de Pierre Assouline

en savoir plus

La République des livres

Littérature de langue française

Deux fois Kafka avec autant d’empathie

873

commentaires

Vingt ans. Il aura fallu attendre vingt ans pour voir paraitre la version française de « la » biographie de Franz Kafka, celle qui fait autorité sous la signature la plus célébrée du plus éminent des spécialistes de son œuvre et, surtout, de sa vie. La première grande biographie alors qu’il existe des dizaines et des dizaines de livres sur des morceaux de sa vie et sur l’analyse partielle de son œuvre. Ce paysage morcelé d’alvéoles a encouragé Rainer Stach à prétendre embrasser la totalité. Il est vrai que l’entreprise avait de quoi faire hésiter ; elle a même fait renoncer Gallimard, l’éditeur […]

lire la suite .../ ...
Présence des morts

Présence des morts

1049

commentaires

Peut-être certains s’en souviennent-ils : le titre de ce billet est emprunté à celui d’un livre d’Emmanuel Berl paru en 1956. Un beau titre pour un récit s’interrogeant sur les traces mnésiques que laissent en nous les personnes qu’on a connues et parfois aimées, certaines réduites à un halo des plus flous, d’autres marquées par une présence insistante. Que faire de ses fantômes ? Dans la masse des livres récemment publiés, deux se font l’écho de ce souci des disparus. L’un baigné d’une mélancolie des plus sombres, l’autre non sans une certaine allégresse. Mais les deux rappellent au fond à leurs fidèles […]

lire la suite .../ ...
Le prix Nobel de littérature consacre l’oeuvre d’Annie Ernaux

821

commentaires

En proclamant hier la romancière Annie Ernaux, 82 ans, lauréate du prix Nobel de littérature 2022, l’Académie suédoise a justifié son choix en soulignant « le courage et l’acuité clinique avec laquelle elle découvre les racines, les éloignements et les contraintes collectives de la mémoire personnelle ». Celle-ci a aussitôt répondu en évoquant « l’honneur » qui lui était fait et la « responsabilité » qui lui en incombait. Accessoirement, Jean-Luc Melenchon a tweeté : « On en pleure de bonheur. Les lettres francophones parlent au monde une langue délicate qui n’est pas celle de l’argent ». Laissons-le à ses larmes extra-littéraires mais il n’en est pas moins vrai […]

lire la suite .../ ...
De quelques autres romans dont on parle aussi

938

commentaires

Faut-il vraiment considérer un roman comme un organisme vivant doté d’un cœur battant et ses deux ventricules, le réel et la fiction ? En tout cas, Isabelle Desesquelles illustre une fois de plus cette conception dans Là où je nous entraine (288 pages, 20,90 euros, Lattès) mais avec plus d’intensité encore que dans ses précédents livres. A croire qu’elle a tout jeté dans l’affaire, tout ce qu’elle avait de plus intime et de plus précieux comme on joue son va-tout. Et pour cause : nous voilà embarqués dans l’histoire de deux petites filles dont la mère, dépressive et romantique, traductrice du russe mais du […]

lire la suite .../ ...
De quelques livres dont on parle

De quelques livres dont on parle

1281

commentaires

Il faudrait être bouché à l’émeri, comme disait Anatole France, pour ne pas avoir entendu parler en bien de Cher connard (344 pages, 22 euros, Grasset). La chose fait un tabac en librairie, la plupart des médias l’ont chroniquée, la critique se pâme d’admiration (à de rares exceptions près, Eric Naulleau et Lucile Commeaux notamment). Alors, que se passe-t-il ? Même si Virginie Despentes (Nancy, 1969) a souvent connu l’ivresse des hauts tirages, cette fois il en va autrement. Son éditeur a eu la bonne idée de publier son livre le 17 août quand il n’y a personne ou presque en face, […]

lire la suite .../ ...
La bonne surprise de la rentrée : un monstre de 900 pages !

1209

commentaires

Ce qui frappe de prime abord dans Le Cœur ne cède pas (26 euros, Flammarion), c’est ce qu’il faudrait négliger, mettre à distance, oublier d’emblée. A savoir son énormité (908 pages grand format et 1,5 kgs au jugé), même si au lit, dans un fauteuil, dans le métro, celle-ci s’impose au lecteur désagréablement, la chose n’étant vraiment pas maniable. Las ! Une fois cet obstacle vaincu, Grégoire Bouillier nous entraine dans une incroyable expérience de lecture, une aventure littéraire qui tient en haleine pendant des jours et des nuits. Moins celle de son héroïne Marcelle Pichon que la sienne propre, leurs […]

lire la suite .../ ...
« Guerre » et la guerre, clés de Louis-Ferdinand Céline

1342

commentaires

Pas un fond de tiroir ni un rogaton, Guerre (édition de Pascal Fouché, avant-propos de François Gibault, 182 pages, 19 euros, Gallimard) de Louis-Ferdinand Céline (1894-1961), premier de ses textes inédits exhumés l’an dernier, est incontestablement une pièce d’un des puzzles les plus fascinants de l’histoire littéraire du siècle passé. Un chainon manquant dans la geste autobiographique de l’écrivain. Ferdinand, seul rescapé d’une compagnie décimée par un obus allemand pendant la première guerre mondiale, rencontre dans son errance un soldat anglais avec lequel il se rend à Ypres avant d’être soigné. Même si cela commence sur la ligne de front, […]

lire la suite .../ ...
Le (premier) centenaire d’un grand poème

1576

commentaires

Notre pays a-t-il jamais fêté l’anniversaire d’un grand poème en langue française ? Moi non plus, je ne vois pas, aucune date qui s’impose à l’esprit. Oh certes, en fouillant dans les catalogues annuels des célébrations et commémorations nationales (avant qu’une stérile querelle sémantique ne les enterre), on y trouverait probablement un hommage de la nation à la Balade des pendus ou Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage ou L’Albatros ou encore au Bateau ivre. Mais un grand poème unanimement tenu pour un classique moderne et qui ait dominé le XXème siècle dont il est issu ? On a […]

lire la suite .../ ...
Celle qui est ce qu’on veut qu’elle soit

1177

commentaires

Soit Eve, une jeune femme dans le Paris d’aujourd’hui, que la perspective de la mort, envisagée avec mélancolie mais sans tristesse, rend de son propre aveu décalée, inactuelle. Plus elle ressent l’absence d’un père de toute façon incertain, et l’abandon d’une mère avant tout soucieuse de son bon plaisir, plus elle se réfugie dans la littérature. Non pour l’écrire mais pour la lire. Des livres jusqu’à plus soif et parfois des manuscrits. Le jour où elle entend sa mère confier à l’un de ses amants de passage qu’il serait temps de l’« initier », on se dit : air connu. Ce n’est pourtant […]

lire la suite .../ ...
Pascal Quignard dans la nuit de sa musique intérieure

972

commentaires

Peut-on dire d’un roman qu’il est splendide ? On peut, et pas seulement sur le plan le plus évident, esthétique ou artistique, d’autant que l’on a rarement l’occasion de le faire. Dès la première page de L’amour la mer (400 pages, 22 euros, Gallimard), le pacte de lecture engage à s’accorder au rythme propre à l’auteur, à la cadence intérieure de Pascal Quignard. Ou pas. Ceux qui l’aiment prendront ce train et ne le regretteront pas. Car tous les Quignard sont convoqués sous la signature de ce livre : le conteur, le musicien, le romancier, le poète, le fragmenteur, l’essayiste, le moraliste, tous […]

lire la suite .../ ...