de Pierre Assouline

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La République des livres

Littérature étrangères

Traduire Peter Handke

Traduire Peter Handke

Georges-Arthur Goldschmidt

Que cela soit clair d’emblée, le traducteur n’est pas comptable des options politiques de l’auteur traduit. Celles-ci peuvent fort bien aussi être ressenties autrement qu’elles n’apparaissent. Vingt-cinq traductions en plus de trente ans, de 1972 à 2006, c’est un engagement dans le temps, un accompagnement de vie qui ne doit pourtant jamais déborder sur la traduction. Il s’agissait, en l’occurrence, de laisser la place à d’autres traducteurs passionnés, tels que Claude Porcell, Olivier Le Lay, Anne Weber et Pierre Deshusses. Il s’est agi aussi, naguère, de signer d’un pseudonyme transparent la traduction d’Un voyage hivernal pour, en quelque sorte, signaler […]

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Le traducteur trahi

Le traducteur trahi

JEAN-PIERRE PISETTA

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En 1983, troisième année de mes études supérieures de traduction, je dois choisir un texte à traduire pour mon travail de fin de parcours, à déposer en juin 1984. Sur une étagère de l’appartement de ma sœur où j’habite à l’époque,  je repère un livre italien dont la couverture est illustrée par un tableau de Folon. Amorosa presenza. Je ne connais pas l’auteur, Vincenzo Cerami. Je ne sais pas où ni pourquoi ma sœur a acheté un livre de cet écrivain dont le professeur de littérature italienne ne nous a jamais parlé. Je le lis sans prendre la peine de […]

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Les sentinelles de nuit de Javier Marias

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Tout écrivain est d’abord un lecteur. Une évidence toujours bonne à marteler quitte à lasser. L’envie nous en prend chaque fois que, dans une interview ou une confession sur ce qui lui tient lieu d’art poétique, l’un d’eux, plus nombreux qu’on le croit, donne l’impression d’être venu au monde écrivain, né d’une génération spontanée qui ne doit rien à personne et à si peu de livres qui ont précédé les siens. Foutaises ! Parfois un petit, souvent un grand lecteur. De ceux qui ont le goût des autres et s’en nourrissent. Ils ont différentes manières de payer leurs dettes, à supposer […]

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Le problème avec ceux qui ont un problème avec Peter Handke

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C’était à craindre et ça n’a pas manqué : sitôt l’annonce du prix Nobel de littérature 2019 décerné jeudi dernier à l’Autrichien Peter Handke (1942), des voix se sont faites entendre pour dénoncer la décision et ses motifs. Les académiciens suédois émergeaient à peine d’une série de scandales (Bob Dylan statufié en poète majeur, l’affaire Arnault, les démissions et la crise interne qui s’en suivirent) qui avaient considérablement affaibli leur institution : non pas « l’Académie Nobel », qui n’existe pas, mais le comité Nobel de l’Académie suédoise, lequel fait plancher toute l’année son comité d’experts qui lance ses filets un peu partout dans […]

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Enchanter le réel, louer les brumes

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Oui, bien sûr, la rentrée littéraire avec son cortège de premiers romans, de deuxièmes romans en espérant que ce ne seront pas des seconds romans, de valeurs sûres mais pas certaines, de meilleures ventes imprudemment annoncées (« Rien n’est triste comme un best-seller qui ne se vend pas », soupirait ironiquement le regretté Robert Laffont), ses prix littéraires et ses livres qui n’ont pas de prix, si peu d’élus et tant de déçus inconsolables (mais nul n’est obligé de paraître en septembre), ses intoxications savamment orchestrées mais si facilement repérées, oui, on y reviendra bien vite à la rentrée littéraire. En attendant, […]

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Philip Roth, discours de la méthode

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Rien de tel qu’un écrivain qui a annoncé sa retraite de son vivant pour publier ensuite à titre posthume. Des inédits et des quasi. Ainsi nomme-t-on ce qui est paru dans sa langue mais pas dans la nôtre. Ainsi, avec Pourquoi écrire ? (Why write ? traduit de l’anglais/Etats-Unis, par Lazare Bitoun, Michel et Philippe Jaworski, Josée Kamoun, 630 pages, 10,80 euros, Folio), Philip Roth nous revient tout sourire  un an après sa mort. C’est un peu sa vie mais surtout son œuvre, modes d’emploi. Avec de larges échappées du côtés de celles des autres (Primo Levi, Aharon Appelfeld,  Ivan Klima, Edna O’Brien, Milan […]

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Le souci des forêts de Richard Powers

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Parfois, on aimerait entrer dans un livre mais on n’y arrive pas. On ne sait pas par quel bout le prendre. Ce serait tellement plus simple de commencer par le début et de terminer par la fin. Seulement voilà, tous ne s’y prêtent pas naturellement, certains sont rétifs à cette convention, allez savoir pourquoi. Pourtant, ce livre qui résiste appelle secrètement le lecteur. Alors celui-ci essaie autre chose, y replonge à sauts et à gambades, finit par comprendre qu’il se croit exclu de cette lecture parce qu’il s’imagine être totalement étranger à son univers, ne s’en tient pas là, va […]

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Le féroce cri d’amour de Robert Menasse pour l’Europe

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On connaît des romanciers qui se lancent dans un projet comme dans un défi oulipien : soit tel personnage à telle époque dans telle ville et qui d’emblée se trouve soudain dans telle situation extravagante : que peut-il lui arriver ? Imaginez donc la suite si l’on vous dit que l’homme en question est en fait un cochon (lire ici les premières pages), un vrai porc lâché en plein quartier Sainte-Catherine à Bruxelles, surgi de la rue de la Braie, avant de tourner au coin de la rue du Vieux-Marché-aux-Grains, de manquer de se faire renverser par des voitures et de poursuivre son […]

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Une fois retraduit, plus tout à fait le même livre

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Au fond, mieux que par un critique, un universitaire, un correcteur, un éditeur, un libraire et même mieux que par son auteur, un livre n’est jamais aussi bien désarmé que par son traducteur. Lui seul peut lui faire rendre les armes au sens propre, le défaire de tout ce qui le protège. Tout auteur dont l’œuvre a été transportée dans une autre langue peut en témoigner : en l’interrogeant sur ou tel point obscur, son traducteur a mis le doigt là sur une incohérence, ici sur un oubli, plus loin sur une contradiction, ailleurs encore sur des fautes, des lacunes qui […]

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Dans l’atelier de l’écrivain, par-dessus son épaule

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A-t-on toujours envie d’aller faire un tour à l’arrière du côté des casseroles, là où la sauce mijote encore, avant de savourer un plat au restaurant ? L’expérience peut s’avérer néfaste –et encore, il ne s’agit pas de se projeter bien en amont du côté des abattoirs ni même de subir à table le rituel du canard à la rouennaise baignant dans une sauce au sang frais constituée de sa carcasse, de sa moelle osseuse et son foie broyés dans une presse. De l’écrire provoque déjà un haut le cœur. J’y repense chaque fois qu’il est question d’emmener dans les cuisines […]

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