de Pierre Assouline

en savoir plus

La République des livres

Littérature de langue française

Ce quelque chose d’absent qui tourmentait Laurent Mauvignier

515

commentaires

 Nombre de romans plombent la rentrée, rares sont ceux qui la surplombent. La Maison vide (744 pages, 25 euros, Minuit) de Laurent Mauvignier est du lot. C’est une fresque familiale assez inattendue bien que cet auteur nous surprenne à chacun de ses livres. Puissance d’évocation, écriture ample, tressée, subtile, raffinée, précise… : l’impression provoquée par un tel embarras de richesses, un tel sens du romanesque, une telle émeute de sensations et une telle maitrise, si peu communes dans un roman contemporain, laissent admiratif face à l’ambition du projet et l’ampleur de la réalisation. Surtout, ne reculez pas face à l’épaisseur […]

lire la suite .../ ...
La smala d’Abd-el-Carrère mise à nu

680

commentaires

 D‘Emmanuel Carrère, je suis loin d’être un inconditionnel. Pour n’évoquer que les plus récents, si Le Royaume m’a exaspéré par sa vulgarité, Yoga m’a impressionné par sa violence psychique. Cette fois, avec Kolkhoze (560 pages, 24 pages, Pol), je suis, non sans réserves, conquis et convaincu que ce livre (non pas un roman mais « un Carrère ») sera des rares à dominer la rentrée à juste titre. Il explore l’histoire de ses familles, le côté des Zourabichvili et celui des Carrère d’Encausse (oui, Hélène, l’historienne et académicienne, était sa mère, issue de la famille aristocratique des comtes Panine, hante chaque page […]

lire la suite .../ ...
Trois femmes qui courent dans la nuit

550

commentaires

Avec La nuit au cœur (283 pages, 21 euros, Gallimard), Nathacha Appanah (1973, Mahébourg, Maurice) interroge trois vrais destins de femmes qui ne se connaissaient pas mais sont souterrainement liées par la violence criminelle que leurs maris ou compagnons exercèrent sur elles. Trois femmes qui courent dans la nuit. Elles ne sont pas prises dans la frénésie d’une fuite en avant : elles s’enfuient de chez elles. Seule l’une des trois, la narratrice qui n’est autre que l’auteure, en a réchappé. Elle avait dix-neuf ans, il en avait trente ans de plus ; lorsqu’ils se sont rencontrés, elle venait de […]

lire la suite .../ ...
Cette terre que l’on quitte

1064

commentaires

Si vous vous demandez à quoi peut bien ressembler ce qu’on appelle un « roman-paysage », imaginez qu’il puisse se lire comme on regarderait de tous ses yeux un site fascinant menacé de disparition. Nous sommes en Lozère, au creux d’un hameau du nom de Maheux niché dans le Haut-Pays des Cévennes. Juste en dessous, le lieudit s’appelle Mazel-de-mort. Au recensement de 1954, la commune toute proche de Saint-Julien-d’Arpaon compte 251 habitants et un château du XIIIème siècle. D’une beauté sombre et austère, l’endroit se dépeuple. La famille Reilhan est parmi les dernières à s’y accrocher. La vie y est […]

lire la suite .../ ...
Le voilà, Perret !

Le voilà, Perret !

1404

commentaires

Qui lit encore Jacques Perret (1901-1992) ? Une poignée de nostalgiques, et quand bien même, cela suffirait à maintenir vivant cet écrivain si français disparu en 1992. Mais ne vous méprenez pas : ces lecteurs-là ne regrettent pas tant une époque qu’une certaine manière de s’en sortir avec les mots, de nouer la langue commune à la langue classique pour la faire sourire. Cela a donné des récits (Le Caporal épinglé porté à l’écran par Jean Renoir), des romans (Le Vent dans les voiles, Les Biffins de Gonesse, Mutinerie à bord), des chroniques (Objets perdus), des souvenirs (Raisons de famille) réédités en […]

lire la suite .../ ...
Pour saluer Angelo Rinaldi

1164

commentaires

Angelo Rinaldi, écrivain, critique littéraire et ami d’une fidélité sans égale, vient de nous quitter à 85 ans. Il est mort la plume à la main et ne la reposait que pour demeurer nuit après nuit dans son fauteuil veillé par ses deux chats, un livre entre les mains, Saint-Simon, José Cabanis et autres. Mélancolique depuis son plus jeune âge, un roman demeurait à ses yeux du chagrin développé par la grammaire. Cet artiste n’avait jamais cessé de creuser le même sillon. Il y a quelques mois, j’avais réussi à le convaincre de retourner à Ajaccio, lui, l’enfant terrible de […]

lire la suite .../ ...
De l’effet pervers en littérature

1584

commentaires

Pour qui fait profession d’observer la vie littéraire au quotidien, rien n’est réjouissant comme la rencontre inopinée en librairie de deux livres qui paraissent en même temps, sont peut-être disposés innocemment bras dessus bras dessous dans certaines librairies et se parlent à l’insu de leur plein gré, nouant ainsi une discrète conversation dont tout lecteur peut tirer profit. Le cas depuis peu de La nuit sur commande (180 pages, 19 euros, Stock) de Christine Angot et de Déshonorer le contrat (153 pages, 19 euros, Gallimard) d’Antoine Compagnon. Deux essais dont on pourrait penser a priori qu’ils n’ont rien à voir […]

lire la suite .../ ...
Trois livres pleins d’autres livres

1922

commentaires

Tout écrivain ayant été ou étant resté un grand lecteur, rien de plus naturel que de retrouver dans les siens le reflet tangible, l’écho assourdi, l’ombre atténuée des livres des autres. Cela n’en fait pas des textes cultivés et l’on chercherait en vain la moindre cuistrerie dans la volonté de l’auteur. Juste un hommage subliminal. Un récit et deux romans qui viennent de paraitre l’illustrent avec éclat. On s’y attend sous la plume d’un écrivain comme Jean-Paul Kauffmann mais pas nécessairement dans un livre qui s’annonce au départ comme une enquête sur l’accident de la route qui précipita dans la […]

lire la suite .../ ...
Pierre Michon jouissant en son palimpseste inspiré

1491

commentaires

Déjà du Michon deux ans à peine après Le deux beune, mais qu’est-ce qui lui a pris lui qu’on dit si empêché dans son écriture ? Allez savoir ! J’écris l’Iliade(268 pages, 21 euros, Gallimard), excusez du peu, est une entreprise de réécriture du roman des romans, rien que ça. Il s’est emparé de l’Iliade afin d’y tramer son propre livre. Et pourquoi pas, l’écrivain a tous les droits. Mais contrairement à ce qu’il prétend, ce n’est pas son livre qui est mégalomane : c’est lui, fut-ce sans la moindre trace de paranoïa. Homère, c’est lui. Homère parce que, pour un amant […]

lire la suite .../ ...
Vers un nouveau contrat social entre l’humanité et l’IA ?

2589

commentaires

Que faire d’une invention qui pourrait révolutionner l’humanité autant que la mener à sa perte ? Le problème que cela pose à la conscience de ceux qui en sont les contemporains est vertigineux. On l’aura compris, c’est l’intelligence artificielle qu’il s’agit (IA). Inutile d’avoir récemment réuni un sommet international à Paris pour que la question soit d’actualité. Au vrai, elle l’est en permanence depuis quelques temps déjà. Il est rare que l’on évoque ses bienfaits, ses perspectives enchantées, ses progrès sans aussitôt prévenir de ses effets négatifs. On a vu naturellement des scientifiques s’emparer du débat suscité et de rares écrivains […]

lire la suite .../ ...