » de Maurice, j’en des reporoductions,10,12,remarquables. Je déteste Gargilesse, du moins tel qu’on le faisait visiter il y a 10/15 ans, beaucoup de boniments…Et puis la « fausse » descendante de Sand a vendu…beaucoup ! Mais le village de Gargilesse a un tel charme (sans bagole) . Mais ,alors, CP, vous connaissez « La roche bat l’aigue »? Ce sont pour moi des souvenirs très heureuxet charmants. Joyeux séjour pour vous si vous y séjournez.
Gisèle, je sais… Mon épouse vient d’aller revoir Nohant avec des amis et me dit que la « restauration » est au moins propre. Mon souvenir des marionnettes est plus lointain et sans doute avez-vous raison. Je connais en tout cas bien le texte de George Sand en 1876.
Mon beau-père, Maurice Sérullaz, possédait le château de Bonnu. A sa mort, ma femme, sa soeur et les enfants très jeunes de son second mariage l’ont vendu (difficiles problèmes de succession). Mais nous avons gardé des champs, des bois, des jardins et deux maisons là-bas, mon fils Josquin y avait un de ses ateliers, ses cendres y sont sous un grand chêne, nous y sommes souvent, mon fils avant sa mort et nos filles ont agrandi et modernisé les maisons. Il y a pour se baigner le lac du barrage d’ Eguzon, avant que la Creuse ne reprenne son cours, et d’autres rivières comme La Cédelle, sinon La Gargilesse…
L’oncle par alliance de mon beau-père était Maurice Rollinat, de la même famille de Fresselines que le Rollinat qui fut un ami de bon conseil pour George Sand.
Bien sûr, je connais parfaitement Gargilesse, sur la route de Cuzion à Argenton-sur-Creuse, son site, son château, son église, la fresque de « Galopin », etc. J’ai connu aussi Pierre Jamet, ami très proche de mon beau-père et créateur du Festival de harpe. Vous dites juste sur la douteuse descendance de Sand.
J’étais il y a peu à Bonnu, j’y retournerais en août, après avoir retrouvé « mon » Gorbio, qui est plus proche de mes goûts, mais c’est égal : nos enfants et nos petits-enfants seront fidèles au Boischaut berrichon.
Merci pour votre message, chère Gisèle. J’ai été un peu long, mais c’est une fin des commentaires sous ce billet et je ne gênerai personne. Gardez-vous et ayez un bel été.
« J’y retournerai » : mon conditionnel devait vouloir dire que ce n’est pas certain, je ne suis pas fou des verdures et des fleurs. Souriez !
Les carrioles ont disparu.
Une entente cordiale suivie de signature d’un contrat avec la fondation Gianadda en Suisse permettrait bien de remédier à cela.
Ce serait bien le drame s’il ne restait quelques carrioles là-bas, au milieu de Mercédès 1924 et consoeurs, pour remettre dans la remise de Georges à Nohant.
Sinon, nous avons les soupiraux, avec les barreaux.
Je veux bien, Pat V, que les vitraux transcendent la lumière, néanmoins, le soupirail doit aussi permettre la circulation de l’air, anti-humidité*, au contraire de nos églises gothiques et romanes, et autres non assimilées, aller voir Sylvacane, bâton de pélerine en main, dont il apparaît impérieux de chasser toute humidité contraire à la conservation des Rubens et autres hommages à un sauveur patenté.
*Anti-humidité
Au secours, les livres tiendront-ils cinq ans ?
Avant hier, retrouvé un petit « théâtre », en carton serré, l’ai regardé avec tendresse et un trois fois plus gros 1ère École Internationale littérature- espère que ce seront mes cours dont celui sur L’Étranger de Camus.
Le gros sel a figé comme du permafrost : horresco referens. L’est glacé et solide. L’on ne pourrait y planter la pointe d’un couteau. Ceux- là de cartons, dans trois mois deux ans emballés mes livres, mes bébés, mes enfantelets et Victor Hugo La Légende des Siècles que je vais te le sortir de là pour que nous puissions passer l’hiver ensemble, sans que l’un de nous deux ne s’en aille à constater que nous ne sommes pas allés jusqu’à l’amour, puisque nous y sommes allés.
Victor, que je te pardonne Juliette, traître.
Ces gens pour qui l’orthographe est une étrangeté.
Ces femmes qui tolèrent que leur homme dansent avec un autre homme.
Ceux qui ne manquent pas d’air, et ceux à qui il manque l’r.
Pas de cocotiers sur la plage à Copacabana.
Jacques Drillon
Je vous suis mais n’ai pas encore trouvé la réponse.
Le chorus, l’harmonie, le répons, mais comment se nomme cette manière de s’emboîter, l’homme au piano, heureux et léger, et la femme debout, calée dans l’arrondi du piano, qui connaît les paroles par coeur et se partage le phrasé avec l’homme, de sa voix rauque -ah les méfaits du tabac- et grave. Lauren Bacall.
L’amoureuse d’Humphrey.
(difficiles problèmes de succession).
Nous savons ce que c’est rose et moi-même.
Mais nous sommes demandé nuitamment si le notaire qui a la plume n’était pas véreux.
En effet, dresser un certificat de carence à la demande de l’acharnée, alors qu’il y a eu un seul rendez-vous non honoré pour me permettre de faire l’inventaire des biens de mon père.
Les bijoux, pas de trace, et le bateau, à l’Estaque, le CAMS est bouclé désorlais.
Faudrait faire tout un cinéma pour entrer.
Seul l’appartement de Monette avec qui ai partagé la même cacarinette dans la tête a été inventorié, au pied de la Bonbe Mère, boulevard André Aulnes.
Et de château point.
Dieu grand merci. Lorsque déjà l’on est incapable de garder dans le patrimoine l’appartement bourgeois de grand standing aux baies vitrées gigantissimes, qu’aurait-on fait d’un château si ce n’est prendre des décisions imbéciles style combler les douves et supprimer le pont levis.
Désormais.
Le club de l’aviron marseillais.
Et le S, tiens ?
La Bonne Mère crénom.
La mienne est dans une forme éblouissante.
Alors que je me remets péniblement après huit jours à dormir comme un sonneur, nous avons enchaîné dominos, belote (quelle déculottée) et scrabble sans coup férir.
Elle ne supporte plus cette viande hachée qu’on lui met dans l’assiette et refuse désormais d’en manger même une miette.
Quand nous sommes partis, a pleuré. Ai alors le couteau dans le coeur.
Suis sortie de la bagnole, lui ai dit qu’elke allait bientôt partir, quand a -t’elle demandé.
Nota bene : non, on ne prend pas en photo un mort.
Le CAM.
De s point.
Et Thétis, quelque part, amarré sur ses aussières.
Je ne suis pas folle des dernières demeures non-plus.
Dieu me garde.
Certes qu’entre la Creuse et le Haut Var l’écart est aussi grand qu’entre Rome et Naples, et que sachant raison garder, la comparaison est vaine quoique la sécheresse brûlante de l’une puisse se rapprocher de la pauvreté de l’autre.
Pat V
C’est à vous que j’avais à dire cela, mon dieu que de détours éloignant de l’idée à soumettre à votre sagacité.
La fonction première d’une église est la prière. Elle est le lieu de regroupement en vue de rendre hommage, d’honorer.
Je ne conçois pas mais il est -des églises autant que des écoles- dans nos campagnes chéries, des bâtiments dont la fonction première est dévoyée.
Dans les unes, on ne prie plus.
Dans les autres, on n’apprend plus.
Certes, avoir un occulus dans le salon, ça en jette auprès de l’aéropage, qui, l’été, vient s’encanailler auprès de ces arriérés.
L’hiver c’est si mal chauffé.
Je pense à Oppède le Vieux, habité par Consuelo de Saint Exupéry, quelques années durant seconde guerre mondiale, et chez moi aussi, où, derrière place du Palais, chapelle médiévale de grande hauteur sous barreau a été annexée propriété privée.
Non, Pat V. Non.
Alors, les vitraux rococco, non Pat V, non.
Quoique l’on puisse toujours recreuser des douves et les remettre en eau.
Comme réinstaurer le fonctionnement du tramway sur la Canebière, mais au prix de couler Tacussel.
Et qui se remet de ça ?
Personne.
Marseille sans Tacussel, c’est comme la soupe au pistou sans pistou, au secours à l’aide.
Et la guillotine pour celle qui met des carottes dans la soupe au pistou.
Me questionne sur ce Hus, C-P.
Bonnu <- Bonhus
Bon usage ou bon lieu ? Forteresse quoiqu'il en soit.
Autrefois bien lointain.
A-t’on vu déjà un autrefois bien proche ?
« Découvrez les coulisses des théâtres de Nohant et la troupe de marionnettes conçues par le fils de George Sand, Maurice. Décors, accessoires, castelet et marionnettes sont fabriqués à Nohant par Maurice et ses amis. Cette troupe de bois et de tissus transforme chaque soir la maison de Nohant en un théâtre merveilleux. »
https://artsandculture.google.com/exhibit/les-th%C3%A9%C3%A2tres-de-nohant/NAICNC-N0rNkJA
Théâtre avec vue sur la mer
« Le fortin de pierre blonde se dresse devant la mer et le ciel gris, enchâssé dans le rocher de schiste anthracite comme s’il était sorti de la pierre, né d’une poussée de l’océan qui, ici, modèle toute chose – c’est lui, le grand metteur en scène. A gauche, la mer. Devant, la mer. A droite, la mer. La mer à perte de vue, qui inlassablement se jette, affamée, dévorante, sur cet élément solide qui la nargue. La terre sous vos pieds ne s’étend qu’à l’arrière du fort.
Plus romantique, ce ne serait pas possible. De loin, on dirait un décor de théâtre. Ou plutôt la maquette d’un décor, avec sa petite casemate comme dessinée en quatre coups de crayon : celui d’un de ces drames qu’affectionnait Sarah Bernhardt, où les éléments sauvages joueraient le rôle du destin.
« La première fois que je vis Belle-Ile, je la vis comme un havre, un paradis, un refuge. J’y découvris, à l’extrémité la plus venteuse, un fort, un endroit spécialement inaccessible, spécialement inhabitable, spécialement inconfortable… et qui par conséquent m’enchanta », écrit l’actrice dans ses Mémoires (Ma double vie, 1907).
Fenêtres sur la baie
Elle débarque à Belle-Ile, la première fois, en 1894. Elle a 50 ans – grosso modo, puisque l’année officielle de sa naissance, 1844, est approximative. Elle est mondialement célèbre, grâce à ses tournées internationales monstres, où elle joue les « tubes » de son répertoire : Phèdre, la Dame aux camélias, la Tosca ou Théodora. »
À Philou
À Jacqueline
En coulisses.
Il y faut bien un brigadier.
https://twitter.com/i/status/1405773018379390981
Avecque les mêmes boutons à la martingale que Brigitte.
Le brigadier
https://g.co/arts/S8aBhZLeqDbQPAxr7
Grave danger, Jibé, vos conclusions sont parfaitement justes. Du genre à réveiller ses assistants à 3h du mat pour exiger une note sur x,y ou z pour le petit déjeuner (straight from the horse’s mouth).
La proximité avec Vlad the Poisoner est aussi familiale, courtesy Madameskaïa…
@rose,
Vous me faite dire des choses que je n’ai pas dites.
Qui parle de rococo?
Pas moi.
( Je passe plutôt en vitesse ici…)
Mais songez aux églises rurales de la contre réforme, tout en dorure et angelots gouailleurs! C’était déjà de la propagande dans les églises! 😉
Je rentre de marcher, on a pris la saucée, mouillés le slip et le pantalon. Le reste en pire!
Bien à vous!
Bref, je dégouline!
(racontpatavi va m’alpaguer!)
La divine
« Sarah Bernhardt découvre Belle-Île en 1894, à l’âge de 50 ans. Son ami, le peintre Clairin, lui en a tant parlé qu’elle décide enfin de l’accompagner. Sous l’effet d’un véritable coup de foudre, elle fait l’acquisition d’un fortin militaire désaffecté à la pointe des Poulains. Durant trente ans, elle y séjournera chaque année pour fuir la vie parisienne éprouvante et s’y reposer, escortée d’une foule d’artistes et de personnalités.
Au terme du long voyage de douze heures de train depuis Paris, dans son wagon particulier et de plusieurs heures de traversée par le courrier qui la débarque devant chez elle, elle se fait déposer sur la plage à bras d’homme.
Elle y offre à ses plus prestigieux invités, dont le Roi Edouard VII d’Angleterre, une succession de fêtes et de soirées animées, au milieu de ses extraordinaires animaux de compagnie.
En 1922, après une ultime tournée, malade et infirme, elle met en vente ses propriétés. Elle s’éteint à Paris l’année suivante sans avoir pu réaliser son dernier souhait de reposer pour l’éternité face à la mer, sur cette île qu’elle a tant aimée.
Le site de la pointe des Poulains est la propriété du Conservatoire du Littoral depuis 2000, géré par la Communauté de Communes de Belle-Ile-en-Mer (CCBI). Inscrit au titre des Monuments historiques.
Depuis 2005, dans l’Espace Nature, une partie muséographique permet la découverte de cet espace remarquable. Des ouvrages et cartes postales sont proposés dans la partie boutique.
Le phare est lui aussi ouvert au public. La pièce principale, entièrement restaurée, est dédiée aux espaces naturels. On y décrit la faune et la flore de l’îlot, ainsi que les grandes étapes de la restauration du paysage.
Depuis avril 2007, le fort et l’Espace Sarah Bernhardt vous invitent à replonger dans le passé grâce à une visite audioguidée d’une heure environ (payante). La vie et l’oeuvre de la tragédienne sont retracées dans la villa, tandis que l’intérieur du fort a été réaménagé à l’identique. »
Ce pauvre papate, avec ses 2 cannes pour donner le tempo du pas de l’oie, l’a fondu sous l’orage.
Nous ce matin sur la plage, nous étions déjà en nage, quand l’orage a menacé.
Pat V
la dorure et les angelots (failli écrire les engelures avec vous sous la saucée, ce n’est pas une faute de style.
Zlors qu’une bicyclette sur un vitrail Pat V ! ? !
@ rôz et aux Gisèles Jaunes de l’Herdélie (?)…
Jacqueline (1924-2021) – Le drame de sa vie maritale avec Gaston, c’est qu’ils ne purent avoir d’enfants. Apparemment, elle était stérile et rien des multiples examens et opérations qu’ils subirent ne leur rendirent sa fécondité. Ils étaient profondément croyants, catholiques messalisants. Étant chacun issus de familles populaires (Saintes et Carcassonne), de petits commerçants rigoristes, ils cultivaient un respect très chrétien pour tous les sacrements, et notamment celui de l’indissolubilité du mariage. Lui, fut un homme respecté à la Rochelle, en tant que premier adjoint durant la mandature glorieuse de Michel C., un maire qui respecta infiniment le sens du service public de monsieur G R. Elle, elle était une petite fonctionnaire cadre aux PTT, et tous deux devinrent un couple estimé de la petite bourgeoisie rochelaise. Ils s’étaient fait construire une petite résidence secondaire dans l’île de Ré à une époque où personne n’aurait eu l’idée d’aller investir un kopeck pour s’enterrer dans cette île non reliée… Gaston R. et Jacqueline y passèrent tous leurs étés, fidélisant pour quelques jours des membres de la famille des R, bien plus que ceux de la propre famille des G. Il faut dire que la plage à trois cents mètres de là, attirait les lointains provinciaux, et le chien Messire n’était pas en reste…, ce petit chien, immense substitut de consolation aux gamins que le couple n’avait pas eu… Et puis G. R. mourut trop tôt d’une crise cardiaque, et J. resta veuve durant plus de trente ans…, Elle embellissant leur maison de la Couarde, en pensant toujours à eux deux, en dépit de la pression immobilière…, dans un quartier qui s’urbanisait rapidement et prenait tous les jours plus de valeur depuis l’achèvement du pont. Depuis que nous étions étudiants attardés (1981 et 1982) avec nos petits jobs d’été (vente de journaux et vente de vins du cru), nous avions été chaleureusement hébergés par le couple (Jacqueline était la nièce de mon grand-père paternel, seule fille d’une famille de quatre, Robert, Guy et Michel), et nous leur étions restés fidèles. Et quand nous devînmes indépendants à Paris, nous les perdîmes un peu de vue… C’est à l’occasion du décès de G. que nous reprîmes nos visites dans l’île, une semaine au mois d’aout, sur demande insistante de Jacqueline qui souffrait beaucoup de sa nouvelle solitude… Baignades et randos avec elle furent durant une dizaine d’années régulières de grands moments de bonheur et de rigolades… Elle nous soulait du matin au soir, tant son besoin de nous raconter, avec ce ton moqueur qui la caractérisait, ses intarissables déboires de l’année écoulée avec ses égoïstes de frères et belles-sœurs –(la fameuse « Belle maman »), ses neveux et petits-neveux, contrairement à la famille de son défunt qui ne l’abandonna jamais. Elle était devenue riche bien que toujours incroyablement « rapiat », mais surtout, elle était restée extravagante, un peu marginale et gênante avec les siens à qui elle faisait honte (notamment l’un de ses deux frères, mon parrain, un vrai cul de bénitier serré qui ne supportait pas ses propos provocateurs)… Elle disait toujours son fait à tout le monde, alors qu’elle était exhortée à se taire en public. Elle ne comprenait pas pourquoi il lui fallait toujours se la boucler… Chacun des siens redoutait ses frasques… Il faut bien reconnaître qu’elle avait un don ou un instinct particulier pour détecter les secrets d’alcôve chez les autres, et une propension à les faire surgir en public par insinuations élaborées, en semant le doute dans le marigot de l’hypocrisie sociale… Elle était vraiment portée sur le sexe et son imaginaire. Elle nous racontait plutôt crument un tas d’anecdotes salaces sur ses voisins de l’île… Les « B. qui baisent », l’histoire compliquée des deux z’homos et de leur famille, l’histoire de la jeune sourde en rut, et tous ces Charbonnel…, riches industriels, respectueux de son mari, mais qui en vinrent hélas à lui faire des misères, après son veuvage… Je me souviens de cet été où elle se montra excitée comme une puce, à l’occasion de l’affaire Clinton/Lewinski… « Eh bé, disait-elle, la Monika, hein, hein !… » avec le grand sourire seyant au regard complice qui n’avait pas besoin d’en dire beaucoup plus sur ses propres fantasmes de fellation… Elle ne nous cachait rien par ailleurs des tentatives de tous ces veufs qui, l’approchant, lui proposaient de se mettre en couple avec elle, elle dont ils sentaient bien l’insatisfaction sexuelle… Elle en était flattée, mais surjouait les indignées : « ils croient quand même pas que je vais me mettre avec eux pour faire leur bobonne, tous ces vieux dont il faut attendre la prise du Viagra pour que ça commence à leur faire effet !… On a bonne mine à les attendre sur le rebord du lit !… » ; « quand vous pensez qu’un vieux moche comme tout, m’a déclaré que je devais bien aimer ça…, avec mes yeux de petite cochonne ! Ils manquent pas d’air ! »… Non, non, ceux qu’elle aimait, c’était les « jeunes-hommes », hélas tous mariés, qu’elle employait pour ses travaux de jardinage ou de réfection de sa maison, et vis-à-vis desquels elle n’hésitait pas à dépeneer des fortunes pour des travaux insignifiants… Elle les harcelait de questions sur leur couple, cherchant obstinément à savoir si elle aurait pu avoir quelque chance avec eux ?… Et elle nous prenait à témoin de sa drague !…, en feignant d’en rire, quand les mecs étaient gênés par ses questions… Elle nous racontait par ailleurs ses innombrables voyages organisés et ses croisières tardives avec de vieilles copines, des veuves riches héritières de la fortune de leur mari, rencontrées à son université du 3e âge à LR…, des extravagantes fantasques, à côté de sa propre sagesse… Elle en admirait la liberté pour mieux se scandaliser de leur conduite… Je me souviens notamment de l’une d’entre elles qui, parait-il, ayant atteint l’âge de 100 ans, se faisait encore ouvrir des huîtres avec du champagne, à tous ses petits déjeuners… Jacqueline avait su rester une femme très soignée et très coquette durant sa longue vieillesse. Elle avait gardé une mémoire phénoménale et une indépendance étonnante… Avant le COVID (à 93 ans), elle prenait régulièrement sa voiture pour aller de LR dans sa maison de l’île de Ré toutes les semaines… Elle avait su résister à la peur, à la suite d’une agression dans la rue, lors de l’un de ses retours nocturnes en ville. Elle était capable de dépenser de larges sommes pour ses goûts de luxe et de coiffure, et pestait contre les jeunes femmes de notre époque qui négligeaient leur apparence. A côté, elle pouvait s’habiller en romanichelle quand elle se mettait à gratter la terre et arracher la moindre mauvaise herbe dans son jardin… Elle se montrait d’une dureté incroyable avec ses employées ménagères, frisant souvent l’odieux… Elle les accusait de fainéantise et leur montrait alors comment elles devaient astiquer les carreaux !… Elle ne leur aurait pas donné un centime de plus sur ses chèques emploi-service… Non pas qu’elle fût une Tatie Danielle, mais elle n’avait jamais su réellement se départir des souffrances de la guerre et de ses privations… Elle ne supportait pas la paresse et la négligence au sujet du caractère sacré de la bouffe…. C’était une petite bonne femme compliquée, généreuse, lâche, avare, envieuse et non conventionnelle. Courageuse et têtue, menteuse, lubrique, curieuse et excitée. Toutes ces qualités et défauts s’observaient dans son rapport à la nourriture. Impensable pour elle de ne pas achever un plat, y compris au resto. Je me souviens avoir pris une avoinée un jour car j’avais jeté la partie supérieure d’huîtres que j’avais ouvertes… Elle alla les récupérer dans la poubelle et se mit à en gratter la chair : « pourquoi jeter le meilleur ? »… Et elle vous engloutissait tout ça au dessus de la poubelle avec son couteau, telle une affamée revenue du camp de Birkenau… Elle riait de ses blagues éculées mille fois racontées, ne se souvenant jamais qu’on les connaissait par cœur… Elle était en revanche totalement hermétique aux nôtres, mais on s’en foutait… L’essentiel était de l’écouter ou de faire semblant de dormir ou de siester, la seule plage de silence qu’elle respectait durant nos séjours, pour avoir la paix… Écouter son trop plein…, c’était le prix de son hospitalité. C’était le deal. Car chez elle, tout était calculé, pour ne pas dire «marchandisé »… Une semaine par an, nous lui devions d’être un public acquis à sa cause, à ses histoires, à sa personnalité… Nous étions jeunes et nous nous en amusions, elle nous délassait du boulot parisien… En vieillissant, bien sûr, elle nous était devenue de plus en plus insupportable !… Les discussions durant des plombes au téléphone où elle radotait avaient fini par remplacer nos visites de plus en plus espacées dans l’île… On n’alla plus la voir, en dehors de l’inviter dans un resto à LR de temps à autre, quand nous descendions dans le sud-ouest… Elle nous racontait son groupe de marcheurs du 3e âge (c’était une grande marcheuse, infatigable ! parmi toutes ces veuves qui voulaient surtout s’accaparer la compagnie des quelques marcheurs en minorité), son université du 3ê âge (UCL) où elle suivait des cours d’histoire de l’art ou autres… Sa dernière décennie fut assombrie par une suite de décès de ses frères cadets et de diverses explosions familiales…, des reconversions et recompositions dans la vie de ses petits neveux dont elle se faisait la chroniqueuse impitoyable (je me perdais totalement dans les méandres de leurs histoires, ce qui l’agaçait…, car j’en oubliais de plus en plus souvent les épisodes successifs)… Il y était toujours question d’ingratitudes affectives blessantes,… après « tout ce qu’elle avait fait pour eux, avec tout l’argent qu’elle leur avait donné, hein » !!! –
Cinquante années de compagnonnages épisodiques avec Jacqueline viennent ainsi de s’achever… Je crois que personne parmi ses siens ne la regrettera vraiment longtemps… Elle avait demandé au petit Anthony, un arrière neveu en pension chez elle, tant aimé…, quand il avait eu 10 ans : « Quand je serais vieille, viendras-tu t’occuper de moi, comme je m’occupe de toi maintenant ? »… Il lui avait rétorqué du tac au tac : « Ah ben ça, n’y compte pas !!! ». Plus de mille fois, elle nous raconta cette anecdote…, qui la faisait hurler de rire… « N’y compte pas ! »… C’était devenu pour nous un mantra… Qu’est devenu Anthony ?… Et H., la « maudite belle maman ? »…, qui la fit tant enrager, sa vie durant… mais qui elle aussi, a « perdu la tête » ?… Les reverra-t-on bientôt ?…
Hier, j’ai embrassé son front glacé, en murmurant à son âme un message pour laisser une longue vie d’E.T., à l’intention – Elle était impériale sur sa couche…, comme une princesse égyptienne, toujours élégante avec ses petites boucles d’oreille de nacre… – Reposée. Je n’ai pas versé de larmes. J’ai pris quelques photos sans sa permission : « aucun sacrilège, m’a-t-elle dit, fais ce que tu as à faire…, j’ai aimé ma vie, aime celle qui te reste à vivre, mon petit cousin ! »….
Vous avez donc connu l’encadreur de St Martin de Ré, 3j.? Et le beau bateau du propriétaire d’ un cru de Bordeaux dans le port de St. Martin?
voui, l’ai bin connu, et pourtant je vous raconte pas ma vie en Ariège, non plus… ô merci RMTV traçante !…
Sans compter les deux pensionnaires célèbres d’Ars…, sur lesquels il y aurait d’autres anecdotes collectives à te raconter, lionel casadessus par exemple… Bàv.
Et Nicole G. en bicyclette!
( J’ai rencontré mon instituteur de banlieue chez l’encadreur, qui habitait Ars en Ré!)
On parle bien de l’encadreur qui était adjoint au maire de St. Martin?
Sa boutique donnait directement sur le port.
Et le pont, vous l’avez déjà vu de nuit, le pont?
Moi, oui.
https://benoitdanieau.com/wp-content/uploads/2015/06/pont-de-lile-de-r%C3%A9-de-nuit.jpg
Superbe portrait en mots de Jacqueline, JJJ.
Oui, Impeccable le portrait 3J!
Tellement beau portrait JJJ, de Jacqueline, tellement honnête parce que comment ne pas être horripilé par ces gens qui parlent des plombes au téléphone !
Merci pour Emma T. ❤
Riche parce que rapiat non ?
Janssen J-J
La famille Casadesus
Très beau moment que la lecture de votre texte,JJJ
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