de Pierre Assouline

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La République des livres

Littérature de langue française

Pour saluer Jacques Drillon

Pour saluer Jacques Drillon

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Elégant jusqu’à bout, Jacques Drillon, qui vient de nous quitter à 67 ans la nuit de Noël. Jusqu’à la toute fin. Le 21 septembre dernier, avec quelques autres, je recevais de lui ce courriel: «Chers tous, Pardonnez ma brutalité : j’ai une sale tumeur au cerveau. Autant vous dire que mon avenir, même proche, n’est pas brillant. Nous allons essayer de ne pas le rendre trop lamentable. Plus grand chose ne marche, et tout va s’arrêter prochainement. La pensée d’abord, puis la vie. Prenez de mes nouvelles auprès de ma femme (mxxxx) Je vous embrasse, Jacques » Il fallait garder le secret par […]

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Dans le labyrinthe avec Mohamed Mbougar Sarr

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« Je vais te donner un conseil : n’essaie jamais de dire de quoi parle un grand livre. Ou, si tu le fais, voici la seule réponse possible: rien. Un grand livre ne parle jamais que de rien, et pourtant, tout y est. Ne retombe plus jamais dans le piège de vouloir dire de quoi parle un livre dont tu sens qu’il est grand. Ce piège est celui que l’opinion te tend. Les gens veulent qu’un livre parle nécessairement de quelque chose. La vérité, Diégane, c’est que seul un livre médiocre ou mauvais ou banal parle de quelque chose. Un grand […]

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De quelques fantômes familiers

De quelques fantômes familiers

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Qu’est-ce qui nous fait ouvrir un livre plutôt qu’un autre lorsqu’ils sont quelques centaines à se presser au portillon à la rentrée ? La couverture, le nom de l’auteur, le titre, le texte en quatrième de couverture, le résumé, l’absence de résumé qui laisse place à l’extrait, toutes choses qui se condensent en un mot : la curiosité. J’ai ouvert Si maintenant j’oublie mon île de Serge Airoldi (160 pages, 17 euros, L’Antilope) dans le souvenir que m’avait laissé l’auteur, journaliste daxois, ancien de Sud-Ouest, après la lecture il y a quelques années d’un récit exceptionnel intitulé Adour. Il figure parmi les […]

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Dans les zones grises de la rentrée littéraire

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Et d’abord, afin de dissiper tout malentendu, ce que la zone grise n’est pas : synonyme de flou, confus, vague, insondable, passif… Gris, quoi. En se popularisant, l’expression s’est galvaudée puis dégradée en métaphore. A la lumière des récents débats sur l’inceste et le viol, elle est même instrumentalisée pour désigner l‘incertaine frontière entre la résignation et le consentement. Qu’est-elle alors ? Même si en l’espèce la recherche de paternité est périlleuse, Primo Levi semble bien être le premier à l’avoir utilisée dans Si c’est un homme (1947) puis à l’avoir conceptualisée dans un chapitre des Naufragés et les rescapés (1986) intitulé […]

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Laissez partir les morts…

Laissez partir les morts…

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Il y a des écrivains avec qui des lecteurs ont passé un pacte. Ils les suivent depuis longtemps, parfois depuis leurs débuts, leur demeurent fidèles avec plus ou moins de bonheur, les retrouvent à chaque nouveau livre avec un plaisir mêlé d’appréhension non par crainte d’être surpris mais par peur d’être déçu. Et cela dure ainsi pendant toute une vie de lecteur… Entendons-nous bien : quoiqu’on attende de lui, et certains même se croient en droit d’en attendre une certaine qualité d’écriture voire un certain type de livre, un auteur ne nous doit rien, il n’a aucun compte à nous rendre. […]

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Des morts en bonne santé

Des morts en bonne santé

Daniel Lefort

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Albert Bensoussan a fait du récit bref, ou du roman court, sa marque de fabrique : c’est à chaque fois une variation sur un thème, toujours le même, comme en musique, et La tendre indifférence (12 euros, Le Réalgar) n’y fait pas exception en posant une sorte de point d’orgue provisoire – rien n’est définitif chez Bensoussan – à sa série ( une cinquantaine de volumes ) sur l’Algérie d’avant l’indépendance inlassablement revisitée, l’exil faussement habillé du mot « rapatriement » et le royaume du souvenir. L’exil et le royaume, comme chez Camus dont l’ombre tutélaire plane sur ce livre mémoriel. À travers […]

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Proust toujours, encore et encore !

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S’il est vrai que, selon la définition d’Italo Calvino, « un classique est un livre qui n’a jamais fini de dire ce qu’il a à dire », avec la Recherche du temps perdu, on est servis ! Cela fait un siècle que ce roman suscite un Himalaya de gloses et ce n’est pas terminé, on en annonce d’autres, de toutes sortes et de partout. Il est vrai qu’il parait inépuisable. Un véritable geyser de sens, de sensations, d’émotions. Tout lecteur qui le relit à quelques années d’écart est assuré de découvrir un nouveau livre dès lors qu’il aura pris connaissance des études, essais […]

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Pour saluer Philippe Jaccottet

Pour saluer Philippe Jaccottet

Pierre Assouline

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Si le comité Nobel de l’Académie suédoise, régulièrement sollicité en ce sens depuis des années, ne s’était décidé à laurer Philippe Jaccottet qui vient de nous quitter à 95 ans, nul doute que sa consécration en 2014 par la Pléiade sous la forme d’un volume d’Oeuvres (1728 pages, 59 euros) y serait pour beaucoup. Par « Œuvres », il faut entendre l’œuvre poétique. Encore faut-il s’accorder sur ce qui en relève. Il était le quinzième auteur à entrer de son vivant dans le temple, quatrième suisse à y être convié après Rousseau, Cendrars et Ramuz, mais-ceux-là à titre posthume ; encore est-il davantage fêté […]

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La littérature est leur vengeance

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Que n’aurais-je donné pour être présent le 9 décembre 2009 à la Bibliothèque nationale du Pérou à Lima ! Une rencontre y était organisée à l’initiative de l’Institut culturel italien local entre Claudio Magris et Mario Vargas Llosa. Une conversation dont on rêverait d’être l’attentif auditeur. Fort heureusement retranscrite, elle parait aujourd’hui sous leurs signatures conjointes et sous le titre La littérature est ma vengeance (La literatura es mi vengaza, traduit de l’italien pour les paroles de l’un par Jean et Marie-Noëlle Pastureau et de l’espagnol pour celles de l’autre par Albert Bensoussan et Daniel Lefort, 85 pages, 12 euros, Arcades/Gallimard). Il […]

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Séductions de l’ordre et du chaos

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Deux livres que le hasard de la librairie m’a amené quasiment en stéréo alors que l’un n’a rien à voir avec l’autre. Il est même son antagoniste sur le plan de la construction : autant l’un est rigoureusement organisé, autant l’autre part dans tous les sens. Ce qui fait leur attrait et leur secrète séduction, aux deux. Par le ton et la démarche, Une affaire si facile (160 pages, 17 euros, Le Cherche-midi) de Francis Szpiner (Paris, 1954) n’est pas sans rappeler son premier roman Une affaire de femmes (Balland, 1986), consacré à la « faiseuse d’anges » Marie-Louise Giraud que ses activités d’avorteuse […]

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