Poésie
Qu’on le veuille ou non, il en va de Federico Garcia Lorca comme de Heinrich von Kleist : impossible d’évoquer leur œuvre en oubliant l’ombre portée de leur mort sur leur vie. Dans le cas du premier, son exécution par des miliciens franquistes ; dans celui du second, son suicide avec sa maitresse. Les éditeurs de l’Anthologie bilingue de la poésie espagnole dans la Pléiade assurent même que si Garcia Lorca (1898-1936) la domine avec Cervantès aux yeux des lecteurs, les conditions tragiques de sa mort n’y sont pas étrangères ; quant à Cioran, il allait même plus loin en jugeant impossible de […]
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L’histoire mouvementée de l’Irlande, largement conditionnée par ses rapports avec la puissance coloniale britannique, a donné aux liens entre poésie et politique une intrication et une pertinence particulières. Qu’on en juge par les deux exemples qui suivent: trois des chefs nationalistes qui saisirent avec leurs troupes d’irréguliers les principaux points stratégiques de Dublin lors du soulèvement de Pâques 1916, Patrick Pearse , Thomas MacDonagh et Joseph Mary Plunkett étaient des poètes accomplis; William Butler Yeats, le plus grand des poètes irlandais, prix Nobel de littérature en 1923, après avoir assisté de Londres aux violents soubresauts qui allaient porter sur les fonts baptismaux […]
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Il n’y a pas à en sortir : Baudelaire (1821-1867) est l’ambassadeur historique de la collection de la Pléiade. Et réciproquement serait-on tenté d’ajouter. L’explication d’un tel privilège ? Il a été le tout premier du temps où Jacques Schiffrin, son inventeur, oeuvrait à peu près seul à l’animer à Paris au début des années 20, quelques années avant que des soucis financiers le pousse à sacrifier son indépendance en rejoignant Gallimard par l’intercession de Gide. Ses deux volumes d’œuvres du poète parurent en 1931 et 1932. Quoique imprimés sur du papier Bible, ils étaient considérés comme des livres de poche, bien […]
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Etrangement, l’expression « poètes de guerre » a pu évoquer au cours de l’histoire des poètes, engagés dans des unités de combat ou non, dont l’œuvre a été en partie consacrée à la guerre à laquelle ils prirent part et ce depuis l’Antiquité jusqu’à la guerre américaine du Vietnam en passant par la guerre de Sécession (Walt Whitman), la guerre de Crimée (ah, la Charge de la brigade légère de Tennyson…), la guerre des Boers (Rudyard Kipling, Thomas Hardy, Swinburne) la guerre civile espagnole (Garcia Lorca, Antonio Machado) et d’autres encore en Perse, en Albanie, en Irlande, en Russie, en Grèce (qui […]
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Au moment où la poésie se raréfie dans l’air quotidien, elle se purifie dans le cercle des poètes authentiques comme Alain Roussel qui ont conservé le sens aigu des pouvoirs du langage en marchant sur le fil de l’expression poétique, à la fois chemin de crête, fil d’Ariane et cordon de dynamite : trois images qui s’appliquent avec assez de justesse à son dernier livre, Le texte impossible (13,50 euros, Arfuyen). L’oxymore du titre est un ressort de l’imagination : le texte est possible puisqu’il est là, sous nos yeux, découpé en trois parties. D’abord un poème liminaire – « Lettre-poème pour un […]
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La frontière, thème du Printemps des poètes, résonne tragiquement dans notre actualité. C’est l’étymologie même de ce pays agressé : l’Ukraine. Car la liberté est bien ce qui fait frontière, nous sépare et nous singularise. « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits… » atteste l’article 4 de la Déclaration des droits de l’Homme. La fonction de la poésie apparaît ainsi dans son fécond paradoxe : affirmer la liberté et la […]
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Notre pays a-t-il jamais fêté l’anniversaire d’un grand poème en langue française ? Moi non plus, je ne vois pas, aucune date qui s’impose à l’esprit. Oh certes, en fouillant dans les catalogues annuels des célébrations et commémorations nationales (avant qu’une stérile querelle sémantique ne les enterre), on y trouverait probablement un hommage de la nation à la Balade des pendus ou Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage ou L’Albatros ou encore au Bateau ivre. Mais un grand poème unanimement tenu pour un classique moderne et qui ait dominé le XXème siècle dont il est issu ? On a […]
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Cela vous a peut-être échappé mais il y a un sérieux problème avec Louise Labé. Ce n’est pas d’aujourd’hui. N’était-elle qu’une « créature de papier » comme le soutient depuis des années Mireille Huchon, professeur à la Sorbonne ? La longue notice que lui consacre Wikipédia la traite comme une grande poétesse née vers 1524 à Lyon et morte en 1566, entendez une vraie femme de chair, de sang et de mots ; l’encyclopédie en ligne ne réserve qu’une faible place au doute et à la contestation sous le titre « Une imposture poétique ? » et se garde bien de citer Mireille Huchon dans sa bibliographie. […]
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Il y a tellement de manières différentes de tenir son Journal intime qu’on hésite à les ranger toutes sous le label bien délimité d’un genre littéraire défini, avec ce qu’il peut avoir de corseté, de limité et de canonique. Le plus souvent, des notes à leurs dates. Mais bien rares sont les auteurs qui nous épargnent le superflu, l’anodin des travaux et des jours qui ne disent rien d’autre que ce qu’ils disent, les courses à faire et les notes de blanchisserie. En ce sens, le Journal qu’a tenu tout au long de sa vie le poète et essayiste grec […]
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(…) Entreprendre de retraduire une œuvre majeure, même cent fois traduite, et parfois avec éclat, n’exprime nullement une insatisfaction vis-à-vis des accomplissements antérieurs. La retraduction ne porte pas en soi une critique voilée des poètes traducteurs qui vous ont précédé. Comme l’écrit clairement Jacques Darras, lui-même par deux fois retraducteur récent des Sonnets de Shakespeare : « C’est le propre de l’œuvre accomplie, en musique comme en poésie, que de permettre une infinie quantité de lectures, de traductions. […] Sachant qu’il n’y en aura jamais de version définitive […] traduire les Sonnets de Shakespeare, c’est toucher au principe d’insatisfaction » Il […]
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